* Depuis deux ans, les coopératives ont rejoint le rang des assujettis, mais elles continuent de crier à la faillite. * Le ministère de lEconomie sociale lance une étude diagnostique des coopératives, axée particulièrement sur limpact des dispositions fiscales contenues dans les Lois de Finances des années 2005 et 2006 sur lactivité des coopératives. Ladage qui dit «Le temps est le meilleur des remèdes» ne semble pas trouver un écho favorable auprès des coopératives. Et pour cause, la fiscalisation qui leur a été imposée dans le cadre de la Loi de Finances 2005, pèse sur leur trésorerie comme une épée de Damoclès. La Loi de Finances pour lannée budgétaire 2005, dans le but de consolider léquité fiscale, a subordonné loctroi de lexonération à la nature des activités et au montant du chiffre daffaires réalisé. En regardant dans le rétroviseur, cette imposition sest déclenchée suite à la bataille commerciale que se livraient la Centrale laitière, Filiale de lONA, et Copag (qui produit la marque Jaouda), une bataille qui sest déplacée vers larène fiscale. Cest dans ce sillage qua pris forme la décision dassujettir les coopératives réalisant un chiffre daffaires supérieur à 5 MDH, aux deux taux que sont la TVA et lIS afin de mettre un terme à une concurrence «déloyale». Un brin despoir ! Bref, sans vouloir débattre dune problématique qui a fait couler beaucoup dencre, le but est de voir sil y a possibilité de revoir cette imposition qui, selon les dires des opérateurs, étouffe lensemble des filières. Conscient du rôle que jouent les coopératives dans les domaines de la production des biens et services et de lorganisation des coopérateurs en vue dassurer un meilleur approvisionnement du marché national, notamment les coopératives agissant dans les secteurs du lait et des céréales, et considérant les enjeux majeurs que représente le secteur productif pour le développement des activités de léconomie sociale Adil Douiri, ministre du Tourisme, voire de lEconomie sociale, lance une étude diagnostique des coopératives axée particulièrement sur lanalyse des filières laitière et céréalière et sur limpact des dispositions fiscales contenues dans les Lois de Finances des années 2005 et 2006 sur leur activité et leur rendement ( collecte, récolte, transformation, conditionnement, commercialisation, revenu des coopérateurs ). Interrogé par nos soins, Abdelmounaïm Guessous, Directeur de lEconomie sociale explique : «cette étude permettra danalyser la situation financière, fiscale et comptable de ces coopératives, particulièrement celles des filières laitière et céréalière, et de proposer des aménagements fiscaux en matière de TVA, dIS et de définir les moyens et les modalités dintégration de ces coopératives dans le processus de mise en uvre du nouveau cadre fiscal préconisé». Le ministère de lEconomie sociale prévoit-il dinfluencer le ministère des Finances ? «En aucune manière, en tant quadministration, nous sommes neutres, mais nous soutenons toute organisation qui se développe, qui crée de la richesse et donc de lemploi. Nous transmettrons, bien entendu, cette étude à qui de droit pour décider», ajoute-t-il. Des réunions marathoniennes ont certes eu lieu avec les responsables des coopératives, mais le département dAdil Douiri ne pourra réaliser que les coopératives sont lésées que sil dispose de chiffres sous les yeux. Des arguties certes légitimes «Je pense que la fiscalisation des coopératives nest pas en soi une bonne chose parce que la plupart aident une catégorie sociale en difficulté, à savoir les producteurs de lait et contribuent de ce fait au développement des zones rurales», martèle R. Lazrak, conseiller en fiscalité. Dans son ouvrage relatif à lIS, le fiscaliste définit les coopératives comme étant «un groupement de personnes physiques qui conviennent de se réunir pour créer une entreprise chargée de fournir, pour leur satisfaction exclusive, le produit ou le service dont elles ont besoin». Ainsi, à lexception des banques régionales populaires, toute société quelle que soit la forme choisie (société anonyme, SARL ), ayant régulièrement adopté la forme de coopérative, se trouve aujourdhui soumise à limpôt sur les sociétés. Ainsi, si pour la Centrale laitière, filiale de lONA, cette décision met fin à ce quelle considère comme une injustice flagrante dans le secteur laitier, pour la Copag il sagit dune pénalisation des coopératives qui jouent un rôle socio-économique important dans le développement du monde rural. Daprès les opérateurs au sein du secteur, cette mesure, semble-t-il, donne un coup de marteau à tous les efforts fournis pour développer certaines régions rurales auxquelles les investisseurs tant nationaux quinternationaux ne sintéressaient point. Pis encore, cette fiscalisation se traduit par une révision à la baisse du prix du lait payé aux éleveurs. Daprès eux, le système coopératif permet aux éleveurs de se restructurer, de se mettre à niveau et de trouver les financements pour leurs activités. Lorsque largentier du Royaume a donné lordre de la saisie des comptes de quatre coopératives laitières qui nont pas réglé leurs dus au titre des exercices 2005 et 2006, ces dernières ont crié au scandale menaçant darrêter leur activité. Depuis lors, les opérateurs au sein des coopératives nont pas pu avaler la pilule. Ils ont par la suite rencontré le ministre du Tourisme, de lArtisanat et de lEconomie sociale pour un compromis. Une autre rencontre a été organisée avec N. Bensouda, Directeur des impôts. En attendant le verdict, à savoir les recommandations de létude, les coopératives ne comptent nullement baisser les bras. «Notre situation financière ne nous permet pas de payer quoi que ce soit à lEtat», lance un professionnel du lait. Aujourdhui, le marché est partagé dune manière équitable entre la Centrale laitière et les coopératives. Mais il va sans dire que la Centrale laitière détient le monopole du marché, une situation qui ne dérange pas outre mesure les coopératives qui crient déjà au désastre.