Tour à tour prévisible, attendue, programmée, annoncée, la voici enfin consommée, la scission de la Confédération démocratique du travail (CDT). La naissance de la Fédération démocratique du travail (FDT), si elle a été laborieuse, n'a donc surpris personne tant elle a semblé “normale” et dans l'ordre “naturel” des choses. Et que croyait donc Noubir Amaoui ? Que l'USFP allait continuer à lui faire des fleurs, que Abderrahman Youssoufi et Mohamed Elyazghi lui pardonneraient un jour d'avoir, sur un coup de tête présomptueux, lancé une OPA tout à fait inamicale sur le grand parti socialiste qui avait longtemps couvé dans son sein la vipère traîtresse ? Qu'ils allaient oublier la grande peur que Amaoui leur fit en semant la zizanie, la discorde et le désarroi dans leurs rangs ? Qu'ils allaient passer par pertes et profits la défection de l'aile syndicale de l'USFP ? La vengeance est un plat qui se mange froid. L'épée de Damoclès est restée longtemps suspendue sur la tête du patron de la CDT. Aujourd'hui, elle est tombée et déjà Amaoui semble assommé. Mais le paysage syndical marocain “s'enrichit” d'une nouvelle centrale. Est-ce un bien, est-ce un mal ? Notre propos n'est pas là. Remarquons seulement que la création de la FDT n'a pas été des plus faciles. Les préparatifs en ont été longs et ardus. Défections successives des syndicats sectoriels, des unions régionales et locales, auxquelles ripostait Amaoui par des limogeages et des exclusions , création de commissions de “coordination” de “restructuration”, de “correction”. Tout y passa pour enfin aboutir à la tenue du congrès constitutif d'une nouvelle centrale démocratique – oui oui – et indépendante – foi d'Usfpéiste ! Soyons sérieux. A qui fera-t-on croire que la FDT sera une centrale réellement “indépendante” ? A personne, car tout le monde sait qu'à part l'Union marocaine du travail qui fait cavalier seul, tous les syndicats du Maroc sont inféodés à des partis politiques, qu'ils ne se remuent que sur ordre des “politiques”. C'est tellement vrai qu'Amaoui s'est créé son propre parti. Ainsi, au moins, le cordon ombilical avec la politique n'est pas rompu. Il était donc tout à fait “naturel” que le nouveau secrétaire général de la FDT, Tayeb Mounchid, fut un Usfpéiste, membre du Bureau politique du parti de surcroît. Ce que conteste Houcine Kafouni, vétéran de la guerre anti-Amaoui qui lui demande de se démettre de son mandat “politique” pour, au moins, sauver les apparences d'une indépendance syndicale qui ne résiste pas à l'examen. Au-delà des slogans creux, de l'étalage sonore des grands principes, au-delà des “procédures administratives”, il reste une chose sûre : l'USFP a désormais sa propre centrale ouvrière. La deuxième de son histoire après la CDT. Et chacun espère qu'elle ne sera pas aussi indocile que celle que s'est approprié Noubir Amaoui.