Alors que le nombre de pays qui réprouvent la guerre contre le Liban ne cesse d'augmenter, le cabinet restreint israélien envisage de l'amplifier. Au 20ème jour de l'agression israélienne contre le Liban, un cabinet restreint devait discuter d'une éventuelle amplification des opérations terrestres contre le Hezbollah et des dizaines de milliers de réservistes étaient à l'entraînement. Au cours du week-end dernier, le Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, avait, dans ce sens, confié à Condoleezza Rice que l'armée israélienne avait encore besoin de 10 à 14 jours pour mener à bien ses objectifs. Pour sa part, le ministre israélien de la Défense, Amir Peretz, a indiqué lundi devant la Knesset (Parlement) qu'Israël ne pourrait pas accepter un cessez-le-feu immédiat, ajoutant que l'armée israélienne pourrait étendre son offensive contre le Hezbollah. Washington semble néanmoins commencer à s'impatienter. A preuve, c'est le département d'Etat américain qui a annoncé la suspension des raids aériens israéliens pour 48 heures et c'est la secrétaire d'Etat américaine aui a souhaité, lundi, que le Conseil de sécurité des Nations unies adopte cette semaine une résolution sur le Liban permettant un cessez-le-feu associé à un "règlement durable" du conflit. Les Etats-Unis refusent cependant toujours un cessez-le-feu immédiat, réclamé par de nombreux pays. Est-ce cela qui a encouragé l'aviation israélienne à intervenir lundi pour soutenir les troupes au sol, engagées dans d'âpres combats avec le Hezbollah pour le contrôle d'une colline libanaise près de la frontière ? Dépassée par l'ampleur de la résistance libanaise et toujours soucieuse d'épargner la vie de ses hommes, Tsahal continue, en effet, à privilégier la méthode du pilonnage aérien. Résultat : ce sont d'abord les civils qui meurent par centaines et c'est le Liban qui continue à souffrir le martyre. Depuis le 12 juillet, il est à feu et à sang et il ne se passe pas un jour sans que la liste des victimes ne s'allonge de quelques dizaines de personnes, toutes civiles. En vingt jours, l'armée israélienne a, en effet, ravagé le pays, démoli ses infrastructures, assassiné ses femmes, ses vieillards et ses enfants, mais elle n'a tué que fort peu de militants du Hezbollah. A croire que la guerre qu'elle mène vise des objectifs autres que ceux qu'elle déclare officiellement. Selon des observateurs, cette nouvelle agression contre le Liban rappelle l'une des phases d'un plan stratégique élaboré en 1996 par l'extrême droite américaine et exposée dans le document intitulé «A Clean Break» (une rupture nette), soumis au Premier ministre israélien d'alors; en l'occurrence Benjamin Netanyahu. Cette stratégie visait à rompre avec le processus de paix d'Oslo et de fournir à Israël la possibilité d'étendre, une fois pour toute, son empire loin au-delà de ses frontières. Le document parlait déjà du changement de régime en Irak comme but stratégique important pour Israël. C'est désormais chose faite. Dans la phase II du plan, sont visés le Liban, la Syrie et l'Iran. Il s'agissait de chasser la Syrie du Liban. C'est aussi chose faite. Ensuite, dit le document, Israël pourra compter sur l'approbation américaine quand il « attaquera le Hezbollah le long de sa frontière nord et désignerait ensuite la Syrie et l'Iran comme les véritables responsables ». C'est ce qui se passe actuellement. A part la mort et la désolation, vers où pareille aventure peut-elle mener. Au vu des enseignements de l'histoire récente, on peut présager d'ores et déjà un renforcement du sentiment anti-israélien au sein du monde arabe et d'une montée des radicalismes dans la région. C'est en effet Israël qui a créé ses pires ennemis. N'est-ce pas sa politique qui a induit l'émergence du Hamas et son occupation du Liban qui a conduit vers le renforcement du Hezbollah ? Les terribles bombardements en cours auront probablement des résultats similaires. Entre autres victimes qu'ils feront : la paix figure en bonne place. Des villageois fuient en masse le Sud-Liban A la faveur de la suspension des raids aériens israéliens, les villageois ont quitté massivement lundi le Sud-Liban à bord de voitures, de cars ou de 4x4 arborant des drapeaux blancs. Les civils rejoignent le port de Tyr, à 20 km au nord de la frontière avec Israël. D'autres font le chemin inverse, pour voir si leur maison a souffert des bombardements ou venir en aide à des proches. Beaucoup de civils libanais sont encore piégés dans leurs villages, trop pauvres pour payer le transport jusqu'à Tyr ou trop effrayés à l'idée d'être pris pour cibles sur la route. Deux convois humanitaires des Nations unies ont quitté lundi Beyrouth pour Tyr et Cana. L'Onu espère pouvoir envoyer ce mardi un troisième convoi à Bint Jbeil, bastion du Hezbollah et théâtre, la semaine dernière d'affrontements violents entre miliciens chiites et soldats israéliens. Plusieurs avions d'aide humanitaire ont atterri lundi à Beyrouth. Deux avions égyptiens ont apporté du matériel pour un hôpital de campagne. Deux avions des Emirats arabes unis, un appareil venu de France et un avion jordanien ont également acheminé de l'aide pour la population civile. Des secouristes ont commencé lundi à dégager les cadavres des décombres dans trois localités du Sud-Liban, où 25 corps avaient été retirés en milieu d'après-midi.