Elaboré par le département de Mustapha Mansouri, le projet de loi organique relatif au droit de grève se veut un moyen de réglementer un droit fondamental synonyme au Maroc au droit à l'anarchie. Le projet date de plusieurs années, mais il fallait attendre l'arrivée de Mustapha Mansouri à la tête du ministère de l'Emploi pour que le dossier soit réactivé, sans pour autant être adopté. Et pour cause, la résistance dont sa discussion a fait l'objet de la part des syndicats. En attendant que ces derniers changent de position, le projet mérite que l'on s'y arrête. Bénéficiant de l'appui du Bureau international du Travail (BIT), ce projet de loi, qui constitue une base pour le dialogue et un document de travail, a été initié en vue de former une base vers l'élaboration d'un projet contractuel auquel participent toutes les parties et qui prend en considération les intérêts des employeurs et des employés. La philosophie du texte stipule qu'une grève ne peut valablement être déclenchée que pour obtenir la satisfaction de revendications d'ordre professionnel. Insistant sur la nécessité d'annoncer la tenue de la grève au moins une semaine à dix jours avant sa tenue, ce projet offre en face bien de droits aux salariés. Exemple en est que l'employeur est interdit de punir, par voie de licenciement ou autre, une personne ayant pris part à une grève autorisée. L'employeur ne peut ni remplacer les employés en grève ni transférer, totalement ou partiellement, les activités de la société, lors de la grève. Mais il n'est pas interdit à l'employeur, en cas de grève, de s'organiser pour assurer la continuité de l'activité : modification des fonctions de salariés non-grévistes, sous réserve de leur accord.Le projet permet aussi aux différentes parties de saisir la justice pour qu'elle désigne un auxiliaire de justice chargé de suivre le déroulement de la grève, laissant à l'employeur le droit de prendre les dispositions nécessaires pour éviter des actes de violence contre son entreprise, à condition que ces mesures soient préventives. Le comportement abusif des grévistes pendant une grève n'a pas pour effet de rendre le mouvement de grève illicite mais des mesures répressives sont envisageables si des violations sont constatées. Le salarié qui a participé à un abus dans l'exercice du droit de grève peut faire l'objet de sanctions et même d'un licenciement pour faute grave. La faute grave est alors caractérisée par l'intention du salarié de nuire à l'entreprise. Elle suppose la participation personnelle du salarié aux faits qui lui sont reprochés. Un point sur lequel le ministère de tutelle se dit ouvert au dialogue. C'est dire que pour préserver un droit, il faut commencer par l'organiser. En attendant, et d'un droit inaliénable de tout ouvrier, la grève s'est transformée en boulet, grevant bien de machines.