L'interdiction prononcée par le gouvernement depuis le mois d'août et rendue publique la semaine dernière vise à permettre aux usines locales, parmi lesquelles Cimaf Cameroun, de s'imposer sur le marché. Le gouvernement camerounais a récemment décidé de suspendre les importations de ciment. Cette mesure, prise le 21 août, a fait l'objet d'une rencontre, le 1er octobre dernier, entre le ministre du Commerce et les autres acteurs de cette filière ; à savoir les producteurs, les importateurs et, bien sûr, les consommateurs. À cette occasion, Luc Magloire Mbarga Atangana, a expliqué que cette mesure d'interdiction se justifie par le souci de protéger l'industrie locale et les emplois qu'elles offrent, tout en rassurant les investisseurs étrangers dont les usines entrent progressivement en service dans ce secteur d'activité. Relais local C'est le cas de l'usine de Cimaf (Ciments d'Afrique) la filiale du groupe du patron marocain d'Addoha. Son unité, située dans la zone industrielle de Bonabéri à Douala, est entrée en phase de production depuis le mois de février 2014. Pour une capacité annuelle de 500.000 tonnes. Présent à cette rencontre, Patrick David, le directeur général de Cimaf Cameroun, a confié à la presse locale que «les importations ont été nécessaires à un moment donné, mais avec l'effort qui a été fait pour développer l'industrie locale, elles doivent laisser place à une production nationale qui va permettre au pays de continuer à se développer». À le croire, Cimaf Cameroun est d'ailleurs prêt à relever ce défi : «Nous avons commencé avec une production de 500.000 tonnes par an ; mais nous comptons doubler cette capacité de production dans les prochains mois». C'est aussi le cas du français Lafarge à travers sa filiale Cimencam (Cimenteries du Cameroun) qui a gardé longtemps le monopole de la production locale avant l'entrée en service de Cimaf Cameroun. Cimencam exploite actuellement deux usines situées respectivement à Douala et Figuil dans le nord du pays, pour une production de l'ordre de 1,6 million de tonnes par an. «Les capacités de production, avec le démarrage des usines concurrentes, vont être en mesure de dépasser les besoins du marché ; c'est important pour les besoins de l'économie nationale que le ciment soit produit au Cameroun», analyse pour sa part Pierre Damnon, le directeur général de Cimencam. Outre Cimaf, l'autre concurrent auquel il fait allusion est la filiale camerounaise du nigérian Dangote Cement dont l'usine, située elle aussi à Douala, est censée entrer dans sa phase de production au courant de ce mois d'octobre 2014, avec un million de tonnes par an. Ainsi, la production totale de ciment au Cameroun devrait sous peu se situer autour de 3,1 millions de tonnes. De quoi satisfaire la demande que le gouvernement situe actuellement à environ trois millions de tonnes. 8 millions de tonnes Du côté des importateurs, la mesure ne pose pas de problème spécial. «Maintenant, il y a des industries locales ; nous allons voir si elles ont la possibilité de satisfaire le marché», commente un haut cadre de Sorepco, un des principaux importateurs de la place. «Nous allons les encourager. La suspension des importations ne nous fait pas de mal. Mais, nous souhaitons que le gouvernement tiennent compte des encours qui sont de 55.000 tonnes chez nous», poursuit-il. Selon les statistiques officielles, le Cameroun a importé 1,7 million de tonnes de ciment en 2013, pour un montant de l'ordre de 88,5 milliards de FCFA (177 millions de dollars). À moins que les autres cimenteries qui sont en projet ne finissent par voir le jour, l'interdiction de l'importation du ciment pourrait ne pas durer longtemps. Non seulement parce que la demande de ciment sur le marché connaît une croissance rapide ces dernières années ; mais aussi parce que de nombreux grands travaux engagés depuis quelques temps aussi bien dans le secteur des logements sociaux, des travaux publics que dans celui de l'énergie hydroélectrique sont considérés comme étant très gourmands en ciment. D'ailleurs, le ministère de l'Industrie estime qu'au plus fort de ces chantiers dits structurants, la demande en ciment devrait atteindre 8 millions de tonnes par an. Billet L'avenir à reculons Le maire de la commune de Douala 1er a récemment institué une journée de propreté dans sa circonscription en demandant que toutes les entreprises soient fermées chaque mercredi entre 05h00 et 09h00, le temps de procéder au nettoyage des places publiques de cette circonscription qui abrite le siège d'un grand nombre d'entreprises camerounaises. Cette mesure largement contestée par les chefs d'entreprises, donne l'occasion de rappeler que comme la sécurité des biens et des personnes incombe à l'Etat, la salubrité publique relève de la compétence des collectivités territoriales décentralisées. Dès lors, les entreprises qui payent déjà des taxes et impôts divers (y compris pour l'hygiène et la salubrité) ne sauraient raisonnablement recevoir l'injonction de fermer leurs portes pour faire «le ménage». Alors même que la municipalité est censée disposer de services compétents et de moyens conséquents pour cette tâche. Un passé malheureusement lointain nous rappelle d'ailleurs que ces services allaient jusque dans les domiciles privés pour s'enquérir de l'état de salubrité, avec parfois des pénalités pour les ménages mal tenus. Nos mairies feraient mieux de réactiver ces mécanismes, plutôt que de toujours rechercher ces solutions de facilité qui nous font entrer dans l'avenir à reculons. Thierry Ekouti, Dir. pub - Le Quotidien de l'Economie (Cameroun)