La semaine dernière a commencé avec un arrêt de la Cour suprême israélienne-, dont l'âge des juges, hommes et femmes, dépasse les 65 ans-, condamnant la « barrière de sécurité » d'Ariel Sharon, en dehors de la ligne verte correspondant aux frontières de 1967. Bien plus, la Cour suprême a affirmé qu'elle ne pouvait « légitimer, en aucun cas, une annexion de territoires ». Elle retenait par d'anciens généraux de Tsahal mettant en cause « la recherche d'une sécurité qui ne peut justifier une atteinte aux droits légitimes des Palestiniens, sur leurs terres, en Cisjordanie et à Gaza ». En fin de semaine, la Cour internationale de justice de La Haye, - avec des juges de plus de 65 ans , a confirmé cette condamnation d'une « barrière » qui s'éloigne des frontières acceptées de 1967. En affirmant, définitivement : « Il faut démanteler toute barrière ou mur, dits de sécurité, contraires au droit humanitaires international. Il faut verser des réparations aux Palestiniens concernés ». Le problème de la « barrière de sécurité » étant reporté à 2006, comme l'affirme l'Etat-major général de Tsahal, Ariel Sharon a voulu revenir à son plan de désengagement de la Bande de Gaza, avec l'évacuation de ses 21 colonies « sauvages » au Nord de la Cisjordanie. Mais les répercussions de ce plan mettent en cause la majorité de la coalition du gouvernement d'Ariel Sharon, avec le départ de quatre ministres d'extrême droite et celui, bientôt, des deux ministres restant du Mafdal. Lors d'un vote de défiance à la Knesset (Parlement), la majorité s'est, d'ailleurs, effondrée à 56 voix, contre 56 voix de l'opposition. Après ce vote à égalité, est survenu un scandale entre deux ministres du parti Shinouï qui se prétendait jusque- là « le symbole de la propreté politique ». Un nouveau ministre de la coalition est donc limogé, ramenant le gouvernement à 58 membres de la Knesset (la majorité étant de 61 membres). Dans le même temps, la Cour suprême fixait, à novembre 2006 – au lieu de 2007 – la date des nouvelles élections législatives israéliennes. Une nouvelle campagne électorale est donc ouverte. Aucun des « grands » partis – le Likoud avec 40 députés, les travaillistes avec 19 et le Shinouï avec 15 -, ne souhaitait, pourtant, de nouvelles élections aussi proches. Ariel Sharon, qui voulait reculer l'alliance avec les Travaillistes de Shimon Peres, est donc obligé d'envisager, sans tarder, un gouvernement d'Union, pour sauver deux années de pouvoir. Shimon Peres, président du parti Avoda (Travaillistes) ne s'empêche pas, en bonne conscience mais avec un appétit insatiable, de continuer à condamner le gouvernement de droite de Sharon, par des formules les plus acerbes possibles. Comme: « Rien ne me fera plus plaisir que de voir Shylvain Shalom (ministre actuel des Affaires étrangères), diriger la campagne du désengagement ». Il faut rappeler que Sylvain Shalon s'est toujours déclaré contre le plan Sharon d'évacuation de Gaza et ne l'a voté que contre la promesse de garder son ministère… réclamé par Shimon Peres. Celui-ci a, cependant, ajouté « Si on nous invite à entrer au gouvernement, nous en débattrons. D'autant que la décision de la Cour gouvernement, nous en débattrons. D'autant que la décision de la Cour suprême est une victoire de la démocratie, car nous avons besoin d'un gouvernement effectif et non de celui qui, actuellement, gaspille le temps… Même en novembre 2006 les prochains élections, pour changer de majorité, sont loin…». Certains considèrent l'union avec le parti travailliste – comme le prétend Rosenblum dans le quotidien «Haaret» -, comme une des illusions d'un grand succès de Sharon, aux fonctions de chef du gouvernement. Sa prétention a toujours été d'arrêter la marche du temps. Aujourd'hui il veut regrouper, autour de sa volonté de survie, une large coalition, même si les composantes doivent changer selon les circonstances. Il poursuit l'usage de choses utiles quoique changeantes, même s'il prétend préserver des perspectives et des promesses : en particulier, selon lui, la liquidation du terrorisme ou le renvoi du président Arafat… Devant l'échec de sa lutte contre les effets, il comprend enfin, en partie, qu'il faut aborder les causes. Il décide un plan de désengagement de toute la Bande de Gaza et de toutes les 21 colonies, y compris les positions de l'armée israélienne. Il accepte l'évacuation des implantations sauvages de la Cisjordanie. Il s'aventure, curieusement, sur un référendum au sein de son parti, le Likoud, qui refuse son plan. Sharon persiste à croire et à rejeter tout ce qui arrive, en laissant au temps le temps de s'écouler lentement. La conscience, à cette occasion, s'estompe. Pour Sharon, l'essentiel est que son pouvoir ne coule pas… Son gouvernement est, pourtant, devenu minoritaire et ne tient qu'à un fil. Ariel Sharon reçoit des coups de toutes parts : par les accusations de corruptions, par des intrigues politiques et des luttes de gauche et celles de droite des concurrents qui espèrent sa chute. D'autres, aujourd'hui les religieux, appellent à l'assassinat de celui qui les trahit, disent-ils. Il leur répond, avec une surprenante faiblesse face à une menace à sa vie : « Il est regrettable que moi, qui ai défendu les Juifs toute ma vie, j'aie besoin d'en être protégé aujourd'hui ». Sharon a seulement oublié que les religieux fanatiques considèrent que toute action, en leur faveur, leur est due… Sharon tombe, à présent, vers le côté surréaliste de sa responsabilité dans la création de multiples colonies, en Cisjordanie et à Gaza, depuis 1977. Il apparaît suspendu en l'air, « sans début, sans milieu et sans fin, comme vivant sa propre inerte » (Dorom Rosenblum – Haaretz). Mais il tient, à présent, à son plan de désengagement de Gaza et à l'évacuation des colonies. Pourtant, il y a neuf ans, Ariel Sharon – en compagnie de Benyamin Netanyahou -, condamnait les accords d'Oslo et s'opposait à la réalisation par Itshac Rabin de la deuxième étape de l'évacuation, de l'armée israélienne, des territoires palestiniens. Les amis de Sharon, à l'époque, sont ceux qui, à nouveau, reviennent à la menace de mort après avoir assassiné le Premier ministre, Itshac Rabin. Les mêmes religieux orthodoxes (Harédim) se déclarent prêts à assassiner le chef du gouvernement, des chefs de police ou des ministres : telle est la mise en garde publique, du chef des services de sécurité, Avi Dichter. Cette menace, est celle de religieux fanatiques, dont les Rabbins, soutenant les colonies de Gaza de Cisjordanie, qui parlent de « Din Rodef », à savoir : un devoir religieux de supprimer ceux qui affaiblissent Israël, en abandonnant des terres. Cette loi, la plus ancienne et la plus fanatique est depuis trente siècles, écartée, oubliée, rejetée par les Rabbins traditionnels. Elle est, aujourd'hui, rejetée par plusieurs des Rabbins séfarades, y compris ceux qui ont été formés en Lithuanie et qui ont créé le mouvement Shass. Car la liturgie traditionnelle séfarade, et, en particulier, la liturgie du Judaïsme marocain, n'est pas la seule véritable identité de leurs juifs religieux. Depuis de longs siècles, ils considèrent, surtout, que la vie de l'homme, est supérieure à toute autre valeur et à tout autre principe territorial. Donc, la grande unanimité des Rabbins, en dehors de fanatiques orthodoxes, pense qu'un assassinat sort de cette règle fondamentale (Halakha) de la religion juive (avec un des dix commandements : « Tu ne toueras point »). Les chroniqueurs de la presse israélienne se sont réveillés, la semaine dernière, en avouant que le secret serait, peut-être, la capacité de Sharon à jouer des peurs des Israéliens et de leur désespoir. De leur fatigue, aussi, et de leur crainte d'un nouveau gouvernement d'alternance. Pourquoi cette crainte ? Parce que le président du Shinouï et celui du Likoud avec plus de 75 ans chacun, sont des vieillards. Ils vont jusqu'à croire encore, ces célèbres vieillards, qu'ils portent, tous deux, le monde sur leurs statures massives toujours aussi «enflés et assoiffés de pouvoir» (Rosenblum). Ils ne peuvent, pensent-ils, être renvoyés. En réalité ils ne sont soucieux que de leur seul propre intérêt. Un autre personnage, toujours au pouvoir ou à la porte du pouvoir, tout le long de sa longue vie, Shimon Peres, malgré ses 81 ans et ses faibles épaules, est prêt à offrir son expérience intérieure et extérieure de l'Etat d'Israël, depuis sa création (1948). Shimon Peres saura, tout en pensant, peut-être, à prendre un nouveau pouvoir, apporter sa vision d'un univers politique. Il voudra faire comprendre ou imposer sa conviction de la nécessité d'une négociation avec la partie adverse, même si on veut la prétendre sans concession. Il s'agit du président Arafat qui impose sa présence aux dirigeants de la politique israélienne, à Sharon, à Tomy Lapid. Seul Shimon Peres sait que Yasser Arafat est indéniable, d'autant qu'il est âgé de plus de 75 ans… Mais Yasser Arafat a été, également, élu par le peuple palestinien et demeure, avec les autres responsables de l'Autorité palestinienne, un interlocuteur incontournable. Shimon Peres exigera, donc, de renouer des négociations avec Yasser Arafat pour espérer un véritable accord de paix. On reviendra, peut-être, à la sagesse honorée dans la Bible…