Le retour de Donald Trump à la Maison blanche préoccupe les Espagnols. Les voisins ibériques redoutent que le 47e président des Etats-Unis ne décrète le transfert vers le Maroc d'environ 3.000 soldats et des navires installés à la base de Rota. Le président Donald Trump envisage-t-il de transférer les troupes américaines stationnées depuis 1953 à la base navale de Rota, en Espagne, vers le Maroc ? Cette question, qui avait déjà émergé il y a quelques années, refait surface aujourd'hui. Les relations tendues entre le locataire de la Maison-Blanche et ses alliés de l'OTAN ont ravivé les inquiétudes espagnoles datant de 2020, comme le rapporte le Financial Times. L'insistance de Trump pour que l'Europe finance davantage sa propre défense alimente les craintes que Washington réduise sa présence militaire historique sur le Vieux Continent. Les rumeurs d'un éventuel retrait des troupes américaines de Rota remontent à juillet 2020, durant le premier mandat de Trump. «Rota a été établie suite à un accord de 1953 entre le président américain Dwight Eisenhower et le dictateur Francisco Franco», rappelle le journal. Cette présence a contribué à redorer l'image de Franco en Europe, ternie par son alliance avec Hitler et Mussolini dans les années 1930. La base navale abrite 2 800 soldats américains et cinq destroyers, et est considérée comme l'une des plus grandes installations d'armement et de carburant en Europe. Dotée d'un aérodrome et de trois jetées, elle est stratégiquement située près du détroit de Gibraltar, ce qui en fait un point clé pour projeter la puissance militaire en Méditerranée, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, souligne le Financial Times. Le Maroc, une alternative ? Outre les considérations budgétaires, des facteurs politiques pourraient inciter le président Trump à quitter Rota. «L'amitié de Pedro Sanchez avec la Chine constitue une source majeure de tensions» entre Madrid et l'administration Trump. Le Premier ministre espagnol a appelé Washington et Pékin à «dialoguer» sur la guerre commerciale lors de sa visite à Pékin la semaine dernière. Sanchez critique également l'offensive israélienne à Gaza, note le Financial Times. Ces éléments budgétaires et politiques pourraient-ils profiter au Maroc ? «Un seul pays non européen pourrait offrir aux Etats-Unis des sites tout aussi intéressants de l'autre côté de la Méditerranée : le Maroc. Le royaume a renforcé son statut d'allié de Trump en 2020 en normalisant ses relations avec Israël», a déclaré Michael Walsh, ancien responsable de campagne de Joe Biden, au Financial Times. «Aux yeux de l'administration Trump, il y aurait beaucoup moins de risques à installer des bases militaires américaines au Maroc qu'en Espagne», a-t-il ajouté. Pour rappel, en juillet 2020, un média ibérique a avancé que Rabat aurait proposé aux Etats-Unis d'accueillir une partie de leurs navires de guerre à la base navale de Ksar Sghir. Un éventuel transfert des soldats américains de Rota ou Moron avait déjà été envisagé en 2005 par le président George W. Bush, selon l'ancien ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel García-Margallo (2011 - 2016), qui l'a révélé dans son livre : «Mémoires non-conformistes d'un politique de l'extrême centre». Washington avait envisagé cette mesure en réaction à la décision de José Luis Rodriguez Zapatero, alors chef du gouvernement espagnol, de retirer les troupes espagnoles d'Irak dès son arrivée au pouvoir le 17 avril 2004, sans en informer au préalable les Etats-Unis. Ces troupes avaient été envoyées un an plus tôt par son prédécesseur, José Maria Aznar, dans le cadre de son «alliance sacrée» avec George W. Bush. Aujourd'hui, un autre socialiste dirige le gouvernement espagnol. Les troupes américaines et leurs familles installées à Rota contribuent à hauteur de 600 millions d'euros par an à l'économie de la région de Cadix. Ce montant n'inclut pas les coûts de réparation des navires de guerre américains stationnés à Rota, pris en charge par la société publique Navantia. Dans le contexte du conflit israélien à Gaza, une base américaine au Maroc pourrait devenir un point de ralliement pour les associations de soutien à la Palestine.