Mazagan n'est pas qu'une station balnéaire ou un banal pôle industriel. Cette ville est aussi et surtout, le fief des plus grands écrivains, poètes, plasticiens, sculpteurs, hommes de théâtre…qu'à connu le pays. Et si certains ont tiré leur révérence, tels : Abdelkbir Khatibi, Driss Chraibi, Chaibia, Afifi…D'autres sont toujours là, comme pour faire perdurer une réputation devenue presque légendaire: Abdellah El Aroui, Betty Batoul, dont le père n'est autre que le défunt Kaddour, ex- restaurateur sur la route de Oualidia, Maria Zaki,Mustapha Jmahri… en littérature ; Mohamed El Aâdi (sculpture), André El Baz, Zoubir et Dibaji (artistes-peintres), Aicha Zougui, Fatima Moutih, Fouad Khatibi (neveu de feu Abdelkbir)… en poésie… L'ex Mazagan est une cité féconde. A chaque innovation elle semble surprendre…et par la plus agréable des manières.
Et on ne saurait mieux confirmer ces dires, que de mettre en exergue Chouaib Douib, ce nouvel écrivain dont les illusions dans « Mirages », sont un clin d'œil, aux spécialistes de la prose. Tel un Edmond Amran El Maleh, un Abderrahmane Mounif…Chouaib Douib, et pour des raisons qui lui sont personnelles, n'a jugé bon de publier son premier livre, qu'une fois arrivé à l'âge de la retraite. Coup d'essai… ? Le lecteur est seul juge. Il fera connaissance avec Brin de Paille, le Gavroche marocain haut en couleur dans « Mirage ». Il l'écoutera conter sa chanson d'espoir sous les coups des matraques. Appréciera son courage, lorsqu' il subira les affres des adultes passivement, sans jamais céder, ou quand il parviendra parfois à réussir la gageure de tourner ce calvaire en épopée. Il le suivra à travers ses aventures pleines d'intrigues, aux issues problématiques et incertaines. Parcourra avec lui les ruelles d'un Mazagan d'antan où il se bat, certes désarmé, mais sans faire la moindre concession à ses détracteurs…ses bourreaux. Le lecteur sera témoin de sa victoire finale. Celle du bien sur le mal Il verra comment le cri de rage dans « Mirages », va se transformer en mélodie harmonieuse, en ode tonifiante incitant à l'amour et rejetant au loin la haine. Quand Douib Chouaib avec son étonnant tempérament de vainqueur, plus indomptable et rebelle que jamais, nous parle du jardin Spinny, des sables d'or de la plage de Deauville, de la cité portugaise, du marché central, de la place El Hansali, du Théâtre, de l'hôpital civil et d'autres « monuments » qu'il chérit, comme ces défilés militaires, avec un agneau endossant l'étendard français en tète du cortège… Ce sont là autant de schèmes qu'il agite en tant que Mazaganais : la mémoire du Deauville marocain de Lyautey. Le panache et la candeur du gavroche, le puritanisme de Brin de Paille et…d'un Chouaib Douib en personnage fascinant, d'une euphorie exaltée et de tendance à sourire de tout… Le style dans « Mirages » est ramassé et l'écriture compacte. Le verbe tel un article créateur, domine l'événement et le décrit esthétiquement. Tel un scaphandrier, il fouille dans les tréfonds abyssaux de l'auteur, pour nous remonter en surface une réalité douloureuse, parfois effrayante. Une réalité traduite par des images et décrite par des exemples d'adultes noyés dans le désarroi et le doute. …Coup de maitre ? Rien que le témoignage des membres de l'association des anciens Mazaganais, éparpillés aujourd'hui à travers le monde, et parmi lesquels se trouve un nombre respectable d'écrivains : Jean Morel, Mustapha Jmahri, Abdellah El Aroui, Rafael Vasquez, Betty Batoul…et qui ont organisé en son honneur un café littéraire, en marge de leur 19ème rencontre, confirme tout le bien que les jdidis pensent déjà de Douib. Un nouveau né de la littérature maghrébine. Un chef-d'œuvre qui une fois ses toutes premières pages consommées, ne lâche plus son lecteur, avant qu'il ne s'arrête à son terme. « Mirages » est le livre où la joie défie l'amertume. C'est le livre d'une certaine injustice sociale, celle des enfants, sans réelle protection, face au monde sans pitié des adultes et de… la joute inégale. Au-delà de « Mirages » il y a un auteur à rencontrer et un écrivain à découvrir. Pour la petite histoire, Chouai Douib vient de terminer son deuxième livre : « La Saga des Douib ». Un livre qui rappelle par certains de ses aspects, celui des « Rougan-Macquart » d'Emile Zola. L'ECHO