Depuis plusieurs années, le Qatar mène une guerre médiatique insidieuse contre le Maroc. Plutôt que d'utiliser ses propres supports officiels comme Al Jazeera, le petit émirat s'appuie sur des plates-formes basées à l'étranger, notamment à Londres, afin de donner plus de crédibilité à ses attaques. Parmi ces instruments d'influence figurent Middle East Eye (MEE) et Middle East Monitor (MEMO), deux sites aux financements opaques mais dont les liens avec Doha ne font plus de doute. Ces relais dépeignent systématiquement le Maroc sous un jour négatif, qu'il s'agisse de sa politique étrangère, de ses réformes économiques ou de sa gestion sociale. L'angle choisi est toujours celui de la division et du mécontentement populaire, un schéma classique de la propagande qatarie. Deux petits cliques n'apprenait rien sur les entours de ces sites, sur leurs rédacteurs ni sur leurs soutiens, mais il est bien clair qu'ils ont ouvert leurs colonnes à des voix hostiles à Rabat. Depuis plusieurs années, le Qatar, micro-Etat aux ambitions géopolitiques disproportionnées, s'est forgé une réputation de maître dans l'art de l'influence médiatique. S'appuyant sur une myriade de relais disséminés dans le monde anglo-saxon, il mène une guerre de l'information insidieuse contre plusieurs pays, au premier rang desquels figure le Maroc. Loin d'agir de manière frontale à travers ses canaux officiels, Doha privilégie une approche plus subtile en exploitant des plates-formes d'apparence indépendante, souvent basées à Londres, pour façonner une perception biaisée du royaume chérifien. Cette stratégie illustre les mécanismes d'un antagonisme cognitif qui ne dit pas son nom. Un réseau médiatique tentaculaire au service d'une vision hégémonique L'offensive informationnelle du Qatar repose sur un triptyque bien rodé : financement occulte, relais idéologiques et amplification numérique. Contrairement aux médias d'Etat comme Al Jazeera, dont la ligne éditoriale peut être trop explicitement associée aux intérêts de Doha, des entités telles que Middle East Eye (MEE), Middle East Monitor (MEMO) et Al-Araby Al-Jadeed adoptent une posture d'objectivité feinte afin de toucher un public polyglotte plus large. Ces médias, ostensiblement indépendants, sont en réalité pilotés par des figures proches de la mouvance islamiste et des réseaux fréristes, bénéficiant d'un soutien financier massif en provenance de Doha. À titre d'exemple, MEMO est dirigé par Daud Abdullah, un ancien cadre du Muslim Council of Britain connu pour ses accointances avec les Frères musulmans. MEE, pour sa part, est fondé par David Hearst, un ancien journaliste du Guardian qui a fait du soutien aux positions qataries et islamistes un cheval de bataille. Quant à Al-Araby Al-Jadeed, il est dirigé par Azmi Bishara, intellectuel palestinien réfugié à Doha et conseiller officieux de l'émir du Qatar. Ce maillage médiatique permet au Qatar de mener des campagnes d'influence ciblées avec une efficacité redoutable. L'objectif ? Discréditer les puissances régionales qui entravent son projet hégémonique et affaiblir les Etats qui lui sont réfractaires en alimentant la contestation interne. Le Maroc, en raison de son positionnement stratégique et de ses alliances solides avec les Emirats arabes unis, l'Arabie saoudite et Israël, est devenu une cible privilégiée. Une croisade méthodique contre le Maroc L'analyse du traitement médiatique réservé au Maroc par ces organes révèle un parti pris systématique et une volonté manifeste de nuire à son image. Les attaques se déploient selon plusieurs axes bien définis : 1. La normalisation avec Israël : un levier de discorde interne L'une des armes rhétoriques favorites des médias financés par le Qatar consiste à exploiter la question palestinienne pour exacerber les tensions internes au Maroc. Depuis la signature de l'accord tripartite en décembre 2020, MEE et MEMO publient régulièrement et avec un rare acharnement des articles sur «une prétendue trahison du peuple marocain par son gouvernement», rédigés par des individus qui mènent des assauts réguliers contre le Maroc. Loin de se limiter à un traitement journalistique classique, ces plates-formes ourdissent une véritable campagne de désinformation, allant jusqu'à insinuer une rupture imminente entre le Palais et le peuple sur cette question. Les manifestations sporadiques contre la normalisation, bien que marginales et autorisées sans aucune contrainte, sont systématiquement amplifiées et mises en exergue. Le développement économique et urbain : une instrumentalisation du discours social Un autre angle d'attaque privilégié consiste à présenter le développement économique du Maroc comme une forme de dépossession des classes populaires au profit des élites et des investisseurs étrangers. À titre d'exemple, un récent article de MEE dénonçait les «coûts cachés» des projets touristiques marocains, accusant Rabat de sacrifier son patrimoine et son tissu social sur l'autel d'un néolibéralisme effréné. Ce narratif s'inscrit dans une stratégie plus large afin de saper la légitimité du modèle marocain en le dépeignant comme profondément inégalitaire. Or, ce discours est d'autant plus pernicieux qu'il est calibré pour résonner avec les franges contestataires de la société, en particulier la jeunesse et les mouvements altermondialistes ou islamistes radicaux. L'exploitation des tensions sociales et politiques Tout pays est confronté à des défis internes, mais dans le cas du Maroc, ces problématiques sont systématiquement dramatisées et détournés par les médias pro-Qatar. La question du Rif, les tensions autour de la liberté d'expression ou encore les critiques relatives aux droits de l'homme sont exploitées dans une optique de déstabilisation. Là encore, on observe un double standard flagrant : alors que Doha pratique une répression impitoyable contre ses propres dissidents, le Maroc est présenté comme un Etat «oppressif» dès qu'un journaliste soupçonné d'assauts diffamatoires et publiques est inquiété par la justice. Londres, épicentre d'une guerre cognitive mondiale Si la plupart de ces médias sont domiciliés à Londres, ce n'est pas un hasard. La capitale britannique constitue un carrefour stratégique pour les opérations d'influence en raison de la proximité de nombreuses organisations et de laboratoires d'idées influents. En opérant depuis le Royaume-Uni, MEE, MEMO et consorts bénéficient d'une visibilité accrue, leur permettant de toucher un public occidental et d'infiltrer le discours médiatique dominant. Le choix de Londres répond également à une logique de contournement diplomatique : en s'établissant hors du Qatar, ces médias échappent aux accusations directes de propagande étatique, ce qui leur confère une capacité de nuisance plus accentuée. Ce procédé est un cas d'école en matière de guerre cognitive où les attaques ne sont plus frontales mais se déploient par le biais d'acteurs supposément neutres. Le Maroc est appelé à ériger une véritable doctrine de contre-influence à travers des médias capables de porter sa voix et de contrer les narratifs hostiles. La guerre de l'information n'est plus une hypothèse théorique, mais une réalité tangible qui se joue chaque jour sur les écrans et dans les esprits. L'Algérie dénigre le Maroc presque quotidiennement et le Qatar a démontré qu'il pouvait attenter aux pays arabes sans jamais tirer un seul coup de feu. Pour le Maroc, la riposte doit être à la hauteur de l'attaque : lucide, stratégique et résolue.