La guéguerre se poursuit entre les ministères de l'Enseignement supérieur et la Santé, d'une part, et les étudiants en médecine (générale, dentaire, pharmacie), d'autre part, et qui ont boycotté les examens de S2 comme annoncé auparavant. Un boycott réussi à 100% au niveau national, qui a donné suite à la suspension de trois professeurs universitaires à Casablanca, Marrakech et Agadir, par le ministère de l'Enseignement supérieur ainsi que la « pression exercée » sur quelques parents d'étudiants dans le but d'inciter leurs enfants à regagner leurs classes et passer leurs examens. Le spectre de «l'année blanche» est donc confirmé. Les détails. Les professeurs universitaires des facultés de médecine du Maroc ainsi que les parents des futurs médecins, ont montré un soutien «indéfectible» au mouvement mené par les étudiants en médecine du public depuis déjà 10 semaines, qui boycottent les cours magistraux, TP et TD, stages hospitaliers et examens de S2. En effet, plusieurs professeurs ont annoncé le boycott de la surveillance des examens de médecine, qui ont démarré lundi 10 juin, comme signe de soutien au mouvement de leurs étudiants. D'ailleurs, les professeurs de la faculté de médecine et de Pharmacie de Casablanca ont carrément annoncé dans un communiqué le boycott de la surveillance des examens de S2, invitant les deux ministères de tutelle à reporter ces examens jusqu'à l'apaisement de cette crise. Mais en vain ! Le département de Said Amzazi a réagi en faisant tout à fait le contraire. En effet, ce dernier a procédé à la suspension de trois professeurs universitaires en médecine à Casablanca, Marrakech et Agadir, mercredi 12 juin, « à geler leurs salaires (hors allocations familiales) et à les déférer devant le conseil disciplinaire» pour « leur soutien au mouvement des étudiants sous prétexte qu'ils les incitent à boycotter » a expliqué à Hespress Fr Hamza Karmane, membre de la Coordination nationale des étudiants en médecine (CNEM)- section Rabat -. Il s'agit de Said Amal (Marrakech), Ismail Ramouz (Agadir) et Ahmed Belhouss (Casablanca). « Ces professeurs sont connus pour leur soutien indéfectible à la cause des étudiants en médecine que ce soit en 2015 ou 2019. Ils n'ont jamais mâché leurs mots ou caché leur soutien. Le ministère voulait donner l'exemple à travers ces trois profs ». « Honnêtement, les professeurs n'ont jamais cherché à augmenter la tension où à nous inciter à boycotter ou à faire des grèves. Au contraire, ils nous ont toujours dire d'être raisonnables, logiques et modérés dans notre mouvement et ils ne nous ont jamais incités au boycott. Jamais !», a tranché Hamza. Les parents d'étudiants en médecine menacés par des Mokadems Ce qui a mis en colère encore plus les futurs médecins, mise à part la suspension de leurs professeurs, c'est la « nouvelle démarche » entreprise par les « Mokadems » qui ont menacé plusieurs parents d'étudiants en médecine, un peu partout au Maroc, dans le but de les pousser à obliger leurs enfants à passer leurs examens et mettre fin au boycott, affirme Hamza à Hespress Fr. Selon ce membre de la CNEM, plusieurs parents d'étudiants en médecine à Fès, Tanger, Agadir, Ksar Sghir ainsi que plusieurs autres villes du Royaume, ont été « invités » par les Mokadems à se rendre à une réunion de parents d'élèves. Lors de cette réunion, « les Mokadems ont tenu un discours menaçant cherchant ainsi à leur faire peur pour qu'ils obligent leurs enfants à regagner leurs classes et passer leurs examens, sinon ils vont gérer la situation de manière très sévère », souligne notre source avant d'ajouter « qu'une étudiante en médecine générale à Fès, raconte que son père est rentré à la maison terrifiée après cette réunion». Pour Hamza, «tout ce qui se passe actuellement à savoir la suspension des professeurs par le ministère de l'Enseignement supérieur et la menace des parents ne fait que renforcer la volonté des futurs médecins à se battre encore plus pour leur cause et ne pas lâcher l'affaire» . « On sent qu'on cherche à briser ce mouvement à tout prix. Les deux ministères de tutelle n'ont pas cherché à nous recontacter, ni à ouvrir un autre dialogue, ni à négocier. Ils se basent sur la réunion du 12 mai, que les deux ministères n'ont pas respectée d'ailleurs ni tenu leurs engagements, tous cela pour détruire notre mouvement. Les points qu'ils ont dit avoir accordé aux étudiants, ils n'ont pas tous été accordés, et les deux points qui sont d'une importance capitale pour les étudiants en médecine, à savoir le concours de résidanat et la suppression de l'examen national de qualification, ils ne veulent pas nous les accorder. On sent clairement qu'il y a un favoritisme pour les facultés privées par rapport au public. Nos facultés perdent leurs ressources, le manque de professeurs, manque de moyens, etc…», a conclu cette étudiant en médecine à Hespress Fr. Les enseignants en médecine réagissent à la suspension de leurs confrères Après la suspension des trois professeurs en médecine, le syndicat national de l'enseignement supérieur n'a pas tardé à réagir. En effet, le bureau local du syndicat à Marrakech a exprimé sa « surprise » quand à la suspension « autocratique du professeur Said Amal, sans aucune base ni administratif, ni juridique », peut-on lire dans la note du mercredi 12 juin. A cet effet, une réunion d'urgence a eu lieu mercredi 12 juin durant laquelle l'ensemble des professeurs de la faculté de médecine et de Pharmacie de Marrakech ont exprimé leur «soutien inconditionnel au professeur Said Amal, qui est l'exemple même du professeur discipliné qui s'engage dans les affaires importantes qui concernent l'institution, à savoir la formation et la supervision des activités pédagogiques au sein de la faculté et sa participation active à la plupart des activités», souligne le bureau local du syndicat. Les professeurs ainsi que les membres de la commission scientifiques et le conseil de la faculté de médecine et de pharmacie de Marrakech, ont pareillement rappelé dans leur note que «la position du professeur Said Amal se caractérise par la dignité, l'objectivité et la positivité » soulignant que « ses positions dans la gestion de la crise des étudiants ont toujours étaient neutre » Dans ce sens, les professeurs à la faculté de médecine et de Pharmacie de Marrakech demandent au ministre de l'Enseignement supérieur, Said Amzazi, de retirer cette décision de suspension à son encontre, en le mettant devant la gravité de la situation. En attendant le retrait de la décision de suspension à l'encontre du professeur Said Amal, l'Assemblée générale de la faculté de médecine et de Pharmacie de Marrakech a décidé de « boycotter toutes les activités pédagogiques et administratives au sein de la faculté, incluant ainsi les examens de S2, les concours de spécialités, les discussions de thèses ... ». Les activités hospitalières seront également suspendues par les professeurs de la faculté de Marrakech jusqu'à nouvel ordre, souligne la note du bureau local du syndicat. Selon une source de Hespress Fr, les enseignants de la faculté de médecine de Casablanca vont suivre la démarche des enseignants de Marrakech et compte également boycotter toutes les activités pédagogiques et hospitalières jusqu'a la résolution de cette crise des futurs médecins qui a pris une très grande ampleur au niveau national.