Sur les 10.000 logements annoncés par l'Etat à l'horizon 2015, à peine 1.675 sont déjà disponibles. Alors que les délais se raccourcissent, les entreprises étrangères sont de plus en plus sollicitées pour la réalisation de cette promesse qui date de 2004. Il sera procédé, dès le mois de juin prochain à la commercialisation de la première vague des logements sociaux promis par le gouvernement camerounais depuis 2004 et mis en œuvre dès 2009. Cette première livraison concerne un total de 1.675 logements dont la construction est terminée au quartier Olémbé, une banlieue de la capitale Yaoundé. Une commission vient ainsi d'être mise sur pied au ministère de l'Habitat et du développement urbain (MINHDU) pour arrêter et proposer au gouvernement les modalités d'éligibilité et de vente de ces premiers logements. D'après certaines sources dans l'administration camerounaise, la commercialisation de ces logements-témoins devrait rapporter près de 33,5 milliards (51 millions d'euros) de FCFA à l'Etat. Néanmoins, des voix s'élèvent dans les rangs de la population pour dénoncer la valeur «élitiste» de ces logements pourtant dits sociaux car, apprend-on, le citoyen devra débourser à partir de 10 millions de FCFA (15.245 euros) pour acquérir le plus modeste d'entre eux. Une barre bien haute pour l'écrasante majorité de la population d'un pays où le taux moyen de pauvreté qui est de l'ordre de 40% dépasse 60% dans certaines régions. Ces habitations font partie d'un programme de construction de logements sociaux lancé par le gouvernement camerounais en 2009. Il était alors question de livrer un total de 10.000 logements sociaux à l'horizon 2015 dans les principales villes du pays, dont Douala et Yaoundé. Seulement, les choses ne se sont pas passées comme prévues et en janvier 2013, Jean Claude Mbwentchou, le ministre de l'Habitat constatait que les chantiers de la première vague accusaient déjà plus de 22 mois de retard dans leur livraison. Un retard qui n'est pas sans conséquence quand on sait, à en croire l'agence Chine nouvelle, que leur commercialisation devait permettre «la constitution d'un matelas financier pour le financement des autres logements du programme.» Parmi les raisons alors recensées pour expliquer ce retard, il y avait le choix jugé «complaisant» des entreprises devant exécuter ces travaux. Lesquelles entreprises ne disposent pas des capacités financières suffisantes. De leur côté, ces entreprises, toutes camerounaises, soulèvent deux griefs : d'un côté, les financements de l'Etat qui arrivent au compte-gouttes et de l'autre, les études préalables qui n'avaient pas été bien faites, entraînant des surcoûts. Quoi qu'il en soit, alors que l'on est à deux ans seulement de l'échéance, l'Etat a décidé d'en tirer les leçons et de se tourner vers des opérateurs étrangers pour la suite du programme. C'est ainsi que des entreprises espagnoles et chinoises sont d'ores déjà à pied d'œuvre sur certains chantiers, alors que des Turcs et des Qataris se sont déjà manifestés. Auparavant, d'autres investisseurs avaient spontanément exprimé leur intérêt pour ce programme. À l'exemple du nigérian Dangote et du marocain Addoha qui terminent actuellement la construction de leurs usines de ciment à Douala, pour une production annuelle prévue entre 500.000 et un million de tonnes car, Cimencam, filiale du français Lafarge et seul producteur actuel, ne satisfait pas la demande. Avec une population estimée à plus de 20 millions d'habitants, le Cameroun compte à ce jour moins de deux millions de logements décents et affiche, selon les statistiques officielles, un déficit de l'ordre d'un million de logements. Les instruments mis en place par l'Etat depuis plusieurs décennies pour financer, aménager des espaces et construire des logements n'ayant produit jusqu'ici que des résultats limités : à peine 10.000 parcelles aménagées et environ 11.000 logements construits. Thierry Ekouti Dir.pub-Le Quotidien de l'Economie (Cameroun) Une bonne loi... et après ? Une loi fixant les incitations à l'investissement privé a été votée par l'Assemblée nationale camerounaise et promulguée le 18 avril dernier. Elle prévoit un nombre considérable de faveurs aux opérateurs économiques nouveaux ou anciens dans le pays. Cette loi vient satisfaire l'une des nombreuses attentes exprimées pendant longtemps par les acteurs du secteur privé à chacune de leurs rencontres avec les pouvoirs publics. Et André Fotso, le président du Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam), principal mouvement patronal du pays, n'a d'ailleurs pas caché sa satisfaction. Il estime que pour une fois, les pouvoirs publics ont réellement pris en compte les observations des chefs d'entreprise et des investisseurs. Sauf que le tout n'est pas d'avoir une bonne loi. Il faut encore que son application soit, elle aussi, bonne. Les juristes sont souvent montés au créneau pour dire qu'au Cameroun, le problème se pose surtout au niveau de la mise en œuvre au quotidien des textes adoptés, qui sont généralement de bonne qualité. Car, il est régulièrement reproché aux fonctionnaires de retarder volontairement la signature ou la délivrance d'un document pour amener le demandeur à leur verser un bakchich. Il est aussi fréquent qu'une pièce gratuite dans les textes soit vendue dans les faits par l'agent responsable de sa délivrance ; ou qu'un document revienne plus cher que ce qu'il devrait. Et des études ont montré que cette corruption généralisée n'épargne aucun secteur de la société. Il est donc indispensable pour les pouvoirs publics d'agir aussi sur le levier de la lutte anticorruption. N'ayant qu'une force de dénonciation, une institution comme la CONAC (Commission nationale anticorruption) se révèle encore inefficace. Et malgré ses nombreux rapports mettant en cause plusieurs administrations, le problème reste entier. Il faut donc aller plus loin...