Ne pas savoir lire et ne rien comprendre. Être hors de l'espace, hors du temps, hors de tout. Je crois que c'est ça qu'on appelle «la planque». Pourquoi je vous raconte ça ? Et bien, vous qui savez lire, relisez le titre et réfléchissez un peu. Bien entendu, je veux parler de ça, c'est-à-dire de tous ceux et toutes celles qui, parmi nous, n'ont pas toute leur tête, mais ne savent pas qu'ils et qu'elles ne l'ont plus. Ne rigolez pas trop parce que lorsque vous allez lire ce que je vais vous apprendre, vous allez moins vous marrer. Je ne vais vous faire trop languir et je vais tout de suite vous le dire ou, plus exactement, vous le relire : «40% de la population marocaine âgée de 15 ans et plus souffre, ou a souffert, d'un trouble mental». Alors qu'est-ce que vous en dites ? C'est fou, hein ? 40% !!! Autrement dit, 4 Marocains sur 10… comment dire… sont un peu ou trop dérangés de la cabosse… ou l'ont été un jour. Et à mon avis, lorsqu'on l'a été une fois, on doit probablement, d'une manière ou une autre, le rester pour toujours. Il y a même une info dont je suis sincèrement gêné d'en révéler la teneur et qui est encore plus troublante: cette situation concerne… une femme sur deux. (Chérie, excuse-moi, mais j'étais obligée de le dire. Ethique oblige…) Non, ça ne m'amuse pas, mais je ne vous cache pas que, quelque part, moi, ça me rassure. Je vous explique. Personnellement, depuis presque toujours, à chaque fois que je fais quelque chose de différent que les autres ou que je dise ou que j'écrive des trucs que les autres ne disent pas ou n'écrivent pas même s'ils ne sont pas muets et même s'ils savent écrire, et bien, à chaque fois, disais-je, que je la ramène, on me sort toujours la même phrase : «Tu es fou, toi !». Alors qu'en général je me défends et je revendique d'être irréfutablement un sain esprit – et pas, s'il vous plaît, un simple d'esprit – aujourd'hui, je me dis qu'au fond, ils n'ont peut-être pas tort. Si nous sommes 40% plus ou moins dingues, donc, j'ai presque une chance sur deux d'être moi-même un peu taré. Cela dit, en plus d'être en quelque sorte éclairé sur mon sort, ça ne me dérange pas trop d‘être un peu dérangé, parce que, voyez-vous, je suis convaincu de l'être plus que les autres. La preuve, comme je vous l'ai dit, on me dit toujours que je suis… fou. Et qu'est-ce que cela signifie ? C'est que même si beaucoup d'entre nous, c'est-à-dire beaucoup d'entre vous sont un peu, beaucoup ou même trop fous, je serai sûrement plus fou que vous. D'ailleurs, pour tout vous dire, moi ça m'arrange pas mal d'être un peu dérangé parce que j'en ai fait presque un métier. Tenez, qu'est-ce que je suis en train de faire présentement ? Bien sûr, écrire. Mais, écrire quoi ? Bien entendu, n'importe quoi, des délires, quoi ! Pourtant, ce sont ces délires que vous êtes en train de lire et peut-être même en train de vous en délecter. C'est la preuve, encore une, qu'un fou arrivera toujours à trouver un plus fou que lui. On ne sait pas toujours qui l'est plus que l'autre, mais, en ce qui me concerne, ça ne me gêne pas du tout d'être le plus fou du village. Tant que ça m'amuse et tant que… ça rapporte. Il faut être fou pour refuser ça. Après vous avoir raconté tout ça, j'aimerais attirer votre attention qu'il y a quand même un petit problème : qu'il n'y a pas assez de ressources humaines pour s'occuper de nous. Je ne parle pas de moi parce que moi je n'ai pas envie de me faire soigner, mais je m'inquiète pour vous : il paraît qu'il n'y a que quelque 1.500 lits pour tout ce beau monde, et même si on double la capacité comme cela est prévu, il resterait beaucoup de monde dehors. Qu'est-ce qu'on va s'amuser ! En attendant, je souhaite à tous ceux et à toutes celles qui sont dingues comme moi un très bon week end. Quant aux autres… Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : Quand on aura rallumé la lumière, distribué les prix et rangé le tapis rouge, qui risque de ne plus faire son cinéma ?