Le nouvel actionnaire, AIG African Infrastructure Fund LLC, injecte 100 MDH dans la société et s'offre 36,6% du capital de Charaf par le biais d'une augmentation de capital qui lui est entièrement réservée. Cette opération permettra à Charaf de financer son programme d'investissement et de se désendetter. Après une sortie à succès sur le marché, il y a deux ans dans le cadre d'une émission de billets de trésorerie, Charaf Corporation, l'un des leaders marocains du marché des engrais au Maroc, remet ça. A travers une opération d'augmentation de capital orchestrée par la banque d'affaires Financia, Charaf a en effet réussi à attirer dans son tour de table AIG African Infrastructure Fund LLC, un fonds d'investissement spécialisé en investissements dans les infrastructures et industries connexes en Afrique. Concrètement, le nouvel actionnaire apporte de l'argent «frais» pour un montant de 100 MDH et s'octroie 36,6% du capital de Charaf par le biais d'une augmentation de capital qui lui est entièrement réservée. Comme expliqué, pour cette transaction, 144.000 actions nouvelles, au nominal de 100, ont été émises avec une prime d'émission de 594,44 DH, ce qui valorise la société à 275 MDH après augmentation de capital. Le capital social proprement dit n'augmente que de 14,4 MDH (144.000 actions au nominal de 100 DH), passant de 25,2 à 39,6 MDH. Les fonds propres s'inscrivent, quant à eux, en hausse du montant de l'opération, soit 100 MDH et atteignent une post-augmentation du capital de 126,5 MDH. Il est à signaler par ailleurs que AIG African Infrastructure Fund LLC ne s'impliquera pas dans la gestion de Charaf, mais disposera d'un droit de regard d'autant que deux de ses représentants siègeront au sein du Conseil d'administration. Grâce à cette opération, Charaf va pouvoir assurer aisément son ambitieux programme de développement. Ainsi, les 100 MDH récoltés permettront de financer un programme d'investissement d'un montant de 55 MDH qui s'étale sur une période qui ne devrait pas dépasser les 2 ans et de se désendetter à hauteur de 45 MDH, afin de réequilibrer son ratio fonds propres/dettes et abaisser le niveau de ses frais financiers. Cette démarche s'inscrit dans le droit fil de la stratégie arrêtée depuis 1997-1998; période durant laquelle un ambitieux programme d'investissement avait été défini, visant notamment à doter la société de plates-formes logistiques et d'aires de stockage dans les principales régions agricoles et les principaux ports du pays. Aussi, ces 55 MDH soutiendront l'action déjà initiée entre 1998 et 2002 où 50 MDH ont été débloqués pour l'acquisition des terrains de Jorf Lasfar, Kénitra, Agadir et Nador, ainsi que la construction et l'aménagement des deux premiers sites. Ils serviront à l'amélioration des capacités logistiques des plate-formes Jorf Lasfar, Kénitra, Agadir et Nador; l'acquisition et l'aménagement de quatre nouveaux sites; et au renforcement des capacités de fabrication et de conditionnement. A l'évidence, Charaf ambitionne de jouer dans le secteur des engrais un rôle autrement plus important que celui que lui confère ses 20% de parts de marché derrière Fertima (50%) et booster davantage son chiffre d'affaires de 303 MDH en 2002 (contre 6 MDH en 2001). Au regard de la faiblesse de la consommation d'engrais au Maroc par rapport aux autres pays de la région, cette ambition semble justifiée. Il ressort ainsi des statistiques du ministère de l'Agriculture que la consommation nationale d'engrais s'est élevée à 954.000 tonnes pour la campagne 2001-2002; ce qui ne représente que le tiers des besoins réels du pays. Actuellement, le potentiel de consommation est estimé à 2,5 millions de tonnes. Amine Kandil, directeur général de Charaf, ne dit pas autre chose lorsqu'il affirme que «notre potentiel de développement est important; la consommation d'engrais est encore faible au Maroc». Stratégie de développement Pour tirer plein profit de ce secteur, Charaf a développé une stratégie bien à elle consistant à se départir de la pratique usuelle basée sur l'offre d'engrais génériques. «Nous devons développer le marché et produire des engrais plus adaptés à nos régions. A ce titre, nous servons des engrais adaptés à chaque culture et à chaque sol», précise Amine Kandil. Dans cette optique, Charaf a procédé depuis 1996 /1997 à un recentrage stratégique des engrais; ce qui a contribué à dynamiser le marché qui a enregistré une progression annuelle de la moyenne de 10%, alors que durant la période allant de 1985/1986 à 1996/1997, la consommation nationale d'engrais était en stagnation. Par conséquent, Charaf fait surtout dans les engrais à forte valeur ajoutée, résultats du travail du département Recherche& Développement. Le développement commercial de la nouvelle niche «engrais solubles» rentre d'ailleurs dans cette logique et devrait permettre de faire face à la rareté des ressources en eau. L'organisation mise en place soutient également Charaf dans son approche pour le développement du secteur. Outre une présence à travers tout le Royaume, Charaf a ainsi privilégié la mise en place d'une logistique souple et flexible. «Nous n'avons pas privilégié les usines de conditionnement fixe. La plupart d'entre elles sont mobiles. Lorsqu'un bateau d'engrais arrive dans un port, nous y acheminons une ou plusieurs unités de conditionnement, l'arrimons au bateau et conditionnons immédiatement les engrais que nous répartissons ensuite dans nos dépôts régionaux», explique Amine Kandil. Il demeure évident que les ambitions et objectifs de cette société familiale (famille Kandil), créée en 1989 et qui a su s'imposer dans son secteur d'activité, sont bien circonscrits. L'organisation en place, les efforts dans la R & D, les compétences humaines dont elle dispose, sa stratégie de partenariat (OCP, Grande Paroisse, Europe Sols...) et surtout la confiance dont elle jouit auprès des investisseurs institutionnels sont autant d'atouts qui devraient lui permettre d'atteindre ses objectifs. Et ce, d'autant plus que d'autres projets, bien tenus au secret par Amine Kandil, sont d'emblée en gestation. D. W. Encadré 1 Nature de l'opération : Augmentation de capital par apport en numéraire Montant de l'opération : 99.999.360 dirhams Souscripteur : AIG Africain Infrastructure Fund LLC Nombre d'actions émises : 144.000 Prix d'émission : 694,44 dirhams par action Nominal : 100 dirhams par action Prime d'émission : 594,44 dirhams par action Augmentation de capital : 14.400.000 dirhams Prime d'émission : 85.599.360 dirhams Capital après émission : 39.600.000 dirhams Fonds propres après émission : 126.523.000 dirhams Part du capital détenu par le nouvel actionnaire : 36,36% Encadré 2 AIG African Infrastructure Fund LLC (AAIF) « AIG African Infrastructure Fund LLC » a été créée en avril 2000 avec pour sponsor AIG (The American International Group) pour investir dans les infrastructures et industries connexes en Afrique. Le fonds se propose d'investir autant dans les jeunes entreprises à fort potentiel que dans les entreprises bien établies qui cherchent un relais de croissance. Le Fonds dispose d'un capital d'environ 405 millions de dollars. Outre The American International Group, le fonds regroupe des investisseurs comme : - La Banque Africaine de Développement, - La Société Financière Internationale (SFI), filiale de la Banque Mondiale, - El Paso Energy Corporation, - La « Banque de Développement de l'Afrique Australe (DBSA) » - La Banque Européenne d'Investissement (BEI). - La Proparco, filiale de l'Agence Française de Développement. La AAIF est géré par Emerging Markets Partnership (EMP), un des leaders mondiaux en matière de gestion de fonds d'investissements dédiés au financement des infrastructures (secteurs privés) dans les marchés émergeants, dont le siège social se trouve à Washington DC. L'équipe en charge de la gestion opérationnelle du AAIF au sein d'EMP, se répartit entre le siège de Washington et les bureaux régionaux de Johannesburg (Afrique du Sud) et d'Abidjan (Côte d'Ivoire). EMP est le conseiller principal de six fonds d'investissement totalisant plus de 5 milliards de dollars de ressources dédiées à l'Asie, l'Amérique latine, l'Europe de l'Est et l'Afrique et le Moyen-Orient. Le AAIF intervient dans les principaux domaines des infrastructures comme les télécommunications, les ressources naturelles, les transports, l'énergie, l'eau, l'assainissement, l'environnement, l'agro-industrie, etc. Données financières (en KDH) Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Excédent brut d'exploitation Résultat d'exploitation Résultat après-impôt 1998 81.785 4.276 -843 3.350 527 1999 138.837 9.903 3.557 6.490 2.131 2000 176.415 18.904 8.506 9.636 3.837 2001 207.081 27.096 15.395 16.062 4.020 2002 303.360 33.055 17.971 20.332 4.449