L'USFP rejeté par les électeurs, gèrera un nombre important de communes grâce à l'apport du PJD. Le parti de Bouabid s'est totalement renié. Juste après la raclée des législatives de 2007, Driss Lachgar, membre du bureau politique de l'USFP a proposé une alliance avec les Islamistes du PJD. L'ensemble des dirigeants de son parti, lui a répondu en chœur que cette alliance contre-nature n'était pas à l'ordre du jour. Il faut croire que ces dirigeants ont la mémoire courte car deux ans plus tard, ce sont les Islamistes qui permettent au parti de la rose de maquiller une défaite cinglante, un déni des électeurs en victoire. L'USFP va gérer un nombre important de communes, grâce non pas à la volonté des électeurs, mais à l'appui du PJD. Les Islamistes offrent réellement une dot importante, pour un mariage qu'ils savent, fatalement, en leur faveur. Ils ont imposé à leurs troupes une alliance qui ne tient pas compte des chiffres, parce que la mariée y laisse une virginité d'un demi-siècle de lutte. La fin du Tihad Le choix effectué par la direction de l'USFP est opportuniste tout simplement. Fathallah Oualalou s'est retrouvé Maire de Rabat alors que l'USFP a été stipendiée par les électeurs. Il doit sa réussite au PJD et au retrait de la candidature de Lahcen Daoudi. Partout, les Islamistes ont fait preuve d'une générosité hallucinante en faveur de l'USFP. Cela à l'allure d'une demande en mariage où le prince charmant se montre princier. Le Tihad y a succombé par opportunisme, mais surtout par manque d'alternative. L'alliance avec le PJD est contre-nature. Seulement c'est un constat biaisé, parce qu'il considère que l'USFP est un véritable parti de gauche. C'est faux parce que le Tihad est beaucoup plus complexe. C'est un ramassis qui a charrié, au nom des forces populaires, tous les «Refuznik» du Royaume. Rien, absolument rien, dans les références de ce parti n'en fait un parti social-démocrate,à part son adhésion à l'internationale socialiste. Sur tous les sujets de transformation sociale, ce parti est à la traîne. Son arrivée aux affaires a, de manière presque automatique, signifié son éloignement de la classe ouvrière, de la jeunesse, du mouvement des femmes, de la société qui vit, revendique, veut aller de l'avant. L'USFP est nu face aux mutations sociales, non pas parce que tel dirigeant ou tel autre a trahi, mais parce que ce conglomérat n'a jamais eu de projet sociétal de gauche. C'est le plus grand orphelin de Hassan II, parce qu'il s'est construit contre l'autoritarisme de celui-ci. Sinon comment interpréter la position de Fourkani, à l'époque membre du Bureau politique, concernant le plan d'intégration, celle d'Amaoui, ou l' acceptation par Oualalou de la mairie de Rabat, alors que les électeurs ont franchement désavoué son parti ? La gauche n'existe pas Le drame c'est que ce constat n'est que partie d'un constat d'ensemble. Le Maroc n'a pas secrété de gauche aux normes universelles. Le mouvement ouvrier Marocain n'a jamais eu d'expression indépendante. Le parti communiste et l' UMT ont été des tentatives d'expression autonome, sans plus. Le nationalisme petit-bourgeois a constitué une chape indépassable. La gauche marocaine n'existe pas. Il n'y a pas un seul courant laïc, franchement laïc, égalitaire, revendiquant l'émergence de l'individu, les libertés individuelles, mais aussi la structuration du champ public, sur la base de la primauté de la règle de droit positif, avec une vision solidaire des rapports. C'est cela et uniquement cela, être de gauche. Or, au nom de la spécificité, il n'y a pas un seul courant capable de revendiquer la laïcité, l'égalité des individus ou tout bêtement la protection des choix individuels quand ils ne touchent en rien la collectivité. Continuer à ignorer cette réalité, c'est condamner la transition marocaine, parce que justement elle ne peut aboutir à l'Etat de droit, à la démocratie, à la modernité, que si un véritable mouvement de gauche, plaidant pour la liberté individuelle, la responsabilité collective, l'autonomie des sphères, émerge et s'impose. Tout est à refaire La mésalliance USFP-PJD, doit beaucoup au PAM. Des considérations politiciennes «justifient» pour nombre d'observateurs ce viol consenti. C'est une alliance qui marquera la transition parce qu'elle n'est pas occasionnelle. Elle répond à deux obsessions, celle d'une dizaine de dirigeants du Tihad qui sont prêts à baiser la main de Netanyahu pour garder leurs postes, leurs villas, le train de vie de leurs Rbaties de femmes. Plus sérieusement ce sont des gens qui ne peuvent plus imaginer la politique hors du sérail. De manière naïve, qui peut les rendre sympathiques, ils disent en chœur «qu'est-ce qu'on va faire dans l'opposition». Ils justifient tous l'alliance avec le PJD par un simple fait, avéré il est vrai, que dans les communes, l'opposition n'a pas d'existence. L'autre obsession, celle du PJD est la normalisation. En 2003 les islamistes, ostracisés à l'époque par l'USFP, se sont alliés à tout ce qui se présentait. Cette fois, ils s'allient à un Tihad à genoux. La boucle est bouclée, même Fouad Ali El Himma s'est allié à eux à Marrakech. Le PJD n'est plus qu'un parti parmi 36 autres. Cette perversion marocaine met le point final à une période de la transition. Si l'on veut que celle-ci aboutisse, on sait ce qu'il faut faire : créer un pôle de gauche véritable. Sinon, le bloc historique, le couple maudit, nous ramènera vers l'autoritarisme. n