La Conférence des Nations unies pour le Commerce et le Développement a présenté son rapport 2012. Intitulé «Politiques pour une croissance équitable et équilibrée», le rapport révèle que le creusement des écarts de revenus et de richesses dans le monde n'est pas une conséquence inévitable de la mondialisation et du changement technologique. La tendance actuelle peut être inversée par la mise en œuvre de politiques budgétaires et de politiques publiques de l'emploi. Dans le cadre du lancement du Rapport 2012 sur le Commerce et le Développement publié par la CNUCED, une conférence de presse a été organisée à Rabat pour analyser les grandes lignes de ce rapport intitulé : «Politiques pour une croissance équitable et équilibrée». Les grands axes de ce rapport ont été présentés à Rabat par Mouna Cherkaoui, professeur d'économie et Nassim Oulmane, chef de la section du Développement durable au sein du Bureau de la Commission économique pour l'Afrique. Selon le document, l'austérité budgétaire et la compression des salaires affaiblissent toujours plus la croissance dans les pays développés sans que soient obtenus les résultats escomptés en matière de réduction des déficits budgétaires, de création d'emplois et de rétablissement de la confiance des marchés financiers. Le rapport s'intéresse particulièrement aux inégalités de revenus et souligne que la réduction des disparités croissantes de richesse et de revenu aurait non seulement des effets sociaux positifs, mais favoriserait également une croissance économique plus forte. « La CNUCED a depuis longtemps averti qu'un certain nombre de pays développés passaient trop vite de mesures de relance économique à des mesures d'austérité budgétaire. Faute de dépenses publiques suffisantes pour soutenir les marchés intérieurs, la demande de biens et services déjà faible, a stagné ou s'est affaiblie davantage encore», a souligné la CNUCED dans un communiqué de presse. «Plutôt que de revigorer la confiance des entreprises et des marchés financiers, cela a alimenté le pessimisme des entreprises quant à l'avenir, d'où leur réticence à investir dans de nouvelles capacités de production ou à embaucher de nouveaux travailleurs», a-t-elle ajouté. Des tendances déjà formulées dans le rapport de la CNUCED de 2010. Le principal obstacle à la reprise tient «aux tensions récessionnistes dans les pays développés, dont les ajustements de bilan dans le secteur privé, un chômage élevé qui déprime les revenus et freine la consommation des ménages et les mesures prématurées prises par les gouvernements pour réduire leur endettement». D'après le rapport, «les déficits budgétaires ont été le résultat et non pas la cause de la crise». Ainsi, le rapport préconise de s'attaquer au problème de l'endettement public croissant, tout en soulignant que pour le long terme la solution passera par le rétablissement de la croissance et des recettes budgétaires. Le document relève qu'un peu partout dans le monde, la concentration croissante des revenus limite le potentiel économique des pays en affaiblissant la demande de biens et services et en réduisant les perspectives en matière d'éducation et de formation ainsi que la mobilité sociale des populations. Des tendances qu'on peut inverser notamment par la mise en œuvre de politiques budgétaires et de politiques publiques de l'emploi. En effet, il est remarqué que l'austérité n'a pas eu l'effet désiré à savoir renouer avec la croissance. Bien au contraire, elle freine le retour à une croissance économique durable. Chose qui conduira à une nouvelle détérioration de la situation économique en Europe. Comme le souligne l'économiste Nassim Oulmane pour qui les politiques menées aujourd'hui en Europe ne favorisent pas une croissance forte et équilibrée. Il estime d'ailleurs qu'il est nécessaire de relancer la demande à travers des politiques budgétaires appropriées, tout en tenant compte de tous les effets macroéconomiques des politiques budgétaires et de revenus. Sa collègue Mouna Cherakaoui aboutit quasiment aux mêmes conclusions dans le sens où les politiques d'austérité mises en vigueur actuellement dans la plupart des pays ne pourront pas aboutir à renouer avec une croissance économique à part entière. Des inégalités de revenus: une tendance réversible Selon le document de la CNUCED «les tendances sur les 30 dernières années indiquent un accroissement des inégalités de revenu dans et entre les pays. La part des salaires dans le revenu total a diminué dans la plupart des pays développés et dans beaucoup de pays en développement». Dans les pays développés, la hausse des inégalités a été en partie le résultat d'une modification des stratégies des entreprises. Alors que dans les pays en développement et ceux en transition, les effets redistributifs de la mondialisation et du changement technologique ont également contribué à cette hausse. Ces écarts se traduisent par une limitation du potentiel économique des pays en affaiblissant la demande des biens et services et en réduisant les perspectives en matière d'éducation et de formation ainsi que la mobilité sociale de la population. Mais cette tendance n'est pas une conséquence inévitable de la mondialisation et du changement technologique. Pour y remédier, la CNUCED préconise d'inverser ces tendances par la mise en œuvre de politiques budgétaires et de politiques publiques de l'emploi. Concrètement, les économistes de la CNUCED recommandent des politiques qui préservent la part des salaires dans le revenu national et qui assurent la redistribution du revenu par le biais d'une fiscalité progressive des dépenses sociales avec un encouragement des ajustements de salaires en lien avec la croissance de la productivité.