Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a déploré dimanche que « la France ait eu aussi peu de réaction » pour obtenir de l'Algérie la libération de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré depuis la mi-novembre. Plaidant de nouveau, lors du Grand Rendez-vous Europe 1/CNews/Les Echos, pour la mise en place d'un « rapport de force » avec l'Algérie, Bruno Retailleau s'est exclamé: « Je n'en peux plus car cela n'avance pas ». « On ne peut pas se dire le pays représentant des droits de l'homme et laisser faire. C'est insupportable », a-t-il ajouté. Boualem Sansal est poursuivi en vertu d'un article du code pénal algérien qui sanctionne « comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions ». Sans citer le Quai d'Orsay, Bruno Retailleau a remis en cause la stratégie actuelle consistant à œuvrer discrètement au nom de l'adage « plus on est discret, plus on obtient des résultats ». Depuis trois mois « la discrétion n'a pas payé », a-t-il relevé. « Je déplore que la France ait eu aussi peu de réaction (...). Je suis la bête noire (en Algérie), ma tête est mise à prix en Une de journaux (pro-pouvoir algérien). Qui m'a défendu ? Jean-Pierre Chevènement », a-t-il noté. Retailleau, qui est un ami de l'écrivain « âgé et malade », a fait valoir qu'il fallait « défendre Boualem comme une cause humanitaire ». « On doit transformer fondamentalement notre relation avec l'Algérie (...), il faut poser un rapport de force », a-t-il dit, en réclamant de nouveau la remise en cause de l'accord de 1968 (sur les conditions d'accueil des ressortissants algériens en France), le rétablissement des visas pour les diplomates algériens. Proposant de « sortir » du face-à-face France/Algérie, Bruno Retailleau a « souhaité » que les chefs d'État européens ne signent pas un accord avec l'Algérie, actuellement en cours de discussion, « tant que Boualem Sansal ne sera pas libéré ». L'Algérie a réclamé fin janvier une révision de son accord d'association avec l'UE afin qu'il repose sur le « principe du gagnant-gagnant ». En juin dernier, Bruxelles avait annoncé avoir ouvert une procédure de règlement des différends à l'encontre de l'Algérie, accusée de restreindre depuis 2021 les exportations et investissements de l'UE dans ce pays nord-africain.