Comme le digital, la taxe carbone est le nouveau sujet à la mode. Même si les enjeux de cet outil écologique sont louables dans ce contexte économique de risques extrêmes, certains experts demeurent sceptiques face aux avantages de cette alternative. Décryptage ! C'est le scope ! À partir du 1er octobre 2023, la taxe carbone aux frontières de l'Union européenne sera introduite dans le cadre d'une première étape transitoire et concernera les importations du fer et de l'acier, du ciment, de l'aluminium, des engrais, de l'électricité et de l'hydrogène. Grand partenaire de l'UE, le Maroc aurait-il des raisons de se soucier des répercussions de ce nouveau dispositif sur son industrie ? Dans une récente sortie lors d'une table ronde sur la décarbonation organisée par le confrère Finances News, le ministre de l'Industrie et du commerce, Ryad Mezzour, est formel : cette taxe carbone aux frontières de l'UE est une énorme opportunité pour le Maroc. Dans l'écosystème de l'énergie, les avis semblent partagés Alors que l'économie s'apprête à s'adapter aux réalités écologiques, certains acteurs semblent sceptiques sur le bien-fondé d'une compétitivité des exportateurs marocains avec l'émergence de la taxe carbone. Dans un billet sur LinkedIn, l'expert en énergie, Said Guemara, explique : « L'électricité représente la part majeure du bilan carbone d'une industrie, cette même électricité est dans les environs de 750 g CO2/kWh, l'une des plus carbonées au monde aux côtés de la Pologne, en raison de la production de plus de 68% de notre électricité à base de charbon. Par quelle magie allons-nous rivaliser avec des pays qui ont un facteur d'émission de moins de 450 g CO2/kWh ? » Lire aussi | La filiale marocaine du turc Karnawall, repreneur de Legler, ouvre son capital à quatre nouveaux investisseurs Et d'ajouter : « Le Mécanisme d'Ajustement Carbone aux Frontières sera appliqué de manière progressive par l'UE, qui se garde la possibilité de passer d'un scope à l'autre, et d'élargir aux secteurs qui seraient les plus menacés par la concurrence. Le cas de la Sonasid cité dans cet article est loin d'être représentatif de l'industrie exportatrice marocaine, avec 90% d'énergie renouvelable dans le cadre de la loi 13/09…et de plus, Sonasid n'exporte pas vers l'UE ! Ce n'est vraiment pas le meilleur exemple. Comment affirmer que l'industrie marocaine est sereine ? » Contacté par Challenge, le DG de la Sonasid Ismail Akaly nuance cette analyse. Selon lui, cette taxe carbone du Maroc est un dispositif d'homogénéisation avec les orientations de ses partenaires internationaux, notamment l'Union européenne. «Cela est une opportunité de pouvoir investir plus dans la décarbonation avec bien sûr l'aide de l'Etat et par conséquent produire des produits propres qui peuvent être exportables à destination de l'Europe. A mon avis c'est une opportunité à saisir», explique Akalay. «Cela est une opportunité de pouvoir investir plus dans la décarbonation avec bien sûr l'aide de l'Etat et par conséquent produire des produits propres qui peuvent être exportables à destination de l'Europe. A mon avis c'est une opportunité à saisir», explique-t-il. Policy Center : « La taxe carbone aux frontières de l'UE risque de faire plus de mal que de bien » Dans une note publiée en Juin 2021, le Policy Center explique que : « la taxe carbone aux frontières proposée par l'UE part d'une bonne intention, car elle est motivée par des préoccupations climatiques et non pas par le protectionnisme. Mais cette taxe repose sur l'hypothèse erronée d'une fuite de carbone et sa mise en œuvre pose de nombreuses difficultés pratiques. Qui plus est, telle que proposée, elle s'écarte du principe des responsabilités différenciées de l'accord de Paris, et sera contestée par les pays en développement. Lire aussi | Le rachat des actifs de Renault Commerce Maroc par Chakib Alj arrive au Conseil de la concurrence Les Etats-Unis ne sont pas non plus prêts à adopter une taxe carbone. L'OMC, déjà fragile, risque de subir un nouveau coup dur avec cette proposition de taxe. » Pour rappel, selon les experts, L'UE devrait plutôt revenir à l'esprit de l'Accord de Paris, en laissant aux pays pauvres la marge de manœuvre nécessaire pour réduire leurs émissions en fonction de leurs circonstances nationales. .