Les mois qui suivirent, Oudghiri prit ses distances par rapport à la bande. Du moins, en a-t-il été subtilement écarté, Benjelloun ne le conviant plus aux rencontres habituelles. Ce dernier narrivait pas encore à digérer la pilule, considérant les agissements de Oudghiri comme de la pure trahison. Du côté du PDG dAttijariwafa bank, la perception des faits était autre. Il faisait la part des choses entre le business et lamitié. Et en matière de business, il ne faisait pas de cadeaux, même à ses «meilleurs amis». Pourtant, malgré les bonnes performances dAttijariwafa bank et ses coups réussis à linternational, lAfricain, comme le surnommait ironiquement ses potes banquiers, ne semblait plus en état de grâce. Cela, les observateurs lont compris lorsque, au cours dune conférence de presse, il annonça, contre toute attente, son désir de «prendre de laltitude». La banque allait changer de statut pour adopter une structure à Directoire et Conseil de Surveillance. Un Conseil dont il allait avoir la charge. Mais les observateurs nétaient pas dupes. Cette réorganisation annoncée était plutôt une mise au placard décidée par les actionnaires du Groupe avec lesquels, visiblement, le torchon brûlait. Oudghiri se sentait soudainement seul. Ceux qui lavaient rendu quasiment omnipotent le lâchaient. Il se souvint alors des mises en garde que lui lançaient ses «amis» banquiers dès son arrivée au pouvoir. Il prenait subitement conscience quils avaient raison et nourrissait lenvie de les revoir. Histoire de se confier peut-être à ceux-là quil considérait comme ses adversaires, ses vrai-faux amis. Cest lui-même qui prit linitiative dappeler Benjelloun afin dêtre convié à leur prochaine rencontre. Bien quayant encore de travers le comportement de Oudghiri, lequel, à ses yeux, nest ni plus ni moins quun renégat, il mit pourtant de leau dans son vin et accepta de len tenir informé. Chose faite quelques jours plus tard. Bizarrement, Oudghiri fit une entorse à son attitude que daucuns qualifiaient dirrespectueuse : lui qui dhabitude arrivait toujours en dernier avec un air désinvolte, était le premier sur les lieux ce jour-là, suivi quelques minutes plus tard du reste de la bande. Cest Bennani, dhabitude si ponctuel, qui arriva le dernier. Il se dirigea droit vers Oudghiri. Non pas pour lui tendre la main, mais plutôt pour lui tripoter le dos et les épaules pendant quelques secondes, avant daller sasseoir, un léger rictus au coin des lèvres. Son comportement laissa pantois les autres qui ny comprenaient rien. Il saffala confortablement sur le fauteuil, tout en lâchant : -Ah !, jai eu peur. Maintenant, je suis un peu plus rassuré. - Mais quest-ce qui se passe Bennani ?, intervint Benjelloun. - Jai entendu dire quil voulait senvoler pour prendre de laltitude. Donc, je vérifiais juste si notre superman avait des ailes, dit-il en riant (à suivre)