Xavier Bertrand était réduit à considérer que le fait de ne pas réaliser le grand chelem était le signe d'une défaite des socialistes et d'une victoire de la majorité. Lorsqu'en janvier 2009, Nicolas Sarkozy sort Xavier Bertrand du circuit ministériel et l'installe en grande pompe à la tête de l'UMP, la conviction du moment est que le président de la République visait deux objectifs stratégiques : le premier était de reprendre en main un parti qui commençait à montrer quelques signes de rébellion et d'indiscipline. Le second était de préparer le fougueux Xavier Bertrand qui poussait l'admiration qu'il avait pour Nicolas Sarkozy jusqu'à composer ses phrases avec la même musicalité hachée qui caractérise tant le verbe présidentiel. C'était la grande époque où tout le monde s'extasiait, les uns par jalousie morbide, les autres par admiration sincère, devant la fulgurante ascension de Xavier Bertrand. Avec cet argument imparable : pour que Nicolas Sarkozy, dont la méfiance était une seconde nature, confie les clefs d'une maison qui l'a fait roi à Xavier Bertrand, il fait vraiment que la confiance entre les deux hommes ait atteint une qualité rare. Et depuis Xavier Bertrand, un homme dont la rondeur inquiète plus qu'elle ne rassure et dont de solides mâchoires portent fièrement le péché de gourmandise, ce proche de Nicolas Sarkozy était censé préparer l'UMP aux prochaines batailles, organiser ce qui était resté comme le plus solide socle présidentiel à de nouvelles victoires, y compris la plus ultime, celle de conserver la plus prestigieuse demeure du faubourg Saint-Honoré, l'Elysée. Mais il ne fallait pas attendre longtemps pour constater que Xavier Bertrand ne parvenait pas à endosser le nouveau costume. Tout avait commencé par le constat de son incapacité à faire taire au sein de l'UMP les voix de plus en plus grinçantes qui s'opposaient ouvertement à de nombreuses réformes proposées par la gouvernance de Nicolas Sarkozy et même à critiquer publiquement la stratégie d'ouverture suivie par le président de la République. Il faut dire que dans cet exercice qui consiste à souffler sur la braise, Xavier Bertrand a dû composer avec l'irascible haine que lui porte un autre espoir de la droite, le patron du groupe parlementaire UMP, Jean-François Copé, prêt à tout pour lui faire le croche-pied dont il ne se relèvera pas. Et même lorsque Xavier Bertrand, qui fêtera ses 45 ans le 21 mars prochain, jour du second tour des régionales, avait tenté de trouver un créneau pour exister en critiquant violemment le Parti socialiste et son bilan, il s'est vite retrouvé dépassé par le porte-parole de l'UMP Fréderic Lefebvre, devenu la coqueluche des médias grâce à un style de communication nouveau qui allie culot et sans-gêne, le tout mâtiné d'une mauvaise foi qui épouse bien l'air du temps. Xavier Bertrand a donc failli à trouver une organisation efficace pour gagner ces élections régionales, bien surplombé par l'impopularité du président de la République et par des guerres intestines auxquelles la majorité présidentielle se livre depuis longtemps. Il en était réduit à considérer que le fait de ne pas réaliser le grand chelem était le signe d'une défaite des socialistes et d'une victoire de la majorité. Il n'est pas certain que, le concernant, Nicolas Sarkozy puisse se satisfaire d'un aussi maigre lot de consolations.