La flambée des prix semble s'installer dans la durée. Partout, l'inflation pèse lourdement sur l'économie mondiale et nourrit les craintes d'une récession. Au Maroc, où l'indice des prix à la consommation a augmenté de 5,9% en avril 2022 sur un an, remplir son caddie revient de plus en plus cher. Dans cet entretien, Dr. Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC), revient sur l'inflation et son impact sur la consommation. À l'heure de la rentrée, le budget des familles est mis à rude épreuve entre fournitures scolaires et dépenses ordinaires. «La flambée des prix a touché toutes les économies du monde. Ce qui diffère d'un pays à l'autre, c'est son impact sur le pouvoir d'achat du citoyen et les mesures prises par les gouvernements pour contrecarrer ces hausses», explique Dr. Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC).
Des produits disponibles mais chers Si plusieurs pays font face au risque de pénurie de certains produits alimentaires ou craignent des crises énergétiques, le Maroc semble pour l'instant épargné. «Le royaume dispose d'une bonne gestion de ses stocks de sécurité, surtout en termes d'énergies et de produits alimentaires. Preuve à l'appui : lorsque la pénurie de l'huile de table a touché plusieurs pays de l'Europe, le Maroc y a échappé. Le seul hic : les prix ont augmenté à cause de plusieurs facteurs connus de tous », poursuit Dr. Bouazza Kherrati. En effet, les taux d'inflation enregistrés ne sont pas les mêmes dans tous les pays. Ils ont dépassé les 7% aux Etats-Unis et au Canada, plus de 5% en France et au Maroc. Une flambée engendrée par la hausse des prix des matières premières, dont une grande partie est importée. « La flambée des prix au Maroc a pour origine des facteurs structurels qui existaient avant la pandémie. Puis, il y a eu la guerre en Ukraine conjuguée d'autres facteurs conjoncturels», poursuit Dr. Kherrati. Lire aussi. Micro-trottoir. Rentrée scolaire: les parents agacés par la flambée des prix D'après le Haut-Commissariat au plan (HCP), cette augmentation est le résultat de la hausse de 0,1% de l'indice des produits alimentaires et de 0,8% de l'indice des produits non alimentaires. «Comparé au même mois de l'année précédente, l'indice des prix à la consommation a enregistré une hausse de 7,2% au cours du mois de juin 2022, conséquence de la hausse de l'indice des produits alimentaires de 10,6% et de celui des produits non alimentaires de 4,9%», précise le HCP. « Certes, de nombreux internautes expriment leur mécontentement sur les réseaux sociaux en mentionnant des hashtags. Mais ils ne s'arrêtent pas de consommer. Malgré des prix élevés, l'offre fait face à une demande de plus en plus importante. Les restaurants, cafés et plages ont été bondés cet été. Les rayons sont vidés. Tout a l'air de bien fonctionner», estime le président de la FMDC. «Sans les citoyens, la FMDC ne peut rien changer» La flambée des prix a commencé en 2020, lorsque la demande stimulée par les plans de relance post-Covid des gouvernements s'est déportée sur les biens, au détriment des services. Entre temps, des usines fermaient en raison des restrictions sanitaires, désorganisant les chaînes d'approvisionnement. La tendance s'est poursuivie avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie, deux pays qui assurent une part importante des exportations mondiales de produits agricoles et d'énergie. Lire aussi. Flambée des prix de volaille: les professionnels s'expliquent Conséquence : un rebond brutal des prix des matières premières au cours du mois de mars dernier. Le baril de Brent par exemple, qui se négociait à 110 dollars le 3 mars 2022, a atteint 130 dollars le 8 mars 2022 avant de retomber en dessous de la barre des 100 dollars, mardi 15 mars 2022, soit une variation de près de -23% entre ces deux dernières dates, apprend-on du dernier rapport du Conseil de la concurrence. Ainsi, et au plan mondial, les prix des matières premières énergétiques ont augmenté de près de 74% entre janvier 2021 et janvier 2022, d'environ 14,5% pour les produits alimentaires et plus de 33% pour les métaux sur cette période. «Chaque fois qu'on voit les chiffres du HCP ou de Bank Al-Maghrib, on se pose des questions. Est-ce que ces chiffres reflètent la réalité ? Parce qu'on nous impose des critères qui ne s'adaptent pas aux conditions marocaines», affirme Dr. Kherrati.