Ils persistent et signent : les professionnels veulent un «nouveau type de partenariat» avec l'Union européenne (UE) dans le secteur de la pêche. Le patronat sectoriel pose ses conditions à une éventuelle remise à flots de l'accord de pêche entre le Maroc et l'entité communautaire européenne. Cette dernière entité a annoncé, mercredi, avoir opéré une approche officielle auprès des autorités du royaume, par voie de lettre diplomatique, pour les inviter à une reprise des négociations dès le mois de juin prochain, en vue d'une reconduction du partenariat dans le secteur de la pêche. Jusqu'au moment où nous mettions sous presse, la tutelle n'avait pas encore confirmé la réception de la «lettre» en question. Du côté des professionnels, du moins, cette nouvelle approche est appréhendée de façon plus réactive, estimée comme une opportunité de revoir le positionnement du royaume dans ce dossier, même si ces derniers persistent sur le fait qu'ils sont, sur le principe, contre tout accord de pêche avec l'UE. «Nous ne l'acceptons que pour des raisons patriotiques, car la tutelle soutient que ce partenariat nous est bénéfique dans l'intérêt politique du Maroc», avance Hassan Oukacha, le président de la Fédération de la pêche maritime (FPM). Du côté des autorités publiques, en effet, la sauvegarde de l'intégrité territoriale du royaume – faisant référence au dossier du Sahara marocain et sa prise en compte dans les clauses de l'accord de pêche – ainsi que celle des intérêts économiques, sont les conditions sine qua non à tout projet de renouvellement du partenariat avec l'UE dans le secteur de la pêche. Aziz Akhannouch, le ministre de l'Agriculture et de la pêche maritime, a été suffisamment clair sur ce point lors de la dernière visite de son homologue espagnol, Miguel Arias Cañete, à Rabat. Meilleur parti Pour en revenir aux nouvelles priorités des professionnels, l'intégration de ceux-ci dans les négociations figure en bonne place. «Nous souhaiterions que l'Etat nous mette davantage dans le coup», déclare le responsable. De plus, il est une autre priorité aux yeux des professionnels relative cette fois à l'instauration d'un contrôle plus efficace et de la nécessité du suivi des captures européennes dans les stocks halieutiques du pays. «C'est un point important sur lequel nous insistons. Les navires européens devraient être amenés à débarquer, sur les ports de pêche marocains, la totalité de leurs captures, avant de les expédier vers le marché européen», poursuit le responsable de la FPM. Pour celui-ci, cela devrait permettre aux autorités locales d'avoir une meilleure visibilité sur le respect des quotas. Sans oublier, évidemment, une révision substantielle de la contrepartie financière versée par les autorités européennes au Maroc, dans le cadre de ce partenariat. Il s'agit, sur la base des termes actuels, d'un montant d'un peu plus de 30 millions d'euros. Ce montant est «très dérisoire et disproportionnel par rapport aux enjeux», défend cet autre responsable du secteur, membre de la Chambre professionnelle de la pêche maritime d'Agadir. Aussi, la valorisation industrielle locale de ces captures est également devenue un impératif pour le privé du secteur halieutique. Une mesure qui pourrait favoriser une hausse des investissements privés étrangers dans ce secteur, avec tout ce que cela suppose en termes de création d'emplois et de revenus fiscaux. «L'Etat est dans un contexte économique qui exacerbe les besoins de création de richesses, mais également d'une meilleure redistribution de celles-ci». Il ne reste par conséquent plus qu'à espérer que public et privé puissent parvenir à ramer dans le même sens, lors d'une éventuelle reprise des négociations relatives à cet accord. La main européenne est tendue «Nous attendons un retour d'information des autorités marocaines». Maria Damanaki, la Commissaire européenne à la Pêche, a confirmé mercredi, à travers ces propos, avoir entamé une démarche auprès des autorités publiques du royaume, pour une reprise des négociations autour d'un projet d'éventuel renouvellement de l'accord de pêche. La responsable s'adressait aux eurodéputés, précisant que la requête officielle adressée au Maroc, proposait une reprise des pourparlers entre les deux parties, dès le mois de juin prochain. Il faut savoir que la facture du rejet du Parlement européen, de la reconduction de l'accord de pêche avec le Maroc, a été fortement préjudiciable pour le secteur halieutique européen, en l'occurrence espagnol. Le voisin ibérique affrétait en effet, une centaine des 119 navires qui devraient bénéficier de l'accord de pêche avec l'UE. Pendant quelques temps, l'alternative - impossible - d'un partenariat bilatéral a très vite couru dans les coulisses des relations diplomatiques, entre l'Espagne et le Maroc. Depuis l'installation du gouvernement Benkirane et la reprise du dossier de l'accord par Aziz Akhannouch, les récentes et répétées virées de Maria Arias Canete, pour rencontrer son homologue marocain, trahissaient quelque peu l'ambiance de pressions multiples auquelles les associations des professionnels espagnols de la pêche, avaient assujetti leur tutelle. Pour l'heure, un plan de soutien financier est déjà en œuvre actuellement, au profit des pêcheurs espagnols. Dans les hautes sphères communautaires, l'assurance d'un «nouvel accord équilibré» n'est, de cesse ressassé, pour donner une chance à la remise à flot.