Tanger Med dans le viseur, la propagande qatarienne à l'œuvre. Cette nouvelle tentation intervient dans un contexte de campagnes de désinformation qui ne relèvent plus seulement de maladresses éditoriales, mais bien d'attaques méthodiques contre des intérêts économiques et politiques stratégiques. Le Maroc en fait aujourd'hui les frais, au cœur d'une opération médiatique menée tambour battant par la chaîne qatarienne Al Jazeera. Un épisode révélateur de la manière dont certains Etats instrumentalisent l'information à des fins de rivalité régionale, quitte à faire passer l'intoxication médiatique pour du journalisme d'investigation. Au centre de cette nouvelle offensive : le port de Tanger Med, fleuron logistique du Maroc et 17e port mondial, faussement accusé d'être une plateforme de transit d'armes à destination d'Israël. Une rumeur relayée sans preuve, amplifiée par des réseaux sociaux pro-algériens et certaines pages revendiquées comme « pro-palestiniennes », et attisée à dessein par Al Jazeera. La chaîne qatarienne a relayé ces allégations avec un empressement suspect, appelant à des grèves et manifestations devant les infrastructures marocaines, sans jamais soumettre les faits au moindre examen critique. Une mobilisation soudaine, téléguidée, et surtout fondée sur du vide. Pendant ce temps, cette machine de propagande ferme les yeux délibérément sur les interdictions de manifestions en Algérie en soutien aux Palestiniens. Un deux poids deux mesures qui en dit long sur les complicités entre Al Jazeera et le régime algérien. La chaîne qatarienne, pourtant si soucieuse d'"enquêtes exclusives", s'est bien gardée d'évoquer un élément capital : le rôle de la base militaire américaine d'Al-Udeid, située au cœur même du Qatar, dans l'acheminement d'un soutien logistique vers Israël dès le 8 octobre 2023, au lendemain de l'attaque du Hamas. Ce sont plusieurs avions C-17 qui ont décollé depuis cette base pour fournir une aide d'urgence à Tel-Aviv, selon plusieurs sources. Aucun reportage, aucun article, aucune analyse d'Al Jazeera n'a osé exposer cette réalité pourtant documentée. Lire aussi : Mme Akharbach met en garde à Nouakchott contre les pratiques de désinformation dans les processus électoraux en Afrique Le double discours devient ici évident : instrumentaliser la cause palestinienne pour affaiblir un concurrent régional, tout en ménageant les liens sécuritaires et stratégiques avec les Etats-Unis et Israël. Une posture que l'on retrouve dans d'autres domaines. Dans le même temps, le Qatar développe, dans une discrétion relative, une ligne maritime stratégique qui relie directement Doha à Alger, avec pour ambition de desservir la quasi-totalité des ports arabes... à l'exception notable du Maroc. Un choix géopolitique délibéré, illustrant une volonté d'alignement avec l'Algérie dans sa quête affichée de concurrencer Tanger Med, tout en isolant Rabat dans les corridors logistiques régionaux. La tentative d'étouffer la montée en puissance du hub marocain ne s'arrête pas là. Des manifestations ont ainsi été organisées devant Tanger Med pour empêcher l'accostage de navires affiliés au géant danois Maersk, accusé d'avoir des liens commerciaux avec Israël. Or, Maersk opère également en Algérie, via plusieurs agences locales, sans que cela ne provoque la moindre indignation dans les cercles "militants" qui se sont acharnés sur le Maroc. Deux poids, deux mesures, dictés non pas par une indignation sincère, mais par des intérêts politiques. Sur le plan factuel, aucun élément tangible n'est venu étayer les accusations relayées par Al Jazeera. Aucune cargaison militaire n'a été interceptée, aucune photographie ni document n'est venu confirmer la prétendue implication de Tanger Med dans une quelconque opération à destination d'Israël. La justice espagnole, saisie dans une tentative maladroite d'internationaliser la rumeur, a rejeté la plainte déposée à Barcelone, faute de preuves. Et pourtant, l'onde de choc médiatique s'est propagée. Ce décalage entre l'absence de faits et la persistance du soupçon illustre la puissance du narratif lorsqu'il est savamment construit. Ce type d'offensive ne vise pas la vérité, mais la perception, et cherche à affaiblir la confiance dans les institutions économiques marocaines, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays.