Présenté récemment au Premier ministre, le projet de loi organique devant réglementer le droit de grève se veut un moyen de mettre fin à l'anarchie qui accompagne bien des fois l'exercice de ce droit. Détails. Le projet de loi devant réglementer le droit de grève atterrit au bureau du Premier ministre. Elaboré il y a quelque temps au sein du ministère de l'Emploi et de la Formation professionnelle, ce texte avait auparavant été présenté aux différentes parties concernées, patronat et centrales syndicales. Applaudi par les uns, non sans quelques réserves, notamment de la part de la CGEM, mais aussi du Bureau international du Travail (BIT), ce projet de loi n'en a pas moins été chahuté par d'autres, notamment l'Union marocaine du Travail (UMT), qui lui avait opposé une fin de non-recevoir. Une position jugée dogmatique et non pragmatique par le ministre chargé du dossier, Mustapha Mansouri. Toujours est-il que le texte constitue une avancée majeure en matière de réglementation d'un droit garanti par la Constitution, mais dont l'application peut parfois s'avérer anarchique, pénalisant entreprises et employés. Ce qui avait fait dire au ministre que ce projet de loi se veut une base « vers l'élaboration d'un projet contractuel auquel participent toutes les parties et qui prend en considération les intérêts des entreprises et des employés». De manière générale, ce projet de loi stipule qu'une grève ne peut valablement être déclenchée que pour obtenir la satisfaction de revendications d'ordre professionnel, allant des conditions du travail à la stratégie de l'entreprise, en passant par la protection de l'emploi, la défense des droits collectifs et la rémunération. Ce projet définit les responsabilités des différentes parties ainsi que les mesures à prendre quand des violations de ces dispositions sont constatées. Il interdit de punir ou de résilier le contrat de travail de toute personne ayant pris part à une grève autorisée. Insistant sur la préavis de grève, le texte interdit également à l'employeur de prendre des mesures pour avorter une grève, d'employer de nouvelles personnes à la place des employés en grève- ce qui a suscité bien des réserves côté CGEM- et de transférer, totalement ou partiellement, les activités de la société, lors de la grève. Mais il n'est pas interdit à l'employeur, en cas de grève, d'organiser l'entreprise pour assurer la continuité de l'activité : modification des fonctions de salariés non grévistes, sous réserve de leur accord, participation de bénévoles. Le projet permet aussi aux différentes parties de saisir la justice pour qu'elle désigne un auxiliaire de justice chargé de suivre le déroulement de la grève, laissant à l'employeur le droit de prendre les dispositions nécessaires pour éviter des actes de violence contre son entreprise, à condition que ces mesures soient préventives. D'un autre côté, les conséquences de l'abus du droit de grève seront contenues dans cette loi. Le salarié qui a participé à un abus dans l'exercice du droit de grève peut faire l'objet de sanction et même d'un licenciement pour faute lourde. La faute lourde est alors caractérisée par l'intention du salarié de nuire à l'employeur ou à l'entreprise. Elle suppose que le salarié a participé aux faits qui lui sont reprochés. Mais le comportement abusif des grévistes n'a pas pour effet de rendre le mouvement de grève illicite. Le projet qui interdit aux grévistes d'investir le lieu de travail, -si cet acte porte atteinte à la liberté du travail ou peut mener à des actes de violence- préconise la prise de mesures répressives si des violations sont constatées. Faisant partie de ce grand package qu'a été le dialogue social, comprenant le code du travail, les salaires, le régime des retraites, l'assurance maladie obligatoire, ce projet donne suite à un autre élaboré auparavant mais qui avait été rejeté par l'ensemble des centrales syndicales. Ces dernières ne manqueront pas d'animer le débat autour de la présente mouture. Ce sera au Parlement.