L'inflation devrait s'accélérer après la révision de la structure du panier de référence de l'IPC par le HCP en mars dernier. Pour 2018, la Banque centrale revoit à la baisse la croissance du crédit bancaire. La Banque centrale a tenu son deuxième Conseil monétaire de l'année 2018. Elle a décidé de maintenir inchangé son taux directeur et a légèrement ajusté à la hausse sa prévision de croissance pour l'année 2018. Elle table désormais sur une croissance de 3,6% en 2018 (et 3,1% en 2019), alors qu'elle prévoyait 3,3% en mars dernier. Cette révision à la hausse s'explique par une campagne agricole bien meilleure que prévue. En mars dernier, BAM s'appuyait sur une récolte céréalière de 80 millions de quintaux. Aujourd'hui, et d'après les chiffres du département de l'Agriculture, la campagne céréalière serait de 98 millions de quintaux. Résultat : la valeur ajoutée agricole s'accroîtrait de 5,7% en 2018 (contre une hausse de 2,3% anticipée en mars). Pour 2019, Abdellatif Jouahri, wali de BAM, estime que «sous l'hypothèse d'une production céréalière de 70 millions de quintaux et de la poursuite des performances tendancielles des autres cultures, la valeur ajoutée agricole devrait reculer de 1,7%». En face, les activités non agricoles devraient légèrement accélérer et afficher une croissance de 3,2% en 2018 et de 3,5% en 2019 (après 2,7% en 2017).
L'inflation en question
L'inflation s'est, une fois n'est pas coutume, invitée dans ce Conseil. Et pour cause, après un niveau faible en 2017, elle devrait s'accélérer en 2018, et pas qu'un peu. Cette dernière a ainsi marqué une nette accélération lors des 4 premiers mois de l'année 2018, atteignant 2,7% en avril contre une moyenne de 0,7% en 2017. Elle devrait terminer l'année 2018 sur une moyenne de 2,4%, un taux inédit depuis des années. Jouahri explique que «cette évolution est due à la révision de la structure du panier de référence de l'IPC opérée par le haut-commissariat au Plan (HCP) en mars dernier, dont nous avons pris compte dans nos prévisions. En excluant ces éléments exceptionnels en 2018, l'inflation devrait rester sur des niveaux cibles (1,4% : Ndlr) en 2019», a-t-il toutefois rassuré. Du côté des comptes extérieurs, Jouahri signale la «belle performance des exportations» qui augmentent de près de 9% à fin mai 2018, grâce à un secteur de l'automobile très dynamique et des ventes de phosphates et dérivés en hausse. Pour autant, les importations progressent de 9,7%. Une progression justifiée, entre autres, par l'accroissement de la facture énergétique à 12,5% suite à la hausse des prix du pétrole. Dans le même registre, le wali enregistre avec satisfaction «les hausses notables des recettes de voyage des transferts des MRE» qui progressent respectivement de 15% et 9,7%. La situation est moins reluisante en revanche pour le déficit du compte courant qui avoisinerait 4,1% du PIB au terme de cette année, avant de s'alléger à 3,6% en 2019. À la lumière de ces éléments, les réserves de change termineraient l'année à 255,4 milliards de dirhams et s'établiraient à 245,9 milliards au terme de 2019, assurant ainsi la couverture de 5 mois et 25 jours puis 5 mois et 18 jours d'importations de biens et services. «Je spécifie à ce niveau que ces chiffres tiennent compte d'une sortie du Trésor à l'international, de l'opération Saham et du reliquat des dons du CCG de 7 milliards de DH non encore encaissés», a précisé Jouahri.
Relancer la machine du crédit bancaire
Favorisées par une dépréciation du taux de change effectif réel (TCER) observé en 2017 et qui se poursuivra en 2018, les conditions monétaires demeureront accommandantes à moyen terme, assure la Banque centrale. «En 2019, le TCER connaîtrait une légère dépréciation, résultat particulièrement d'un différentiel d'inflation en faveur du Maroc», fait savoir le wali. Concernant le crédit bancaire au secteur non financier, son taux d'accroissement a été revu à la baisse à 4% en 2018, et ce compte tenu des évolutions récentes des prêts à la promotion immobilière, et maintenu inchangé à 4,5% en 2019. Le wali admet que la machine de production des crédits doit urgemment être relancée. «Nous allons tenir une réunion avec la CGEM et les banques dès la rentrée pour discuter des pistes de relance et pour actualiser l'information afin de comprendre pourquoi cette atonie persiste sur le crédit bancaire», assure-t-il. «Nous suivons de très près les engagements des uns et des autres. Le système bancaire a rempli pas mal d'engagements qu'il avait pris dans le cadre du mémorandum (ndlr : CGEM-GPBMBAM). Bank Al-Maghrib a pris l'engagement de mettre en place 10 comités régionaux TPME, qui ont eu au moins 11 réunions pour débattre des spécificités de chaque région, dans le but de relancer le crédit bancaire. De la part du gouvernement, nous n'avons pas eu de feedback et nous espérons, avec la nouvelle direction de la CGEM, avoir plus de visibilité» a-t-il tiré au clair. ■
L'ajustement budgétaire plus lent que prévu
A moyen terme, l'ajustement budgétaire devrait se poursuivre mais à un rythme plus lent que prévu. La Banque centrale table dans ce sens sur un déficit budgétaire de 3,4% du PIB en 2018 et 3,3% en 2019. L'exécution budgétaire à fin avril s'est soldée par un creusement du déficit budgétaire de 1,4 milliard de DH à 14,2 milliards de DH, résultat, en particulier, d'un recul du solde positif des comptes spéciaux du Trésor.