Deux kamikazes qui s'apprêtaient à recevoir des instructions d'Al-Qaïda via Internet ont été contraints de changer de plan après une altercation avec le propriétaire d'un cybercafé. L'un d'eux s'est fait exploser sur place et le deuxième a été arrêté par la police. Casablanca l'a échappé belle ce dimanche 11 mars 2007 dans la soirée. Les plans de Abdelfettah Raydi (23 ans) et Youssef Khoudri (18 ans) ont tourné court suite à une altercation avec le responsable d'un cybercafé à Sidi Moumen. Abdelfettah Raydi, condamné à cinq ans de prison qu'il purgeait avant de bénéficier d'une mesure de grâce royale en 2005, a fait actionner sa charge explosive pour mourir sur le champ. Youssef Khoudri, son acolyte, a abandonné la sienne pour prendre la fuite. Tout avait commencé quand les deux kamikazes, munis de ceintures explosives, s'étaient présentés, vers 21h 45, dans un cybercafé du quartier «Al Adarissa» à Sidi Moumen pour consulter des sites jihadistes ou recevoir de nouvelles instructions. Le gérant, Mohamed Faïz (28 ans), est d'un avis contraire et prétexte d'une fermeture imminente des lieux surtout que les deux individus s'étaient connectés à un site du Jihad. Une altercation a lieu entre les trois protagonistes surtout quand l'un des deux kamikazes, en colère, s'en prend à un clavier qu'il malmène. Mohamed Faïz tente de baisser le rideau du cybercafé et s'apprête à appeler la police. M.L, lycéen présent sur les lieux, affirme que l'un des deux kamikazes s'était alors dirigé vers la deuxième pièce du cybercafé où il avait actionné sa charge explosive dont la déflagration l'a déchiqueté. «Il voulait faire le plus de dégâts humains vu que cette pièce était occupée par au moins quatre jeunes clients», déclare le rescapé à ALM. La déflagration est tellement forte qu'elle vient à bout de la devanture du cybercafé et endommage une voiture stationnée à proximité, celle du propriétaire des lieux qui réside d'ailleurs à l'étage. Le deuxième kamikaze, qui s'en tire avec des légères blessures, prend la fuite après s'être débarrassé de la charge explosive qu'il transportait. Il sera arrêté, quelques kilomètres plus loin, à Sidi Othmane par les éléments d'un PPP (poste de police de proximité). Parmi les jeunes clients du cybercafé (24 et 25 ans), présents au moment de l'explosion, M.K s'en sortira avec de graves blessures au niveau d'un œil, alors qu'un autre, M.L a été gravement atteint au visage. Ils reçoivent toujours des soins à l'Hôpital Mohammed V. Selon des sources informées, les deux kamikazes, vêtus de jeans et de blousons, mais sans barbes «trop voyantes», n'habitaient pas le quartier. Selon toute vraisemblance, ils se seraient rendus dans ce cybercafé de Sidi Moumen pour recevoir les dernières directives pour une opération terroriste qui devait viser d'autres cibles dans la capitale économique. L'une des hypothèses les plus avancées est celle de lieux publics accueillant un grand public surtout par une nuit dominicale. Les deux kamikazes, selon divers témoignages, auraient entretenu des relations avec Saâd Houssaïni, le présumé terroriste recherché depuis 2002 et arrêté mardi dernier dans un cybercafé près de Sidi Maârouf. Il faut également signaler que le choix de la date n'est pas fortuit puisqu'elle coïncide avec celle des attentats de Madrid en 2004. La police scientifique, présente en force sur les lieux de l'attentat, s'active à déterminer la nature des explosifs utilisés même si des sources sécuritaires avancent que les deux bombes étaient du genre traditionnel muni d'un détonateur relié à une matière explosive mélangée avec des clous et des billes en acier. L'enquête qui a été diligentée par les services de sécurité s'attachera à déterminer l'appartenance des deux kamikazes et les commanditaires de l'opération. Les enquêteurs auront la tâche facile surtout qu'ils auront sous la main le deuxième terroriste qui sera interrogé une fois remis de ses blessures. Ce dernier a été admis, hier, à l'hôpital Ibn Rochd. • Khadija Skalli mailto:[email protected] et Mohammed Boudarham mailto:[email protected] Benabdallah : «Le danger est toujours là» Dans une déclaration à ALM, le ministre de la Communication porte-parole du gouvernement, Nabil Benabdallah, a indiqué que «ce qui s'est passé est un acte odieux, criminel et qui appelle une condamnation ferme et sans appel. Il y a là la preuve que le Maroc est un pays menacé par le terrorisme». Pour le porte-parole du gouvernement, ce qui s'est passé depuis les attentats de 2003 démontre, à travers le démantèlement d'un certain nombre de cellules terroristes, que le danger est toujours là. «Les autorités marocaines ont compris que le niveau de danger était devenu élevé ces dernières semaines. C'est pour cela que les mesures de sécurité ont été renforcées et annoncées. Après l'évènement de Sidi Moumen qui, fort heureusement, n'a pas eu d'incidence meurtrière et destructrice importante et qui était visiblement destiné à une autre cible, il y a lieu de maintenir la mobilisation et le même degré de vigilance aussi bien de la part des autorités, qui ont encore une fois prouvé leur compétence en procédant très vite à l'arrestation du deuxième terroriste fuyard, que de la part des citoyens dans le cadre d'une démarche citoyenne et participative. Mais il y a lieu de dire également que le Maroc continuera avec détermination l'édification d'une société de progrès, de démocratie, de modernité et de justice sociale», a indiqué M. Benabdallah.