Le président algérien Abdelmadjid Tebboune et son ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf ont délibérément choisi de ne pas apparaître sur la photographie officielle du 38e sommet de l'Union africaine (UA), à Addis-Abeba, un geste décrit comme une prise de distance calculée à l'égard des autres chefs d'Etat africains. Cette absence s'inscrit dans une posture diplomatique ambiguë, oscillant entre un isolement progressif et une tentative d'influence sur les tendances institutionnelles du continent. Dans le même temps, Abdelmadjid Tebboune a annoncé, avant des votes décisifs, un versement polémique de un million de dollars au Mécanisme africain d'évaluation par les pairs (MAEP). Cette contribution, officiellement justifiée par un engagement en faveur de la gouvernance et de la transparence, s'inscrit dans une stratégie plus large de financement ciblé des instances africaines, permettant à Alger de peser sur certains arbitrages tout en se positionnant comme acteur incontournable au sein de l'UA. Un financement qui interroge sur les motivations algériennes Le MAEP, créé en 2003 sous l'égide de l'UA, repose sur un principe d'évaluation mutuelle des politiques publiques africaines en matière de gouvernance. Ce mécanisme a toutefois fait l'objet de critiques récurrentes, notamment en raison de son manque d'autonomie et de la faible application de ses recommandations. L'Algérie, qui peine à faire valoir sa vision au sein des grands ensembles économiques et politiques africains, privilégie souvent une approche financière peu effective pour garantir son influence. Cette injection de fonds intervient dans un contexte où Alger multiplie les engagements pécuniers à l'échelle régionale avec des retombées diplomatiques discutables mais des résultats concrets plus incertains. Des engagements similaires à celui accordé au MAEP ont été pris à l'égard de la Banque africaine de développement et du Fonds africain de solidarité, traduisant une volonté de positionnement stratégique à travers des contributions monétaires ciblées. Une marginalisation progressive sur la scène africaine L'absence de Tebboune et d'Attaf sur la photographie officielle reflète une réalité diplomatique plus profonde. Ces dernières années, l'Algérie a vu son rôle s'éroder face à la montée en puissance de nouveaux acteurs influents, notamment le Maroc et le Djibouti, qui disposent d'une diplomatie plus structurée et d'un réseau d'alliances plus dense. La crise du Sahel où Alger peine à imposer sa feuille de route sécuritaire ainsi que la normalisation accélérée des relations entre plusieurs Etats africains et Israël, ont fragilisé sa position devenue encore plus interventionniste. Dans ce contexte, le choix d'une représentation protocolaire amoindrie à Addis-Abeba n'apparaît pas comme un simple incident de calendrier, mais comme un symptôme d'un repositionnement hésitant. Plutôt que d'assumer une confrontation diplomatique directe, Alger semble privilégier des interventions ponctuelles, cherchant à exister par le levier financier plus que par une implication active dans les grandes décisions continentales, glissent les connaisseurs des arcanes africaines.