Le 25 juin 2003, le « Constanta », un navire de guerre battant pavillon roumain, embarquait une centaine d'artistes, écrivains et journalistes pour une croisière à travers plusieurs pays méditerranéens. Objectif : délivrer, de port en port, un message de paix. ALM a été de ce périple, il veut bien le partager avec ses lecteurs. Ni le violent tremblement de terre de 1979, ni la poigne de fer avec laquelle le dictateur Milosevic gouvernait cette région de l'ex-Yougoslavie, et moins encore la chape de plomb communiste, pour ne pas dire stalinienne, qui s'y était abattue n'eurent entamé la magie légendaire de Kotor. 22 ans après le tragique séisme, Kotor, la plus belle ville du Monténégro, offrait, en ce mémorable 16 juillet 2003 de notre escale, le visage d'un petit «paradis terrestre». Les eaux turquoise de sa côte venaient flatter le regard, et la brise marine qu'elles dégageaient, les narines des visiteurs ; une magie qui n'avait d'égale que ces cimes magistrales qui semblaient toiser, dans un geste de défi, un ciel lointain et pourtant proche. Située au pied de ces hauteurs magistrales, Kotor paraissait se prosterner contre le don que lui fit la nature. Le génie des hommes venait ajouter sa griffe à ce décor ensorceleur, à travers une architecture qui laisse bouche-bée. Protégée par des remparts imposants, la ville qui, au lendemain du séisme, fut inscrite par l'Unesco sur la liste du patrimoine universel de l'humanité, nous fit l'impression d'être face à un musée à ciel ouvert. Généreusement, Kotor étalait ses richesses, devant le regard émerveillé de milliers de visiteurs : une tour d'horloge, dont la construction remonterait au 12ème siècle ; de nombreux palais, dont celui de Drago avec ses fenêtres gothiques du 15ème siècle ; le palais de Pima, avec ses formes baroques du 14ème siècle ; le palais de Grgurina (17ème siècle), qui contient le Musée naval… Que faut-il ajouter à cette collection de bijoux architecturaux ? Napoléon eût-il atteint ce petit îlot paradisiaque, Kotor ? Mais si, en témoigne le théâtre Napoléon que l'empereur y laissa. Une perle digne de figurer sur la liste des sept merveilles du monde : pyramides d'Egypte, phare d'Alexandrie, jardins de Babylone, temple de Diane à Ephèse, tombeau de Mausole, statue de Zeus de Phidias, colosse de Rhodes. Héritant de trésors historiques époustouflants, les habitants de Kotor ont également hérité d'une grande tradition culturelle. Notre séjour à Kotor coïncida avec la tenue d'un grand carnaval, lequel rappelait ces Bacchanales, fêtes que les anciens Romains célébraient en l'honneur de Bacchus, avec danses, jeux et mystères d'initiés. Les «Kotorois» ont-ils hérité ces orgies des Romains? Une chose est sûre : les Romains avaient imprimé leur marque non seulement sur les édifices qu'ils léguèrent à Kotor, mais aussi à travers le mode de vie d'une population acquise à la fête. Les «Kotorois» firent également preuve d'un remarquable esprit d'ouverture, à preuve leur grande soif de communication. Vendeurs de souvenirs, restaurateurs, cafetiers, ou simples piétons, vous regardent avec des yeux souriants, quand ils ne vous invitent carrément pas à partager une discussion, autour d'une tasse de café. Ce ne fut d'ailleurs pas un hasard si Kotor fit partie du périple méditerranéen du «Constanta» ; à l'instar des Méditerranéens, la population de Kotor incarna bel et bien cette chaleur humaine typique aux habitants de la mare nostrum. La seule différence que nous pûmes relever, elle reste d'ordre génétique. Les habitants de Kotor, hommes et femmes, ont des formes écharpées, avec ceci de plus que, à la différence des Méditerranéens, le teint de leurs yeux est bleu. Pour résumer, de notre escale à Kotor, on n'est pas sorti indemne, tellement la beauté de cette cité nous impressionna. Dire combien nous aurions aimé y rester quelques jours de plus. Mais, il y avait encore d'autres escales qui nous attendaient. Le 17 juillet, le «Constanta» quitta Kotor pour «Saranda» (Albanie).