La Loi de Finances 2012, qui consacre 32 Mds de DH à la compensation, ne pourra couvrir que les besoins du premier semestre 2012. D'aucuns prétendent qu'il n'y a pas une réforme imminente pour la Caisse. Le Fonds de solidarité, prévu dans la LF 2012, contribuera prioritairement au financement des dépenses relatives à la mise en place du RAMED. Considéré durant la campagne électorale comme une priorité, le problème de la Caisse de compensation n'est pas encore pris en compte comme il se doit par l'actuel gouvernement. Sa situation continue de connaître une explosion dictée surtout par un contexte d'incertitudes dû à une campagne agricole très moyenne et à un prix du baril de pétrole très volatil. Interrogé à ce sujet, Najib Boulif, ministre délégué auprès du chef de gouvernement chargé des Affaires générales et de la gouvernance, a laissé entendre que l'équipe actuelle n'a pas encore tranché sur la globalité des aspects du nouveau système de la Caisse de compensation. Il annonce à ce titre que la proposition finale sera présentée dans quelques semaines. Le ministre a par ailleurs précisé que «la refonte de l'ensemble du système pourrait être envisagée». D'aucuns considèrent cependant qu'il n'y a pas de réforme imminente pour la Caisse. Or, le budget consacré à la Caisse de compensation commence à inquiéter à plus d'un titre et les réformettes consacrées à son allègement n'arrivent pas encore à produire les effets escomptés. Les analystes de l'Observatoire de conjoncture font allusion, entre autres, à la création du Fonds d'appui à la cohésion sociale. L'esprit de ce fonds voudrait conférer à cet outil une efficacité pour lutter contre la précarité, lever les menaces sur le pouvoir d'achat tout en neutralisant l'effet de la hausse du cours du pétrole avec son impact sur les prix des denrées alimentaires. En 2011, la Caisse de compensation a atteint une charge de près de 48,8 Mds de DH en raison notamment du renchérissement des cours des produits pétroliers sur les marchés internationaux. C'est d'ailleurs la clôture de l'exercice budgétaire 2011 avec un déficit record de 6,1% du PIB (que le projet de LF 2012 se propose de ramener à 5%) qui a suscité un tollé chez la classe politique qui a protesté contre le peu de bénéfice que tire la population défavorisée de la Caisse de compensation. D'après les économistes, la Loi de Finances 2012, qui consacre 32 Mds de DH à la compensation, ne pourra couvrir que les besoins du premier semestre 2012. Une cible non «ciblée» L'état actuel de la Caisse de compensation reflète un différentiel entre les coûts d'importation des produits de première nécessité et les prix publics, qui s'affiche dans des proportions telles qu'une subvention monotone croissante ne peut, à terme, contenir l'érosion du pouvoir d'achat des ménages. Le problème est que le système continue et continuera d'avoir de sérieux effets pervers qui détournent l'essentiel de la subvention vers des cibles non désirées. L'absence de vision intégrée de la compensation, et le manque de coordination entre la multitude des intervenants, met en faillite la cohésion sociale recherchée à travers ce système et limite l'efficacité des politiques sectorielles dédiées. Au titre de l'année budgétaire 2012, il a été décidé la création du Fonds d'appui à la cohésion sociale dont le montant est de 2.000 MDH. Les ressources vont provenir des sociétés soumises à l'IS, soit 1,5% du bénéfice net comptable (supérieur ou égal à 2OO MDH), du Fonds de solidarité des assurances et d'un pourcentage de 1,6% du prix de vente des cigarettes (hors TVA). D'aucuns considèrent ces dotations comme insuffisantes par rapport aux besoins et attentes des populations. D'après eux, ce fonds qui cible la population démunie et dont l'objet est d'accorder une attention particulière aux populations vulnérables pour éviter la détérioration de leur niveau de vie, contribuera prioritairement au financement des dépenses relatives à la mise en place du Régime d'assistance médicale (RAMED) et à son extension à l'ensemble du pays. A noter que le RAMED cible 8,5 millions de personnes économiquement faibles (soit 28% de la population totale), dont 4 millions vivent en état de pauvreté et 4,5 millions en situation de vulnérabilité. 160.000 autres indigents sont concernés, il s'agit des détenus, des sans-abris et des orphelins. D'après les conjoncturistes «en attendant la mise en œuvre de ce nouveau mode d'intervention dans le soutien des faibles revenus, le problème de la Caisse de compensation reste entièrement posé. Le ciblage qui permettra réellement de favoriser la lutte contre la pauvreté et la résorption des inégalités sociales est encore à repenser». Au Maroc, l'essentiel de l'allocation déboursée dans ce cadre par la Caisse de compensation pour soutenir le prix de la farine de base, par exemple, profite largement aux minoteries et aux intermédiaires alors que le consommateur et le paysan, les deux principaux bénéficiaires mis en avant de l'instauration de la subvention, n'en tirent pas profit. De ce fait, si on peut consentir à la compensation sa vertu de préserver le pouvoir d'achat en jugulant l'inflation, on ne peut s'empêcher de lui reprocher sa faculté d'engendrer des niches de rente qui favorisent la stagnation et handicapent l'appareil productif. «Les mesures à caractère administratif et réglementaire, qu'il s'agisse d'observatoire et autres conseils de la concurrence, se révèlent être des pis-aller sans effet opérant pour la protection durable du consommateur», dénoncent les conjoncturistes. La surveillance des prix et des mécanismes de mise en œuvre de la compensation ne peut suffire à contenir la faillite d'un système dont le rôle se limite à faire l'appoint pour combler le gap que creuse l'importation de biens de consommation courante. Ce qui confirme que les solutions de cette nature ne peuvent être efficaces, sans être soutenues par des dispositions profondes à moyen et à plus long terme pour circonscrire les effets contrastés qu'elles produisent sur les équilibres socio-économiques.