Pour Hamid Abied, chef du laboratoire de police scientifique, le Maroc n'a rien à envier aux autres pays développés en matière de police scientifique. ALM : Quelle place la science prend-elle lors d'une investigation policière ? Hamid Abied : Il est évident aujourd'hui que la science occupe une place importante pour élucider une affaire criminelle ou civile. Notre monde connaît depuis quelques siècles une explosion technologique. Le domaine de la criminalité n'a pas échappé à cette évolution. La police et la justice doivent donc suivre le mouvement. Notre rôle consiste à asseoir la vérité juridique sur une base scientifique. Les techniques scientifiques n'ont cessé de s'accroître aussi bien en biologie qu'en physique ou en chimie. Le laboratoire de police scientifique dispose d'un arsenal d'équipements lui permettant d'accomplir sa mission avec efficacité. Il n'a rien à envier aux autres laboratoires de France ou d'autres pays. Certains de nos appareils sont les mêmes que ceux utilisés par le FBI. Combien d'affaires le laboratoire de police scientifique a-t-il traité depuis sa création ? Depuis sa création en décembre 1995, le laboratoire de police scientifique a traité 4581 affaires. En 1996, le nombre des dossiers traités dans les trois services ne dépassait pas 88. Cette année, ce chiffre a atteint près de 700 affaires. Cette évolution s'explique par l'intérêt que portent la police et les magistrats aux rapports scientifiques dans les enquêtes. Lors des attentats du 16 mai 2003, on a fait appel à vos services. Des experts français sont également venus offrir leur aide. Nos experts ne sont-ils pas aussi performants ? L'arrivée des experts français au Maroc afin de nous assister s'inscrit uniquement dans le cadre de coopération entre les deux pays. Nos experts scientifiques sont des universitaires titulaires de doctorats. Ils ont étudié dans des universités françaises. Grâce à leurs compétences, nous avons réussi, trois heures après les attentats, à identifier les produits explosifs utilisés par les terroristes. Ce produit appelé TATP a été utilisé pour la première fois au Maroc. Le Maroc dispose-t-il d'autres laboratoires scientifiques de police dans les autres régions ? Non ! Le seul laboratoire de police scientifique est celui de Casablanca. Il y a un laboratoire technique à Rabat, mais il s'occupe d'autres affaires relatives aux faux documents. Les tests de paternité sont-ils payants ? Les tests de paternité sont très coûteux. C'est pourquoi, le citoyen paie une somme symbolique, près de la moitié de la valeur. C'est le tribunal qui détermine le montant. Il varie entre 2000 et 4000 DH. Quelles sont les perspectives d'avenir pour le laboratoire ? Il faut toujours suivre l'évolution scientifique. Pour compléter l'arsenal technique du laboratoire, nous prévoyons de développer la technique d'identification par analyse de l'ADN mitochondrial. Les demandes de profils génétiques augmentent chaque année, c'est pourquoi on prévoit également de mettre en place une deuxième chaîne d'analyse génétique. La formation continue du personnel est au programme. Qui est Hamid Abied ? Commissaire de police divisionnaire, Hamid Abied est un passionné de physique et de chimie. Après avoir décroché un baccalauréat option « sciences expérimentales », ce natif de Casablanca en 1960 a poursuivi ses études supérieures en physique et en chimie dans une université française. Hamid Abied obtient son DEA en physique-chimie, spécialité polymères, puis un doctorat dans la même branche. En 1987, pour son post-doctorat, il s'intéresse de près à l'étude des fibres textiles (PVC). Trois ans plus tard, il intègre le corps de la Sûreté nationale en tant que commissaire de police. Lors de la création du laboratoire scientifique de police en décembre 1995, il occupe le poste de chef du service physique. En mars 2005, il est nommé chef du laboratoire. Cette année, le commissaire Abied a été promu au grade de commissaire divisionnaire. Ses 16 ans de carrière dans la police nationale sont jalonnés de missions d'exceptions, dont la plus remarquable demeure l'identification des victimes des attentats du 16 mais 2003.