La diversification des instruments financiers serait à même de favoriser la dynamique du marché financier. La politique joue un rôle important dans l'orientation des institutionnels dans telle ou telle direction en mettant en place les moyens adéquats. Finances News Hebdo : Quelle est votre appréciation sur le marché financier tel qu'il se présente aujourd'hui avec toutes ses composantes. Estimez-vous quil est propice à ce que la CMIR, en tant quinstitutionnel, puisse jouer son rôle ? Khalid Cheddadi : Le marché financier marocain a fait beaucoup de chemin depuis la réforme de 1993. Aujourd'hui, nous avons un arsenal juridique moderne, une autorité de régulation, des opérateurs professionnels et dynamiques, un système bancaire solide. Tout cela constitue des atouts majeurs pour lessor dun marché financier, et cest bien le cas pour le marché marocain. Maintenant, cela ne veut pas dire que tout est pour le mieux. Nous restons un marché très local, avec des produits peu sophistiqués, relativement étroit et encore trop sensible aux rumeurs. F. N. H. : Quelles sont les entraves qui persistent encore ? K. C. : Entraves nest peut être pas le mot le plus approprié, je parlerais plutôt daxes de progrès. Le principal est lié à létroitesse du marché par rapport à la taille des acteurs et la corrélation entre les classes dactifs. Nous ressentons fortement ce problème depuis début 2007 à cause de la forte performance du marché actions, qui peut inciter à la prudence pour lavenir, et la faiblesse des taux obligataires. Dans ce contexte, les possibilités de diversification restent limitées. Une première réponse a été apportée par lassouplissement de la réglementation des changes pour les investissements à létranger des institutionnels, qui apporte une bouffée doxygène. Sur un autre plan, des progrès peuvent être réalisés dans le renforcement du rôle du CDVM et en tant que régulateur du marché, en le dotant des moyens appropriés et de plus dautonomie. Enfin, linformation et léducation du grand public sur les différents produits financiers est de nature à favoriser des comportements plus objectifs et à rationaliser les approches, ce qui contribuera à la professionnalisation du marché. La diversification des instruments financiers peut également apporter un plus, mais elle doit, à mon sens, accompagner la maturation du marché. F. N. H. : La Loi de Finances 2008 a mis un terme à un certain nombre d'avantages dont jouissaient les compagnies d'assurance et qui risquent de nuire à leur activité en Bourse en tant qu'institutionnels. Quid des Caisses de Retraite ? K. C. : La CIMR nétait pas concernée par les mesures fiscales auxquelles vous faites allusion, compte tenu de son statut dassociation à but non lucratif. Ceci étant, je ne pense pas que lexpiration dune période transitoire durant laquelle des incitations étaient données aux institutionnels pour les pousser à animer le marché financier, soit de nature à modifier leur comportement. Les institutionnels ont fondamentalement besoin dinvestir. La question est de savoir si le marché financier, tel quil est aujourdhui, présente toutes les caractéristiques nécessaires pour leur permettre de le faire, en termes de rendement, de sécurité, de profondeur, de transparence, de diversification etc La réponse à cette question est loin dêtre négative tout en sachant quil existe des axes de progrès à exploiter. F. N. H. : D'après-vous, les institutionnels jouent-ils bien ou mal leur rôle ? K. C. : Le rôle des institutionnels est de collecter lépargne et de la redistribuer pour la consommation ou linvestissement, pour les entreprises ou les particuliers. Ils remplissent cette fonction en optimisant les moyens à leur disposition en vue de maximiser leurs bénéfices. En théorie, ils sont donc supposés toujours bien remplir leur rôle, dans leur intérêt propre. Maintenant, sur un plan macroscopique, il peut être de lintérêt dun pays dorienter les investissements des institutionnels dans telle ou telle direction. Cest le rôle alors de la politique économique qui va mettre en uvre les conditions pour favoriser les objectifs quelle sest fixés. En résumé, il faut que chacun fasse son travail : lEtat doit fixer les objectifs macroéconomiques et mettre en uvre les moyens pour les atteindre et les institutionnels optimiseront leurs bénéfices dans le cadre du contexte qui leur est imposé.