Nous sommes à la Chambre correctionnelle près le tribunal de première instance à Casablanca. En tenue de sport, Abdellah, trente-huit ans, père de trois enfants, se tient dans le box des accusés. Dès le début de son interrogatoire il se disculpe, rejetant en bloc les accusations d'escroquerie et affirmant qu'il ne connaît pas les plaignants. «C'est un coup monté», a-t-il répondu au juge. Mais celui-ci en a vu d'autres. Tellement d'accusés jouent le rôle de victimes une fois devant la Cour. «Mais pour quelle raison tu as purgé déjà deux peines d'emprisonnement ?», lui a-t-il demandé le tribunal. «Pour escroquerie», répond Abdellah En effet, selon le procès-verbal, l'affaire a éclaté suite à une plainte déposée par un chauffeur de taxi, Nasser. Dans cette plainte, ce dernier a expliqué qu'Abdellah s'est présenté chez lui pour lui dire qu'il pouvait aider ses deux frères, en détention préventive, arrêtés pour trafic de drogue. C'est ainsi qu'Abdellah, qui se faisait passer pour un policier, lui a promis que ses deux frères pourront bénéficier d'acquittement dès leur passage devant le procureur du Roi. Pas de temps à perdre. Abdellah est passé rapidement aux négociations. Contre la somme de 20 mille dirhams réclamée par le faux policier, le chauffeur de taxi lui a versé un acompte de dix mille dirhams. Mais la promesse n'a pas été tenue puisque les deux frères ont été condamnés à un an de prison ferme chacun. Un coup de téléphone entre le chauffeur de taxi et l'escroc suivi d'un rendez-vous a abouti sur l'accord de recevoir les dix mille dirhams restants afin qu'ils bénéficient de l'acquittement à la Cour d'appel. En effet, l'escroc a commencé à insister sur les dix mille dirhams restants. Ce qui a mis la puce à l'oreille du chauffeur du taxi qui lui a expliqué qu'il ne lui en versera qu'une fois ses deux frères libérés. Aussitôt, il a prévenu la police qui a entamé une enquête soldée par l'arrestation du mis en cause. Effectuant une perquisition à son domicile, les enquêteurs ont mis la main sur une pile de faux contrats de travail, des photos d'identité, des photocopies de cartes nationales, des extraits d'actes de naissance, des attestations de travail, des formulaires pour demandes de visas et plusieurs autres faux documents. Entre temps, plusieurs victimes se sont présentées devant les enquêteurs pour porter plainte contre Abdellah qui leur vendait des promesses. Et toutes les victimes de cette escroquerie ont affirmé qu'elles avaient remis des montants d'argent variant entre 5 et 20 mille dirhams. Jugé coupable pour escroquerie avec récidive, Abdellah a été condamné à trois ans de prison ferme.