Dans un contexte de repli de la place casablancaise, l'annonce des résultats semestriels du leader de l'immobilier en deçà des prévisions du business plan inquiète. Le top management du groupe, lui, affiche une sérénité déconcertante Les rencontres de presse organisées par le groupe Addoha ont presque parfois un côté surréaliste tant son PDG, Anas Sefrioui, déborde d'optimisme et semble décontracté. Une rencontre comme on dit à la bonne franquette. Il demande, comme à chaque fois, s'il peut intervenir à la fois en arabe dialectal et en français, il s'en excuse. Il répond à chaque journaliste en l'appelant par son nom, histoire de le valoriser au maximum. Ses propos, même s'ils sont parfois confus, sont dits avec tellement de complaisance qu'il vous ôtent toute envie de velléités. Par la force des choses, le personnage en devient obligatoirement sympathique, malgré toutes les rumeurs sur les difficultés que rencontrerait le groupe. Et pour cause, selon Anas Sefrioui, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. «Si nous n'avons pas réalisé 50% du chiffre d'affaires prévu pour 2009, qui tablent sur 6,2 milliards de dirhams, c'est tout simplement parce que nous n'avons pas obtenu un certain nombre de permis d'habiter et de titre foncier. Mais les logements correspondant à ce chiffre d'affaires existent bel et bien. Nous allons donc atteindre notre objectif de 6,2 milliards de DH, seulement, ce sera avec un léger décalage car il sera réalisé entre juin 2008 et juin 2009», explique le PDG. En effet, le groupe Addoha ne comptabilise pas les compromis de vente, même si le client règle la totalité du bien. Il faut qu'il y ait transfert et transcription du titre foncier au profit de l'acquéreur pour que la vente soit intégrée au chiffre d'affaires. Et selon le management, les compromis de vente signés au 8 octobre 2008 totalisent 23.947 unités et généreront un chiffre d'affaires de 8,2 milliards de DH sur les prochains 18 mois. D'ailleurs, la prochaine adoption des normes IFRS par le groupe Addoha devrait permettre de comptabiliser dans le chiffre d'affaires les avances, donnant ainsi une image plus réelle du groupe, dixit Sefrioui. A cet argument, il faut ajouter le fait que les résultats du groupe Biladi (racheté en 2007) et ceux de Fadesa (appartenant à 50% au groupe Addoha) n'ont pas encore été consolidés, comme Challenge Hebdo l'avait mentionné dans un précédent numéro, et qui représentent plusieurs millions de DH. Enfin, ce qui explique ce «décalage technique de la production», comme aime à le rappeler le management du groupe, ce sont des facteurs exogènes: la rareté de la main d'œuvre pour la construction et la tension existante sur la disponibilité des matériaux. D'ailleurs «ce décalage technique de 4 à 6 mois par rapport aux prévisions est sans aucun impact sur les réalisations commerciales», tient à souligner le groupe. Une nouvelle filiale : Addoha Management Certaines rumeurs parlaient même de nouveaux partenariats avec des entreprises étrangères pour faire face à ce manque de main d'œuvre. Seulement, Anas Sefrioui rappelle que cela fait plus de cinq ans que le groupe travaille avec des entreprises étrangères. Addoha traite avec 15 à 20 entreprises marocaines, et 4 à 5 étrangères. Seulement, elle ne fait appel à ces dernières que lorsque les entreprises marocaines ne peuvent plus répondre à la demande, sans pour autant que cela n'impacte les prix à la hausse, puisque selon le management, elles sont obligées de s'aligner sur le marché si elles souhaitent travailler avec Addoha. Tous ces arguments mis côte à côte (les compromis de vente, la rareté de la main d'œuvre, la tension sur la disponibilité de la main d'œuvre...) font que le Président d'Addoha déborde d'optimisme. «Je ne vois pas comment on peut parler de crise alors qu'il y a de la tension sur la main d'œuvre et sur les matériaux. Moi-même, je suis à 5,6 milliards de DH d'investissements dans deux cimenteries, c'est vous dire ma confiance dans le secteur. Pour moi, il n' y a pas de crise dans l'immobilier, il n'y a d'ailleurs plus de produits Addoha disponibles jusqu'en 2010!», s'insurge Sefrioui. D'ailleurs, pour faire face à cette demande (183.219 unités en cours de commercialisation et 82.042 unités en cours de lancement), le groupe Addoha a créé une nouvelle filiale nommée Addoha Management: une entité dotée d'un encadrement constitué de 60 ingénieurs et cadres, chargée de la maîtrise d'ouvrage déléguée. Objectif: une meilleure maîtrise au niveau des réalisations en termes de délais et de coûts. Espérons juste que la demande soit encore au rendez-vous au-delà de 2010, car le ralentissement prévu de la croissance mondiale touchera d'une manière ou d'une autre le Maroc. Son effet ne se fait certes pas encore vraiment ressentir aujourd'hui, mais c'est bien connu en économie, il existe un décalage entre le déclenchement d'une crise et sa propagation. Alors le déficit en logement que connaît le Maroc n'y fera rien, car la demande finira par s'atténuer. ◆