Le projet de la loi des finances rectificative devrait subir de nouveaux amendements au sein de la 2e Chambre. Le gouvernement doit être plus réactif pour insérer une nouvelle batterie d'avantages au profit du tissu productif. Après le feu vert, dans un délai record, de la 1ère Chambre, le Projet de la Loi des finances rectificative (PLRF) passe à la seconde étape de son examen parlementaire. La version finale, approuvée par la Chambre des représentants, montre que le gouvernement a pu se mettre d'accord avec les députés sur une série de mesures destinées à atténuer le choc engendré par la crise sanitaire que traverse le pays depuis mars dernier. La liste des amendements, insérés et votés lors de la plénièreréservée au projet, indique que l'allégement des charges fiscales a focalisé le débat lors de l'étape de la 1ère lecture, avec une série de mesures qui ont changé dans la version finale du projet du budget rectificatif. Ainsi, une exonération des impôts d'une année supplémentaire en faveur des entreprises qui entament des projets d'investissement, qui construisent des établissements hôteliers ou agissent dans le domaine du logement social, a été décrétée. L'Etat exige que cette exonération soit cadrée par une convention bipartite. Le 2ème amendement phare, qui a été accepté par le gouvernement, consiste à permettre aux entreprises d'être affranchies des majorations et des amendes concernant l'acquittement de leurs dettes fiscales au titre de l'IR ou de leurs revenus professionnels pour l'exercice 2019. Cette disposition s'applique aux sociétés dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 20 MDH, ainsi qu'aux personnes physiques. En contrepartie de cette souplesse, un délai, qui expire le 30 septembre 2020, a été accordé pour un paiement spontané des dettes fiscales qui sont encore exigibles. Pour les contribuables qui ont été sous le coup d'un audit pour les années 2016, 2017 et 2018, l'Etat a décidé de traiter l'ensemble des dossiers en suspens. Pour les entreprises qui ont bénéficié du concours budgétaire du Fonds de lutte contre le coronavirus, un amendement a été accepté par le gouvernement pour ne pas comptabiliser les sommes reçues pour une durée de 5 ans. S'agissant du volet des droits d'enregistrement, la version finale de la loi des Finances rectificative a élargi le domaine de la baisse des droits exigés pour inclure les contrats d'achat des terrains servant aux logements, avec une hausse de la base imposable de 1MDH à 2,5 MDH. Cet avantage est prolongé jusqu'au 31 décembre 2020. Le département des Finances doit, d'un autre côté, élaborer un décret au sujet des chèques de voyages qui seront accordés aux salariés en tant qu'avantages en nature. Les objectifs stratégiques recherchés dans 6 mois Dans sa réponse aux critiques et remarques émanant des groupes parlementaires au sein de la 1ère Chambre, le ministre de l'Economie, des finances et de la réforme administrative, Mohamed Benchâaboun, a minimisé l'impact du «retard», constaté avant de présenter le projet au Parlement. «Il n'y a aucun flou dans la gestion de la crise. C'est une chose cruciale lorsqu'on parle des mesures à vocation stratégique et prospective qui sont prévues par le projet», a indiqué l'argentier du pays, durant son 2e oral sous la Coupole. Le projet de la loi de Finances rectificative «s'inscrit dans le cadre d'une stratégie claire de la gestion de la crise qui a été adoptée par le gouvernement dans toutes ses composantes», a ajouté le ministre. Pour marquer la position du gouvernement durant le reste de l'année 2020, c'est la sauvegarde des postes d'emploi qui focalisera l'attention, ainsi que de s'appuyer sur les dotations du fonds «pour l'accompagnement social des secteurs qui devront continuer à subir l'impact de la Covid-19», selon l'argumentaire de l'Exécutif. L'Etat prépare, en effet, un nouveau cadre contractuel avec toutes les parties concernées pour «la protection de l'emploi et l'intégration dans le secteur organisé», a souligné Benchaâboun devant les membres de la 1ère Chambre. Une dotation de 15MMDH sera injectée pour le soutien des entreprises, avec le lancement de «nouveaux mécanismes de Partenariat public-privé, et avec une sélection des projets qui sera basée essentiellement sur leur impact positif sur l'emploi», précise la feuille de route du gouvernement pour les 6 prochains mois. Pour l'épineuse question de la baisse des dépenses d'investissement, les dispositions finales du budget indiquent que le département de l'Education devra réduire ses dépenses de l'ordre de 877 MDH, qui portent sur des projets qui connaissent déjà des difficultés engendrées par la non-épuration du foncier ou en raison du retard constaté dans leurs études techniques. Pour l'enseignement supérieur, une réduction de 300 MDH du budget d'investissement a été également actée en raison du retard constaté au niveau du lancement des travaux de plusieurs nouveaux projets prévus par le budget normal de l'année 2020. Du côté des élus, les actions qui sont préconisées s'articulent autour de l'implication des collectivités territoriales en vue d'instaurer des Comités de veille économique régionaux. Les élus veulent aussi «augmenter les dotations allouées au Fonds de lutte contre le coronavirus, ainsi que le soutien des familles et des citoyens qui travaillent dans le secteur organisé, à travers l'incitation des entreprises à sauvegarder les postes d'emploi». Les modalités des investissements publics sont également en ligne de mire. Un système numérique central sera mis en place afin d'assurer le suivi de l'ensemble des départements ministériels, y compris ceux mis en œuvre par les établissements publics. Malgré un fort pourcentage des investissements publics au niveau territorial, les projets demeurent pourtant marqués par une concentration au niveau de deux régions. Les députés se focalisent aussi sur les prévisions pour la période 2021-2022, essentiellement les projets qui se rapportent à l'eau, l'environnement, l'énergie et les mines, sans oublier les infrastructures du transport qui représentent prés de 63%. Une nouvelle ingénierie des priorités La Santé et l'Eau viennent en tête de liste des secteurs qui ont bénéficié de l'apport budgétaire exceptionnel prévu par l'Etat. Les données finales du Projet de la Loi de finances rectificative montre que 800 MDH ont été programmés pour le lancement d'un programme prioritaire au sein des zones qui souffrent du déficit hydrique, ajoutés à 250 MDH qui devront être consacrés à la ville d'Agadir pour l'approvisionnement en eau potable. La lutte contre l'impact de la sécheresse devra, quant à elle, bénéficier d'une dotation de 300 MDH. Les données communiquées aux députés indiquent que l'ensemble des projets qui sont prévus par le Fonds de développement rural et qui totalisent 5,7 MMDH, seront maintenus. Pour les collectivités territoriales, un engagement gouvernemental a été réitéré, faisant en sorte que l'Etat ne procédera à aucune baisse de leurs budgets, même si la part des 30% des recettes de la TVA, transférés aux régions et aux communes, doit nécessairement baisser. Younes Bennajah