Si l'augmentation des prix des produits de première nécessité est liée à l'évolution des cours mondiaux, celle des marges bénéficiaires est, quant à elle, qualifiée d'abusive par la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC). Avec une augmentation de l'ordre de 2,2%, la hausse de l'indice des prix à la consommation (IPC), publié par le Haut-commissariat au plan (HCP), en juillet 2021, a déjà donné un avant-goût de la flambée de certains produits alimentaires sur les étals des marchés marocains. Huile de table, pain à base de blé dur, semoule, café, riz et thé… L'envol des prix de plusieurs articles s'est fortement accéléré récemment, affectant le budget des foyers marocains, selon la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC) et la Fédération nationale des associations du consommateur (FNAC). Résultat : le pouvoir d'achat, notamment celui des couches sociales les plus défavorisées, s'en est trouvé gravement affecté. Autant de facteurs qui risquent d'alimenter la gronde sociale, surtout dans un contexte marqué par les effets de la crise sanitaire et l'attente de la formation du prochain gouvernement. Aujourd'hui, bien que ces hausses ne soient pas critiquées en elles-mêmes par lesdites fédérations, en vertu de l'application de la loi de l'offre et la demande, ces entités ne manquent pas de relever le timing de son application. Elles pointent du doigt, également, l'importance des marges bénéficiaires des commerçants, avec des «ententes probables», préjudiciables à une concurrence loyale. Des hausses injustifiées ? La tendance actuelle fait craindre une augmentation des prix d'autres produits. Alors qu'à l'exception de l'huile de table, les autres articles n'ont aucune raison objective de se voir appliquer des hausses, surtout avec les marges actuellement pratiquées», explique Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC). Ceci est valable, notamment, pour la semoule et la farine de blé dur. «Les augmentations sont excessives, même si la hausse des prix des matières premières à l'international est un fait», affirme Bouazza Kherrati. En comparaison avec les pays voisins, «on constate des augmentations excessives par rapport à l'application de la loi afférente à la liberté des prix et de la concurrence», ajoute-t-il. Autre constat relevé par la FMDC : la hausse des prix est accompagnée d'une baisse de la qualité des produits ainsi que de la diminution de leurs poids, ce qui dénote de la malhonnêteté qui caractérise les pratiques commerciales adoptées, surtout pour la typologie des produits thé et café. Sur ce dernier point, la FMDC rappelle que le marché du café au Maroc manque de contrôle et nécessite l'adoption de normes, à l'instar de ce qui a été fait pour le secteur du thé, avec la mise en place, par l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires ( ONSSA), de règles strictes régissant son importation. «Cette anarchie est essentiellement due à l'absence, depuis 2010, du service de la répression des fraudes», précise Bouazza Kherrati. Selon lui, à l'exception de quelques marques, certaines pratiques sont à déplorer, telles que l'importation de déchets de café ou sa torréfaction à maintes reprises. Le prix des matières premières n'arrange pas la situation Il va sans dire que, depuis le déclenchement de la pandémie, les prix de certaines matières premières ont flambé, notamment en raison de la pression mondiale sur la production de blé dur. Sont concernés, essentiellement, le pain à base de blé dur, la semoule et les pâtes. En cause, notamment, les mauvaises récoltes dues aux conditions climatiques au Canada, l'un des principaux producteurs de céréales et graines oléagineuses, ou les pluies diluviennes qui ont endommagé les moissons de blé en Europe, en 2021. De ce fait, et avec des stocks mondiaux à des niveaux historiquement bas, le marché international de blé dur est soumis à de fortes pressions, poussant vers une augmentation sensible des cours. Pour l'huile de table, le marché national, entièrement libéralisé, est fortement dépendant des grands producteurs internationaux de soja et de tournesol. Le Maroc importe, en effet, la quasi-totalité de ses besoins en la matière sous forme d'huiles brutes ou de graines à triturer. Ce qui l'expose fortement à l'évolution des cours mondiaux, en hausse actuellement, à la bourse de Chicago. Le cours mondial du café Arabica souffre, par ailleurs, des mauvaises récoltes au Brésil. À cela s'ajoutent la hausse des coûts logistiques et de l'énergie, en plus du retard de livraison de certaines matières premières. Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO