Nommé samedi chef du nouveau gouvernement turc, l'islamiste modéré Abdullah Gül ne pourrait rester que le temps de permettre au leader de l'AKP, Tayyip Erdogan, de faire son retour. Combien de temps Abdullah Gül va-t-il resté à la tête du nouveau gouvernement turc qu'il a la charge de former ? C'est ce que beaucoup d'observateurs se sont demandés samedi à l'annonce de la nomination de cet économiste de formation. Il avait été dès la proclamation de la victoire électorale de son parti, l'AKP, pressenti pour succéder au grand perdant des législatives du 3 novembre, Bulent Ecevit. Le parti de l'ex-premier ministre, celui de la Gauche démocratique (DSP) étant désormais absent du nouveau Parlement. Reste que M. Gül semble n'être là que pour assurer l'arrivée de son leader : Recep Tayyip Erdogan. Ce dernier, chef de file du parti islamiste modéré avait été jugé inéligible en 1999 pour « incitation à la haine religieuse » et ne pouvait donc prétendre prendre la tête du nouvel exécutif malgré l'écrasante victoire de son parti (34 % des voix). Beaucoup s'attendaient donc samedi à voir M.Gül profiter de sa large majorité au Parlement pour faire adopter un amendement constitutionnel qui permettrait de rétablir l'éligibilité de M. Erdogan. « Nous sommes aujourd'hui dans une situation anormale. Il est donc de notre devoir absolu de normaliser cette situation anormale », a d'ailleurs déclaré le chef du gouvernement et numéro deux de l'AKP, samedi. C'est même Tayyip Erdogan qui a annoncé le même jour le programme gouvernemental destiné à accélérer la mise à niveau de la Turquie candidate à l'UE. Ce plan, a-t-il dit, sera adopté d'ici un mois et visera, entre autres, à pénaliser « immédiatement » la pratique de la torture, réforme-clé exigée par l'Europe en préalable à toute ouverture de négociations. Il a aussi promis de mettre en oeuvre toute une série de réformes, notamment économiques et éducatives, pour « construire un nouveau monde ». « Le moment est venu de se mettre au travail. Dès maintenant, il faut se mobiliser et travailler nuit et jour pour résoudre les problèmes que rencontre notre peuple », a pour sa part, déclaré M. Gül après avoir été mandaté par le chef de l'Etat, Ahmet Necdet Sezer.