Entre mini-avancées diplomatiques et mini-guerre entre les deux rivaux à la tête de l'île, Madagascar reste paralysée par la crise. À laquelle est venu s'ajouter le recrutement avorté de «mercenaires» français. L'équipée de douze «mercenaires» français, recrutés à Paris pour une mission à Madagascar selon l'état-major du président élu Ravalomanana, n'en finit plus d'aggraver la tension entre les deux rivaux de l'île. Après avoir été intercepté en Tanzanie, leur avion est finalement retourné en France, dans la nuit de mercredi à jeudi, à Lyon-Satolas. Pire, alors que les critiques fusent du côté des autorités malgaches, les douze hommes ont quitté l'aéroport libres, puisque «au vu du droit français, il n'y avait aucune infraction». Partis du Bourget (Paris) mercredi à destination de Madagascar, ces «mercenaires» sont soupçonnés d'avoir «été recrutés par le camp Ratsiraka», selon l'état-major de Marc Ravalomanana. Tous «de nationalité française mais originaires de divers pays», ils auraient été dirigés par un «certain Garibaldi, connu sur le continent africain dans les zones chaudes, en particulier en République démocratique du Congo où il a combattu » ajoute-t-on. Si le plan de vol de l'appareil qui les transportait prévoyait effectivement un atterrissage à Toamasina, le fief de Didier Ratsiraka, aucun lien n'a pu encore être directement établi entre l'ex-président, en visite en France, et ces mercenaires. «Cette ridicule équipée de mercenaires risque de faire capoter les efforts diplomatiques engagés par l'OUA et elle montre que l'amiral Ratsiraka, s'il en est bien le commanditaire, est prêt à tout pour ne pas perdre la face», a commenté mercredi un proche du président élu. Les «efforts» en question avaient cependant déjà été amoindris lors de la composition, mardi, du nouvel exécutif malgache. Un gouvernement censé être de «réconciliation» alors que le nouveau chef d'Etat n'a intégré qu'un seul proche de son rival. «C'est le troisième gouvernement, toujours non légal d'après nous, en quelques mois. Je ne vois pas en quoi il s'agit d'un gouvernement de réconciliation», a même déclaré mercredi José Andrianoelison, proche conseiller de M. Ratsiraka. « Pour se réconcilier, il faut être plusieurs. On peut être satisfait de l'entrée du général Sylvain Rabotoarison (ministre de l'environnement) qui est le seul capable de parler à la fois au président Ratsiraka et à M. Ravalomanana», a-t-il ajouté. Pendant ce temps, les deux camps se sont livrés à une mini-bataille navale près de l'île de Nosy Be (nord-ouest), sous contrôle du camp Ratsiraka. Deux bateaux y échangent des tirs d'armes automatiques depuis mardi soir. A bord du «Capitaine Rodrigue», des hommes de l'ex-président ont pilonné à la mitrailleuse lourde anti-aérienne le «King» où se trouvent des renforts de l'armée de Ravalomanana. Si selon l'un des principaux médiateurs de la crise malgache, le président sénégalais Abdoulaye Wade, une normalisation de la situation à Madagascar est en vue «dans les prochains jours », la prochaine étape pour la paix sur l'île, le sommet de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA), s'avère épineuse. Cette réunion, prévue vendredi à Addis-Abeba (Ethiopie), doit absolument apporter plus que des mini-sorties de crise, comme ce fut le cas lors de Dakar I (18 avril) et Dakar II (9juin). Un méga défi.