29.412 mineurs marocains ont été poursuivis dans des affaires judiciaires en 2022, a révélé le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi, précisant que le nombre d'affaires impliquant des mineurs s'est élevé à 24.592 cas au cours de la même année. Cette tendance haussière par rapport aux années précédences semble se poursuivre en 2023 puisque que le nombre de mineurs poursuivi en état de détention jusqu'à fin mai s'élève à 355 jeunes détenus, selon les révélations du ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi. Ces données exposées par le ministre lors des assises nationales sur « la protection des enfants en contact avec la loi », organisées à Skhirat durant la période du 19 au 21 juin, donnent des sueurs froides et interrogent à plus d'un titre sur les raisons qui font que des mineurs, supposés fréuentés l'école, ont des démêlés avec la justice. Si l'on compare ces derniers chiffres avec les derniers en date, on s'apercevra que le phénomène de la délinquance juvénile ne fait que s'aggraver au Maroc. En effet, le nombre des délinquants mineurs est en hausse de 8,93% par rapport à 2019 (27.000, selon les chiffres du ministère public). Une évolution qui pose le dilemme de conciliation entre le droit de la société à la lutte contre la criminalité, et le droit de l'enfant délinquant à la protection et au traitement différencié. La justice marocaine des mineurs est confrontée à un double objectif : protéger l'enfant et sa mission de défense de la société et d'appliquer des sanctions quel que soit l'âge du coupable. Alors qu'il fixe comme objectif de sauver l'enfant qui a commis une infraction et le protéger de la déviation, le code de la procédure pénale prévoit également des sanctions qui vont à l'encontre de cet objectif. Lire aussi: Travail des mineurs au Maroc: 127.000 enfants exploités dans une activité économique en 2022 Sauf que les études et les recherches scientifiques prouvent, statistiques à l'appui que plus le premier contact avec la répression est précose, plus les chances d'enracinement dans la délinquance sont multiples. « Si nous prenons à titre d'exemple deux enfants qui ont commis le même délit à l'âge de 13-14 ans, dont l'un échappe à une mesure répressive et l'autre est détenu pour un temps plus ou moins long, le premier a statistiquement plus de chances de se « ranger » et de devenir un citoyen respectable et respecté à 30 ans, tandis que l'autre sera marqué psychologiquement et socialement par son passé d'individu fiché et « connu du service ». La délinquance précoce peut découler de l'échec scolaire en raison des arrêts d'étude et de l'oisiveté qui en résulte. Des milliers d'élèves se trouvent, chaque année, mis à la porte des lycées et collèges, voire des écoles primaires (Raoudi, 2003) », écrivent les chercheurs et professeurs à l'Université Mohammed V, Najat Bassou et Abdellatif Kidai dans un article scientifique intitulé «Délinquance juvénile et justice des mineurs au Maroc : l'écart entre la loi et son application».