Le renchérissement de la facture pétrolière est estimé entre 1,3 et 2,8 Mds de DH par rapport à 2011. A fin juin, les dépenses de compensation représentaient 81% de l'enveloppe globale consacrée à l'ensemble de l'année (près de 32,5 Mds de DH). Comment relancer la croissance dans un contexte de crise ? Telle est la question qui ne cesse de tarauder les esprits des économistes, des analystes et, bien entendu, de l'équipe gouvernementale. Il y a un peu moins d'un an et au moment où les grandes puissances économiques reconnaissent l'effet de contagion de la crise financière, ici au Maroc on criait sur tous les toits que nos fondamentaux se portaient bien et qu'au demeurant l'économie nationale faisait preuve de résilience. Au moment même où l'on se demande encore si le monde a traversé la crise et renoué avec la croissance, on prétend encore que le Maroc se porte bien. Cette conclusion n'est pas l'apanage de nos analystes. Elle émane aussi du Fonds monétaire international puisque son Directeur général n'a pas manqué de préciser que le Maroc est un très bon exemple et qu'il a bien franchi la crise en retrouvant une forte croissance. Aujourd'hui, on ne peut se leurrer au vu de nos principaux fondamentaux qui ont tous viré au rouge et d'un contexte international qui n'augure pas de bons auspices. En supposant que le volume des importations de pétrole brut pour l'année 2012 reste inchangé par rapport à 2011, à 5 millions de tonnes, que la parité dirham/dollar se maintiendrait à 8,5 en moyenne et que le cours moyen du baril importé se situerait dans une fourchette de 105 à 110 dollars, la valeur des importations pétrolières s'établirait, toutes choses égales par ailleurs, entre 32,7 et 34,3 Mds de DH. Ce qui se traduirait par un renchérissement de la facture pétrolière estimé entre 1,3 et 2,8 Mds de DH par rapport à 2011. Un autre indicateur alarmant : ce sont les dépenses de consommation qui ont atteint 26,2 Mds de DH à fin juin 2012, en hausse de 6,9% en glissement annuel. Ces dépenses représentent ainsi 81% de l'enveloppe globale consacrée à l'ensemble de l'année (près de 32,5 Mds de DH). Pour limiter les effets du renchérissement des cours internationaux du pétrole sur le budget de l'Etat, le gouvernement avait annoncé au mois de juin dernier une hausse des prix de l'essence, du gazoil et du fuel industriel. Une hausse qui, selon de nombreux analystes, ne pourrait éradiquer la hausse des dépenses de la compensation. Comme un malheur ne vient jamais seul, la campagne agricole 2011-2012 a été en deçà des attentes. Elle s'est traduite par une importation plus importante des céréales. Et donc pour assurer un approvisionnement normal du marché national en blé, les autorités ont réduit les droits d'importation. Notons que des droits d'importation préférentiels du blé tendre sont aussi prévus par l'Accord d'association avec l'Union européenne et l'Accord de libre-échange avec les Etats-Unis (les contingents sont déterminés en fonction de la production nationale). Toutefois, l'ONICL n'a pas reçu de réponse à ses deux derniers appels d'offres pour importer du blé tendre dans le cadre des contingents américain et européen (300.000 tonnes chacun). Cette situation serait liée à la flambée récente des cours internationaux du blé. Aussi, les prix d'importations sont-ils devenus moins compétitifs que le prix de référence arrêté sur le marché national (290 dirhams le quintal). Toutes ces incertitudes n'ont pas manqué de renforcer davantage le déséquilbre de la balance commerciale. La hausse des exportations des phosphates et dérivés de 4,6% n'a pas pu à elle seule compenser celle des produits énergétiques de 10%, portée par la hausse des cours mondiaux. Un tel diagnostic n'augure rien de bon. Une chose est donc sûre : le Maroc a été impacté d'une part par une conjoncture internationale qui laisse à désirer et qui s'est traduite par un ralentissement de la demande étrangère, un recul des transferts des MRE et des recettes touristiques et, d'autre part, par des troubles politiques que connaît la région MENA. Les estimations de croissance aux alentours de 2% à 3% pour 2012 montrent que la crise est bien installée. Pour quel modèle de croissance ? La question que se posent aujourd'hui bon nombre d'économistes est : face à cette nouvelle donne, quel modèle de croissance faut-il adopter ? « Le Maroc a besoin actuellement d'un nouveau modèle de croissance, qui pourrait favoriser la création d'emplois et de richesses, l'inclusion sociale, et l'émergence d'une véritable classe moyenne. Cela passe essentiellement par l'abandon de la spécialisation passive axée sur la compétitivité-coût, et l'adoption d'une diversification productive axée sur l'innovation et la création de plus de valeur ajoutée». Favoriser la demande interne via la classe moyenne est admis par les économistes. Le président de l'Institut marocain des relations internationales estime à son tour qu'une réforme fiscale est désormais impérative. D'après lui, une plus grande justice fiscale est nécessaire. Il préconise d'augmenter la pression fiscale sur les riches et de la diminuer sur la classe moyenne. La situation ne semble pas offrir de marges de manœuvre suffisantes à cet effet. Pis encore, les difficultés de bouclage de l'exercice 2012 devront nécessairement se répercuter sur l'exercice qui lui succède. Le processus de croissance même modeste, comme il ressort des éléments précédents, demeure soumis à de multiples facteurs de risques. Le plus inquiétant est celui de la persistance de la morosité du contexte international. Dossier réalisé par S. E. & I. B.