L'opération d'évacuation des 5.000 tonnes de fioul industriel du tanker qui a échoué au large de Tan Tan s'est terminée avec succès. L'échappement de la charge du pétrolier Silver, s'il avait lieu, aurait provoqué une catastrophe naturelle dont les conséquences seraient dommageables aussi bien pour l'environnement que pour l'économie marocaine. Le 24 décembre 2013, l'information concernant l'échouement du bateau Silver sur les côtes de Tan Tan a fait la une des journaux. Et pour cause, le tanker transportait 5.000 tonnes de fioul industriel destiné à la centrale thermique de la ville et à l'approvisionnement des bateaux de pêche. On appréhende une catastrophe écologique dont les conséquences seraient drastiques et considérables sur l'environnement ainsi que sur l'économie nationale. Rapidement, les autorités se mobilisent pour évaluer la situation. Au fil des heures, la tension descend progressivement. Aucune fuite de la charge n'a été détectée. Cependant, il faut rester vigilant et agir rapidement. Le risque d'ouverture d'une brèche n'est pas écarté. Un plan d'urgence est aussitôt mis en œuvre et deux comités, national et local, sont constitués. Des réunions marathoniennes s'enchaînent pour trouver rapidement une solution avec le minimum de dégâts. Après les premières tentatives de désensablement et de remorquage, qui ont échoué à cause du mauvais temps, les autorités décident alors de vider le tanker de sa cargaison. Pour ce faire, l'armateur recourt aux services de la société d'assistance «Smith» qui a sollicité des experts hollandais. Ces derniers ont été dépêchés sur place pour assister la commission locale afin de trouver le moyen de transborder, de la manière la plus sûre et la plus rapide, le fioul. Selon Najib Bachiri, président de l'association Homme et environnement à Berkane, cet incident est une alerte pour le Maroc qui manque en fait d'expertise et d'outils adaptés pour faire face à une telle catastrophe. Et d'ajouter «c'est vraiment triste de faire appel à des Hollandais pour nous aider à trouver une solution à une situation d'urgence». Il a fallu sept jours pour que les opérations de vidange des calles du bateau commencent. C'est grâce à un tuyau fixé à un câble métallique de 6 pouces de diamètre qu'environ 119 camions-citernes ont pu être remplies. Les opérations se sont déroulées dans de bonnes conditions avec comme fait marquant le temps record (20 minutes) qu'il a fallu pour remplir la première citerne, comme l'a souligné Mohamed Othmani, Directeur central de la police, de la sécurité et de l'environnement à l'Agence nationale des ports. Conscient de l'importance écologique que revêt cet incident, le ministre de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement, Abdelkader Amara, s'est déplacé en fin de semaine sur les lieux de l'accident pour suivre de près l'état d'avancement des opérations de sauvetage. Les équipes ont poursuivi d'arrache-pied les opérations de pompage jusqu'au lundi 6 janvier. A l'heure où nous mettions sous presse, le Silver attend toujours d'être remorqué. Les causes de l'incident L'incident du tanker Silver aurait pu être évité. En effet, depuis plusieurs années, le port de Tan Tan connaît quelques problèmes liés à l'accès aux quais à cause des sables mouvants. Les usagers du port et les armateurs ne cessaient de relancer les autorités pour trouver une solution au problème, mais en vain. Une négligence qui aurait pu coûter très cher. Toujours selon Najib Bachiri, «l'impact aurait été néfaste sur la biodiversité marine de la région, surtout que Tan Tan est une réserve alimentant une très grande partie de l'Atlantique marocain, pas loin de la région où se trouve la réserve des phoques moines». Rappelons la catastrophe écologique du bateau Prestige en novembre 2002 qui transportait 70.000 tonnes de fioul. Le pétrolier avait eu un accident au large du cap Finistère près des côtes de Galice au Nord-Ouest de l'Espagne. A cause du mauvais temps, une fissure de la coque avait laissé échapper plus de 40.000 tonnes de fioul lourd provoquant l'une des catastrophes environnementales la plus désastreuse du siècle. La marée noire avait gravement souillée des dizaines de kilomètres des côtes de Galice, du Portugal, du Pays Basque, de la région Aquitaine, de la Vendée et du Sud de la Bretagne. Les dégâts étaient estimés à 1 milliard d'euros et il a fallu des années pour dépolluer l'eau contaminée. Le Maroc l'a donc échappé belle puisque l'impact économique d'une telle catastrophe aurait été draconien. Par un effet boomerang, la pêche, le tourisme, le marché de l'emploi..., tous les secteurs auraient été affectés pendant plusieurs années. Le coût estimatif de cette opération de sauvetage n'a toujours pas été dévoilé mais ce qui est sûr, c'est que la faune et la flore de la région ainsi que des milliers d'emplois ont été préservés. Ce qui n'a pas de prix. Pour éviter ce type d'incident, les autorités doivent se mobiliser pour réhabiliter rapidement le port de Tan Tan qui figure parmi les plus importants du Royaume.