Les exploitations agricoles concernées en premier lieu, suivies par les entreprises de services et le textile. Non-respect du code du travail et licenciement sont les deux principales causes des conflits collectifs. Les conflits collectifs du travail sont en hausse depuis 2007. C'est ce que montrent les statistiques du ministère de l'emploi sur l'évolution de la conflictualité dans le monde du travail. En 2010, en effet, le nombre de grèves recensées s'élevait à 241, contre 231 en 2009 (+4,3%). Par rapport à 2007, la progression est de 32,4 %. C'est donc une évolution inverse par rapport à celle observée entre 2001 et 2007 où la conflictualité baissait d'une année à l'autre (voir tableau). Les conflits individuels, en revanche, sont en baisse : 33 610 en 2010, au lieu de 36 729 en 2009 (-8,5%). Normal, pourrait-on considérer : lorsque les conflits collectifs, c'est-à-dire les grèves, sont en augmentation, mécaniquement les conflits individuels ont tendance, eux, à régresser (les premiers prenant en charge les griefs des seconds en quelque sorte). Les syndicats CDT, UMT et les SAS cumulent 157 grèves à eux trois Mais pourquoi cette recrudescence des grèves ? Les causes des conflits collectifs, recensées là encore par le ministère de l'emploi, laissent voir la prédominance des motifs liés au non-respect de certaines dispositions du code du travail. Immédiatement vient le licenciement et, en troisième position, le retard dans le versement des salaires. A eux seuls, ces trois motifs constituent 55% des causes à l'origine des conflits collectifs. Sans doute, y a-t-il un lien à établir entre ces motifs-là et la prise en charge des grèves qui en ont découlé par des syndicats connus et anciens. Ainsi, la Confédération démocratique du travail (CDT) vient en pôle position avec 70 grèves à son actif, soit plus de 29% du total. Au deuxième rang, on retrouve l'Union marocaine du travail (UMT) avec 58 grèves (un peu plus de 24%). La troisième place est occupée par les Sans appartenance syndicale (SAS) avec 29 grèves, devançant l'Union nationale des travailleurs du Maroc (UNTM proche du PJD) avec 24 grèves et, surtout, l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM proche du parti Istiqlal) avec 20 grèves. La Fédération démocratique du travail (FDT), sortie du sein de la CDT, occupe, elle, la sixième place avec 16 grèves déclenchées. Mais contrairement à ce que d'aucuns pourraient penser, les syndicats ne font pas que décréter des grèves, ils en évitent aussi. Et celles qu'ils ont évitées en 2010 étaient nettement plus nombreuses que celles qu'ils ont organisées : 825 grèves évitées pour 241 déclenchées. Et là, ce sont les SAS qui s'adjugent la première place avec 234 grèves évitées, suivis de l'UMT (222 grèves évitées), la CDT (119), l'UGTM (66) et la FDT (44). A eux seuls, ces cinq syndicats ont évité 685 grèves sur 825 (plus de 83%). En d'autres termes, les syndicats ont un rôle crucial dans la paix sociale, mais, comme souvent, ce que l'opinion et surtout certains chefs d'entreprises retiennent, ce sont les grèves abouties. Tout cela montre bien que la conflictualité, qu'elle soit réelle (grèves déclenchées) ou potentielle (grèves évitées), est en hausse ces dernières années. Et la récurrence de motifs liés à la non- application de certaines dispositions du code du travail confirme, d'une certaine manière, la bataille autour de la réforme de certains articles de ce texte, engagée au lendemain même de son entrée en vigueur. Beaucoup ont encore en mémoire le reproche fait à l'ancienne équipe de la CGEM, celle de l'époque de Hassan Chami, d'avoir accepté de signer un texte jugé peu protecteur des intérêts du patronat. Tanger concentre le plus grand nombre de grèves Quelles sont maintenant les branches d'activité où il y eut plus de grèves en 2010? Les statistiques du ministère de l'emploi mettent l'agriculture à la première place avec 30 grèves. Les services fournis principalement aux entreprises en deuxième position (23 grèves), l'industrie de l'habillement et des fourrures vient en troisième position (20 grèves), l'industrie alimentaire en quatrième position (18 grèves) et la fabrication de produits minéraux non métalliques en cinquième position (15 grèves). Au plan de la répartition géographique de ces conflits collectifs, on constate que ceux-ci n'ont pas eu pour théâtre principal les grandes agglomérations, comme on aurait tendance à le croire. C'est en effet à Tanger qu'il y eut le plus de grèves en 2010 (20 conflits collectifs recensés). Immédiatement après, on trouve Agadir Tiznit/Aït Melloul/Inezgane avec 18 grèves, puis Settat/Berrechid avec 15 grèves, Casa/Hay Hassani/Aïn Chock avec 14 grèves, et en cinquième position à égalité avec 12 grèves chacune les villes de Rabat, Meknès et Casa/Sidi Bernoussi/Zenata. Au chapitre des conflits individuels, le ministère de l'emploi a également recensé le nombre total de réclamations formulées : 72 084 contre 79 223 en 2009, soit une baisse de 9%. Un peu plus de 62% de ces réclamations (soit 44 797) ont été satisfaites, selon le ministère de l'emploi. Celui-ci précise même que 46 67 ouvriers, soit exactement le même nombre qu'en 2009, ont pu être réintégrés dans leur travail. Mais le ministère ne nous dit pas combien représentent ces ouvriers réintégrés par rapport à ceux qui ont fait l'objet de licenciement; sachant que le licenciement, comme indiqué plus haut, est le deuxième motif du déclenchement des grèves. Notons enfin que le regain de tensions dans les relations socioprofessionnelles paraît nettement en phase avec la crise économique, du moins sur le plan temporel ; les deux phénomènes connaissant une montée en puissance à partir de 2008. Y a-t-il pour autant une relation de cause à effet ? En 2006, il y avait autant de grèves qu'en 2010 et en 2001 et 2002 beaucoup plus encore qu'aujourd'hui…