La garde à vue de Karim Tabbou s'inscrit dans un climat de répression accrue contre des militants, des opposants politiques et des journalistes à l'approche des législatives. L'opposant algérien Karim Tabbou, figure du mouvement pro-démocratie du Hirak, a été placé en garde à vue mercredi soir à Alger à la suite d'une plainte déposée par un officiel, a indiqué son avocat Me Ali Fellah Benali. Karim Tabbou, 47 ans, sera présenté jeudi devant un procureur, a précisé l'avocat, cité sur les réseaux sociaux. Il avait été convoqué mercredi au commissariat pour répondre d'une plainte déposée contre lui par Bouzid Lazhari, le président du Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH), un organisme officiel. Ce dernier avait été conspué par l'opposant lors des funérailles de l'avocat Ali Yahia Abdenour, vétéran du combat pour les droits humains en Algérie, lundi dans un cimetière algérois. Karim Tabbou, emprisonné de septembre 2019 à juillet 2020, est un visage très populaire de la contestation antirégime depuis le début du Hirak il y a plus de deux ans. Sa garde à vue s'inscrit dans un climat de répression accrue contre des militants, des opposants politiques et des journalistes à l'approche des élections législatives convoquées par un pouvoir impopulaire. Mardi, la police a empêché des étudiants de manifester comme chaque semaine à Alger, pour la première fois depuis la reprise fin février des marches du Hirak. Elle a procédé à des dizaines d'interpellations et à des perquisitions, selon le Comité national de libération des détenus (CNLD), une association qui vient en aide aux prisonniers d'opinion. La presque totalité des personnes interpellées a été ensuite relâchée. Domicile perquisitionné Mais un activiste connu, Kaddour Chouicha, responsable de la Ligue algérienne des droits de l'Homme (LADDH) à Oran, et son épouse Djamila Loukil, journaliste et militante, ont été arrêtés mercredi à leur sortie du tribunal où venait d'être reporté leur procès en appel dans une affaire remontant à 2020. Ils ont été libérés en début de soirée mais devront se présenter jeudi au commissariat central d'Oran (nord-ouest), a précisé le CNLD. Leur domicile a été perquisitionné et des ordinateurs et des téléphones saisis, a-t-on appris auprès de leur entourage. «Le domicile d'un autre militant arrêté, Hicham Khiyat, cofondateur de Nida-22, une initiative indépendante de dialogue au sein du Hirak, a également été perquisitionné mercredi à Blida, près d'Alger, et son ordinateur confisqué», a précisé le CNLD. Dans un communiqué publié mercredi, la LADDH a exprimé son inquiétude devant «l'escalade de la répression qui vise toutes les voix de l'opposition et du Hirak». Elle a exhorté le pouvoir à «l'arrêt immédiat du harcèlement et des arrestations arbitraires des militants pacifiques du Hirak, de la société politique, civile, et des journalistes». Selon les associations algériennes de soutien aux détenus d'opinion, quelque 65 personnes sont actuellement derrière les barreaux, poursuivies en lien avec le Hirak et/ou les libertés individuelles. Né en février 2019 du rejet massif d'un cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika, le Hirak réclame un changement radical du «système» politique en place depuis l'indépendance en 1962.