Nicolas Sarkozy a administré à ses fidèles comme à ses détracteurs une formidable leçon d'engagement physique et d'opportunisme politique. Ceux qui s'aventurent à imaginer le président Nicolas Sarkozy en vacances l'imaginent rarement en train de subir des bains de soleil dans des postions lentes et langoureuses ni de savourer sereinement les délicieuses farnientes qu'offre le repos estival. Le préjugé le plus établi est de décrire l'image d'un président en plein mouvement. Quand il ne mouille pas ostensiblement son tee-shirt dans un jogging endiablé et télévisé, Nicolas Sarkozy est le genre de vacanciers à faire tomber les parasols par des mouvements de genoux incontrôlé après avoir laissé choir son téléphone portable dans le bac à glace et du Coca Light sur les journaux du matin. Ainsi donc se déroule l'image du président de la République. Tellement mouvant que le candidat démocrate à la Maison-Blanche Barack Obama n'a pas pu s'empêcher d'exprimer publiquement son admiration devant tant d'énergie et lui demander le secret de son régime alimentaire pour avoir une telle force de mouvement. Barack Obama accompagnait son compliment avec un claquement de doigt qui en dit long sur la profondeur et la sincérité de l'admiration. Il faut dire que rien que pour le mois écoulé, Nicolas Sarkozy a administré à ses fidèles comme à ses détracteurs une formidable leçon d'engagement physique et d'opportunisme politique. Alors qu'il se trouvait au creux de la vague, ce mois de reconquête avait débuté par la libération aussi miraculeuse qu'inattendue d'Ingrid Betancourt. Nicolas Sarkozy se saisit de ce cadeau du ciel pour le conjuguer à toutes les sauces de la communication politique. Des images tactiles au Bourget aux effusions mises en scène à L' Elysée, le Sarko show venait de débuter. Il se poursuivra sans relâche et avec la même intensité avec le sommet de l'Union pour la Méditerranée avec la présence côte-à-côté du président syrien Bachar El Assad et du Premier ministre israélien Ehud Olmert. Même si ce dernier vient de jeter l'éponge pour cause pressions politico-judiciaires, l'image était assez inédite à mettre directement dans l'escarcelle de Nicolas Sarkozy. Le feu d'artifice se termine par le vote sur le fil du rasoir de la reforme des instituions au Congrès de Versailles. Nicolas Sarkozy a su paraître bouger plus vite que la musique parce qu'en face de lui se trouvaient deux forces paralysées par leur propres inerties. La première se trouve dans le camp gouvernemental dont la sciatique carabinée du Premier ministre François Fillon illustre à elle seule la vitesse du mouvement et de création. Le tableau ne serait complet que si l'on rajoute à ce bilan les conflits et les compétitions entre ministres comme l'amicale ambiance qui règne entre des femmes comme, à titre d'exemple, Christine Boutin ministre de la ville, Fadela Amara secrétaire d'Etat à la banlieue ou Nadine Morano à la famille, ou alors entre Bernard Kouchner aux Affaires étrangères et Rama Yade au droits de l'Homme ou encore entre Rachida Dati à la Justice et Roger Karoutchi aux relations avec le Parlement. Ces querelles de clochers et d'intérêts rendent encore plus centrales la parole et la décision présidentielle. L'autre force se trouve dans le camp de l'opposition menée par le Parti socialiste. Structurellement miné par une incurable guerre de leadership, le Parti socialiste donne l'impression de défendre le surplace laissant à Nicolas Sarkozy l'initiative de la réforme et du mouvement. Les socialistes, à l'image du député Pierres Moscovici continuent de dresser un implacable constat du bilan de Nicolas Sarkozy : «Je maintiens que Nicolas Sarkozy est le liquidateur d'une certaine forme de conception de la République, liquidateur d'une tradition de politique étrangère en France basée sur l'indépendance nationale, liquidateur aussi de notre modèle social (…) il y a eu trop de réformes, elles ont été mal pensées, on n'a pas la vision, et en plus on a plutôt cassé le modèle social qu'on a cherché à réparer la France ou à redonner confiance». Nicolas Sarkozy pourra toujours arguer qu'engager, des reformes importantes comme la carte judiciaire ou la carte militaire sont désormais inévitables. La stratégie du président de la République est ainsi décrite par le porte-parole du gouvernement Luc Chatel : «Nicolas Sarkozy a mis en place une méthode. Elle consiste à afficher ses convictions, assumer ses idées, puis préparer l'opinion à ce qui va être décidé. Une fois la décision prise, il faut faire la pédagogie de la réforme, « le service après- vote».