* Le taux de créances en souffrance est passé de 2% en 2007 à 5% en 2008. * Les associations de micro-crédit ne peuvent supporter le poids des provisions. * Un changement de leur statut, leur permettant de recourir aux mécanismes de refinancement, simpose plus que jamais. En dix ans dexistence, le secteur du micro-crédit au Maroc a réussi à se forger une place de leader dans la zone Mena. Avec plus de 5 millions de pauvres, le pays constitue un terrain fertile pour le développement de ce mode de financement à caractère social. En attestent les statistiques internationales : 4 de nos associations locales figurent dans le top 100 mondial. Cependant, ce succès aussi appréciable soit-il, ne pouvait se faire sans engendrer de risques. Les derniers mois ont mené à la constatation que cette euphorie connue jusque-là imposait une grande vigilance aux organismes opérant dans le secteur. Avec un taux de créances non recouvrées passant de 2% en 2007 à 5% lors de lannée écoulée. Ceci résulte, selon des professionnels, du surendettement de clients en raison de la prolifération des endettements croisés, mais aussi dun manque dadaptabilité des produits proposés qui naurait pas accompagné le développement du secteur. Autre mal constaté : le manque de solidarité entre les différentes associations. Les réflexions sont donc en cours pour mettre en place un code déontologique entre confrères pour régir la profession. 2009, un tournant décisif Mais 2009 serait un tournant décisif pour le micro-crédit au Maroc. La dernière réunion du Conseil consultatif du secteur, laquelle sest tenue le 25 décembre dernier, a vu le ministre des Finances, Salahdine Mezouar, inviter les professionnels à analyser les facteurs pouvant entraver leur bonne marche. Il a donc été décidé dappliquer de nouvelles mesures par rapport au provisionnement de ces impayés. Celles-ci consistent en la constatation de provisions de 50% pour les impayés au-delà de 30 jours, et de 100% au-delà de 180. Toutefois, le problème qui se pose est que les AMC devront allouer des fonds propres comme pour les banques et institutions financières, pour couvrir le risque lié à ces crédits impayés. Chose pas très évidente au vu de la non-capitalisation de ces ONG, rappelons-le, à but non lucratif. De là, un changement de statut de ces organismes dans le futur paraît inéluctable afin de leur permettre de se refinancer à travers les participations dans le capital ou même de le faire sur les marchés de la dette. Cette dernière thèse est dautant plus encouragée par la nécessité de disposer dun statut dinstitution financière pour que la Banque centrale impose ses règles prudentielles «protégeant ainsi largent du public», à linstar des banques. En attente de cette réforme tant souhaitée par certains, les AMC continueront à se financer à travers les subventions et les prêts, et risquent de ne pas pouvoir, à terme, faire face à ces provisionnements. En outre, BAM prévoit de mettre en place une Centrale des risques, en collaboration avec des experts de renommée internationale, incluant une liste de la clientèle des associations de micro-crédit pour gérer le risque de non-solvabilité. Cette démarche adoptée par la Banque centrale, et dont la mise en place effective est prévue pour les quelques semaines qui viennent, va permettre aux agents de ces associations de disposer de fiches clients complétant ainsi la démarche habituellement appliquée et qui consistait à faire des enquêtes de terrain, ou encore à se contenter des entretiens individuels pour décider de loctroi des financements. «La centrale des risques est déjà en phase de test chez quelques associations et sa mise en place sera généralisée dans les quelques semaines à venir », nous confie Mohamed Asri, président de lAgence internationale pour le développement économique et social. Aussi, cette démarche devrait-elle être accompagnée dune formation des intervenants du secteur pour leur permettre de mieux gérer leurs décisions de financement. Dun autre coté, pour accompagner le développement du secteur du micro-crédit, un Benchmarking par rapport à dautres pays précurseurs (tels que lArgentine ou les pays dAsie) dans le domaine, va permettre au Maroc dadopter son propre modèle, en corrigeant et, surtout, en évitant de commettre les mêmes erreurs quont pu connaître ces pays, sous réserve de tenir compte des spécificités qui ne sont pas communes à notre pays.