Ahmed Assid est activiste au «Mouvement amazigh» et chercheur à l'Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCA). Il dénonce la barbarie des attentats et appelle à la séparation de l'Etat et de la religion pour éviter le terrorisme à l'avenir . ALM : Pourquoi ce sit-in du mouvement amazigh ? Ahmed Assid : Ce sit-in est spontané. Il a été initié par les composantes du mouvement amazigh. Et ce afin de dénoncer les opérations terroristes de Casablanca. Dans le mouvement amazigh, nous n'avons pas cessé de proclamer notre laïcité. Je dis bien que nous sommes un mouvement laïc au sens strict du mot. Et en tant que mouvement laïc, nous avons depuis toujours considéré que la non-réforme de l'enseignement allait produire des monstruosités de cette nature. Parce que tout se rapporte à l'éducation. Si cette éducation encourage l'exclusion et le rejet des différences, elle peut donner corps au terrorisme. En revanche, si l'éducation repose sur le relativisme, la pensée libre, elle va nous donner des citoyens. En plus de la réforme de l'éducation, que préconise votre mouvement contre le terrorisme ? Nous sommes descendus dans la rue pour dénoncer les actes abominables de Casablanca, mais également pour attirer l'attention de l'Etat sur la nécessité de réfléchir à une Constitution laïque. C'est-à-dire à réformer la Constitution actuelle en séparant l'Etat de la religion. Cette séparation doit être franche, sans demi-mesure ! Les affaires cultuelles sont une chose et la gouvernance en est une autre. Nous appelons aussi à la démocratisation de l'enseignement et des organes de presse. Vous ne pensez pas aller trop vite ? Je pars de la réalité historique du Maroc. Au mouvement amazigh, nous considérons que toutes les maladies qui ont rendu le terrain propice à l'émergence du terrorisme viennent de l'Orient. C'est une position fondamentale dans le mouvement amazigh. Le terrorisme ne nous vient pas de l'Occident, mais de l'Orient ! Les attitudes terroristes sont des corps avariés que l'Orient nous exporte. Et c'est pour cela que nous appelons le Maroc à jouer son rôle civilisateur de passerelle entre L'Europe et l'Afrique. Il a, d'ailleurs depuis toujours, joué ce rôle dans le bassin méditerranéen. On doit continuer de donner l'exemple d'un pays ouvert à la pluralité des cultures, des civilisations, des races et des langues. Et j'espère que l'on saura tirer les leçons de la barbarie qui a frappé Casablanca pour comprendre qu'il faut opposer au terrorisme l'ouverture à l'autre et la démocratisation de l'enseignement. Ne pensez-vous pas vouloir récupérer politiquement les actes des terroristes ? Pas du tout ! Nous avons depuis toujours dit et crié que l'arabisation totale est la porte grande ouverte pour le terrorisme et les intégrismes. Et nous considérons que le pluralisme linguistique et culturel fait naître une pensée tolérante et ouverte à la différence de l'autre. Le danger de la pensée unique, c'est qu'elle considère comme non valable tout ce qui ne concorde pas avec ses vues. Et c'est pour cela que, dans le mouvement amazigh, nous n'avons pas peur de dire que nous sommes un mouvement laïc. Alors que les autres partis et mouvements politiques fuient ce mot quand bien même leur comportement dans la vie serait laïc.