Il est vrai que depuis un certain temps, le débat sur l'identité nationale piloté par le ministre de l'Immigration commençait à patiner dans le vide. Le coup semblait mûrement préparé et fait partie de ces sorties de communication politique qui ne souffrent d'aucune once d'improvisation. Eric Besson, ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale vient de faire savoir qu'il a refusé d'accorder la nationalité française à un ressortissant étranger qui aurait imposé à son épouse française le port de la burqa. Selon des informations non officielles, ce ressortissant serait un Marocain membre du mouvement fondamentaliste «Tabligh» dont la dissémination de la piété et la conversion semblent être la principale préoccupation. Sitôt connue, la décision d'Eric Besson fait un grand bruit. Avant d'être validée par le Premier ministre François Fillon qui a déclaré qu'il allait signer le décret refusant d'accorder la nationalité à ce Marocain, l'affaire provoqua de nombreuses réactions, toutes aussi marquées les unes que les autres. Cette privation de nationalité intervient alors que le débat fait encore rage de savoir de quelle manière interdire radicalement la burqa sur le territoire de la République. Ceux qui militaient pour qu'une loi l'élimine définitivement ont bruyamment applaudi la décision d'Eric Besson estimant qu'il apporte une grande clarification dans ce débat. Ceux qui ont tout fait pour freiner les ardeurs à légiférer absolument sur un phénomène qui ne touche qu'une infime minorité mais qui peut avoir de fâcheuses conséquences sur tous les Français musulmans, ont stigmatisé cette instrumentalisation de la burqa par Eric Besson. Il est vrai que depuis un certain temps, le débat sur l'identité nationale piloté par le ministre de l'Immigration commençait à patiner dans le vide. Sans vraiment donner la preuve qu'il remplissait la mission pour laquelle il a été programmé, à savoir remobiliser l'ensemble des droites sur un projet jugé fédérateur, celui de l'identité et de la nation, ce débat commençait à devenir lourd à gérer pour la majorité présidentielle. La mauvaise humeur y était si vive que le Premier ministre François Fillon était obligé de reporter un colloque sur ce débat qu'Eric Besson aurait dû présider jeudi pour y présenter un rapport de synthèse et de le remplacer par un séminaire gouvernemental programmé à la hâte pour le lundi 8 février. Ce brusque changement de calendrier a été perçu par beaucoup comme le début d'un dessaisissement progressif d'Eric Besson de ce débat au profit de Matignon. Une sorte de discrédit jeté sur sa manière de le gérer et qui avait provoqué de béantes fissures au sein de la majorité. La crainte pour Eric Besson est qu'au cours de ce séminaire où les ministres auront libre parole, certains ne vont pas se gêner pour exprimer leur opposition à ce débat sur l'identité et à le mettre par conséquent en difficulté. Qu'Eric Besson, sentant le vent qui commençait à tourner, ait chevauché la thématique burqa-nationalité pour rester dans la course n'est pas un péché politique en soi. L'opportunisme et l'instrumentalisation sont une seconde nature chez de nombreux politiques. Il n'en prouve pas moins que la vraie finalité de ce débat, comme ses détracteurs n'ont cessé de le répéter depuis le début, n'est pas de réfléchir ensemble sur les contours de l'identité française, mais plutôt de concentrer le feu de la critique sur les immigrés.