Albares : "Le Maroc et l'Espagne vivent le "meilleur moment de leurs relations bilatérales""    Recensement général : des résultats qui interpellent    Fraudes fiscales, collusion entre élus et promoteurs immobiliers dans la région de Casablanca-Settat : les services de Laftit documentent de graves agissements délictueux    Ces Marocains qui ont gouverné l'Algérie    Marrakech : Omar Hilale en mode décontracté à Jamâa el fna    Cryptoactifs au Maroc : La nouvelle loi va réguler le secteur sans freiner l'innovation    Batteries au lithium: Rachid Yazami décroche un brevet en Chine    Taux directeur : BAM lance l'acte II de la détente monétaire    Le Maroc et le Chili exposent à Rabat leurs expériences en matière de gestion de l'eau    «Depuis 2002, nous avons transporté plus de 3,65 millions de passagers entre Casablanca et Dubaï»    Les protagonistes libyens reprennent les pourparlers à Bouznika pour tenter de surmonter le blocage politique    Diplomatie : Pedro Sánchez attendu samedi à Rabat    Sécurité sociale : les Marocains, premiers contributeurs étrangers en Espagne    Pedro Sánchez attendu à Rabat pour présider une réunion de l'Internationale socialiste    Prix '' The Best FIFA 24: Vinicius, Bonmati et Ancelotti lauréats    Foot mondial : La FIFA établit son 3e bureau régional au Maroc (Rabat)    Foot africain : La CAF confirme l'organisation du tirage de la CAN (H) 25, de la CAN U17 et de la CAN (F) au Maroc en 2025    La 11ème édition de « Rabat Vélo »    Blessé à la cheville droite, Lamine Yamal forfait 3 à 4 semaines    Béni Mellal : Mise en échec d'une tentative de trafic de 3,96 tonnes de chira    À Bakou, un mémorandum d'entente et de coopération entre la HACA et l'ACRA signé    Stress hydrique : Des jeunes marocains proposent des solutions innovantes (Students' Innov'Up 2024)    La femme qui a dit non    Spectacles nocturnes inédits au Palais Bahia, du 18 décembre au 10 janvier    Lahjomri : «La paix et la sécurité, une responsabilité collective pour un monde plus juste et équitable»    Hakim Ziyech regrette d'avoir rejoint Galatasaray et annonce son départ en janvier    Mondial 2030 : "Trop tôt" pour s'exprimer sur les retombés économiques, selon Abdellatif Jouahri    Le Conseil de sécurité appelle à un processus politique «inclusif» et «mené par les Syriens»    Soutien à l'investissement : mobilisation de près de 18 000 hectares au profit d'activités sectorielles    Maroc-Afrique : un volume d'échanges commerciaux de près de 52,7 milliards de dirhams en 2023    Le Français NGE signe son premier contrat ferroviaire au Maroc portant sur le lot 3 de l'extension de la ligne reliant Kénitra à Marrakech    Maintenance de la centrale thermique de Jerada : l'appel d'offres pour le projet d'acquisition de pièces de rechange UPS annulé, China Power prépare une nouvelle annonce    Quels impacts sur la santé ?    Casablanca : Deux morts dans un accident à la station de Tramway Ibn Tachfine    Xi Jinping prononce un discours lors de la Conférence centrale sur le travail économique    Tsahal prend ses aises au Golan    Le temps qu'il fera ce mercredi 18 décembre 2024    Les températures attendues ce mercredi 18 décembre 2024    L'Internationale Socialiste tient ses trois réunions à Rabat    Kenya. Ruto veut renforcer la sécurité des frontières maritimes    FIFA The Best : Lionel Messi a voté pour Lamine Yamal    Mayotte : Bayrou sous le feu des critiques    Réunion du Comité Afrique de l'Internationale Socialiste: le discours de Driss Lachgar    OULED EL BLED sort son premier album « Gwer Mgharba » Disponible sur toutes les plateformes de streaming    RGPH : Un Marocain sur quatre utilise l'amazigh au quotidien    La Princesse Lalla Hasnaa et Sheikha Sara bint Hamad al-Thani président à Doha le "tbourida show"    Un musée virtuel trilingue pour préserver l'héritage de la communauté marocaine juive voit le jour    Essaouira : Le festival Jazz sous l'Arganier accueille le malien Cheikh Tidiane Seck    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Bouanani ou l'oeuvre du silence
Publié dans La Vie éco le 15 - 02 - 2011

Nous étions quelques-uns à connaître les trésors cachés dans un capharnaüm de livres, cassettes vidéo de films, revues littéraires, documents, manuscrits de livres ou de scénarii. Une oeuvre inédite à été ravagée un jour par un incendie à la grande désolation des rares amis qui en avaient furtivement pris connaissance.
«A la fin tu es las de ce monde ancien», disait Apollinaire au début de son beau poème Zone. Las, Ahmed Bouanani l'était de bien des choses et il vient de nous quitter depuis son refuge de Demnate. Notre ami le poète est mort et nous sommes quelques-uns à en avoir pris connaissance -sans y croire au début- en ce dimanche ensoleillé du mois de février par un petit texto aussi bref que froid : «A. Bouanani est décédé». Les mots n'ont plus de sens lorsqu'un poète ami meurt et que l'on s'entête à lui rendre hommage. On laissera aux rubriques nécrologiques le soin de rappeler et détailler sa date de naissance, son œuvre et son itinéraire. Mais nous retiendrons que son œuvre est faite de silences et que son itinéraire est des plus atypiques. Ecrivain, poète et cinéaste, Bouanani fait partie de la génération de jeunes marocains qui ont fait leur formation cinématographique à Paris dans le prestigieux Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC), aujourd'hui disparu, au début des années 60. Après son retour au pays et l'intégration du Centre cinématographique marocain comme chef monteur, il a collaboré avec la revue Souffles dirigée par Abdellatif Laâbi. Son premier et unique long métrage, Mirage, réalisé au début des années 80 avec les moyens du bord, est considéré aujourd'hui comme un chef-d'œuvre de la filmographie marocaine. Ce sont précisément ces années 80 qui furent les plus propices dans la construction de l'œuvre artistique de Bouanani. Il montait les films des autres, souvent en les sauvant de leur trop plein de lenteurs, ciselait des poèmes, dessinait des BD pour la presse, écrivait beaucoup et publiait très peu. Cet homme-là avait quelque chose du douanier Rousseau. Il amassait des notes, troussait des manuscrits : roman, essais, contes qui étaient quasi prêts à la publication, mais se refusait à les éditer.
Seul Abdallah Stouky avait pu lui «arracher» les poèmes qui ont formé son beau recueil Les persiennes (Editions Stouky). Plus tard, ce n'est qu'après des semaines de discussions et moult tergiversations qu'il avait consenti à la publication de son premier roman L'Hôpital (Editions Al Kalam). Maintes fois, il avait tenté de retenir les épreuves d'imprimerie lors des corrections. Cette propension à la rétention n'avait d'égal que le trop plein d'écrit épars qu'il amassait dans son appartement de la rue d'Oujda dans le quartier Hassan à Rabat. Nous étions quelques-uns à connaître les trésors cachés dans un capharnaüm de livres, cassettes vidéo de films, revues littéraires, documents, manuscrits de livres ou de scénarii. Une œuvre inédite à été ravagée un jour par un incendie à la grande désolation des rares amis qui en avaient furtivement pris connaissance. Tel était Bouanani dans cette rétention qui confine à l'ascèse, aussi prolifique dans la création que rare, sinon réfractaire, dans la publication comme dans la démonstration. Réservé et mutique devant les inconnus, il pouvait cependant se montrer d'une grande et intelligente volubilité avec les amis chez qui il sent passer de mystérieuses affinités.
La culture littéraire et cinématographique de Bouanani est à la fois éclectique et savamment choisie. De plus, il était informé sur les choses du monde et de la culture avec une assiduité qui étonnait ceux qui le prenaient pour un de ces ermites coupés du réel. Il lisait régulièrement la presse et les revues culturelles, dont le Magazine littéraire, tout en revisitant les textes classiques, poésie et prose confondues. Il y a quelques années, il avait choisi de quitter la capitale pour un refuge dans la région de Demnate comme pour parachever son œuvre de silence.
«Pas de testament pour la mémoire muette», avait-il écrit dans un de ses poèmes. Le testament d'Ahmed Bouanani est dans notre mémoire et comme par le passé, à la faveur d'une rumeur amicale qui nous rapportait telle bonne nouvelle, tel poème, tel projet de film en cours, on dira avec le poète de la «Syntaxe de l'éclair», Saint-John Perse, qu'il adorait : «Mais de mon frère le poète on a eu des nouvelles. Il a écrit encore une chose très douce. Et quelques-uns en eurent connaissance».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.