Alors que les pays industrialisés vieillissent, les pathologies liées à l'âge, dont la maladie d'Alzheimer, sont en nette augmentation. Les autorités sanitaires sont-elles en mesure de relever ce défi majeur de santé publique ? Depuis une vingtaine d'années, le monde médical s'est attaché à mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques de la maladie d'Alzheimer, seule manière d'envisager une thérapeutique curative de cette affection. Comment faire face à la dépendance ? Apraxie *, défaillance de la mémoire, troubles cognitifs associés, la maladie d'Alzheimer conduit inexorablement à une perte d'autonomie. Alzheimer débute habituellement par des troubles de la mémoire. D'autres troubles cognitifs apparaissent progressivement, conduisant à la démence. Le premier symptôme frappant est la perte du souvenir des événements récents (amnésie) ; elle se manifeste initialement par des distractions mineures qui s'accentuent progressivement avec la progression de la maladie, tandis que les souvenirs plus anciens sont relativement préservés. Par la suite, les déficits cognitifs s'étendent aux domaines du langage (aphasie), de l'organisation des mouvements (apraxie), de la reconnaissance visuelle (agnosie) et des fonctions exécutives (telles que la prise de décision et la planification). Ces derniers symptômes reflètent en particulier le processus pathologique de dégénérescence atteignant les lobes frontaux du cerveau. Ces changements psychologiques influent sur les qualités humaines essentielles et pour cette raison la maladie d'Alzheimer est quelquefois décrite comme une maladie où les victimes subissent la perte de qualités qui forment l'essence de l'existence humaine. On entend souvent que la personne qui souffre de la maladie retombe en enfance. C'est effectivement un retour à l'immaturité neurologique constaté dans les premières années de vie. Cependant, alors qu'un jeune enfant découvre la vie pour progressivement gagner en autonomie, une personne atteinte de la maladie d'Alzheimer va petit à petit la perdre. Ne pas comprendre que l'on risque de s'égarer en sortant seul tout en ayant encore la notion d'être adulte est un paradoxe qui rend l'accompagnement difficile et subtil. Les traitements actuels, qui permettent uniquement de retarder les symptômes de la maladie, n'offrent aucun espoir de guérison. Au Maroc la maladie est toujours méconnue et le royaume affiche un important retard dans la prise en charge des malades, pour ne pas dire une absence totale de prise en charge. Alors que cette pathologie est la première cause de placement en institution, les structures médicalisées sont absentes à ce jour. Une épidémie silencieuse ? L'âge constitue le premier facteur de risque de développer la maladie d'Alzheimer. 5% des personnes de plus de 65ans et 25% des plus de 80 ans sont touchées. Actuellement, environ 25 millions de malades sont recensés dans le monde, dont la moitié dans les pays occidentaux où les populations ont gagné vingt-cinq ans de vie en un siècle. Au Maroc, le nombre de malades est estimé à 20 000. Alors que la société prend davantage en charge les dépenses médicales dues au cancer, une moindre attention est portée à la maladie d'Alzheimer. Les recherches qui ont débuté en Europe, il y'a seulement vingt ans, restent aujourd'hui sous-investies par rapport au Sida. Une politique de santé publique peut-elle se désintéresser d'une tranche non négligeable de la population, sous prétexte qu'elle est improductive ? Si, pendant longtemps, la séparation entre la démarche sénile et le vieillissement a été difficile, actuellement tous les auteurs admettent la maladie d'Alzheimer comme maladie à part entière et le terme même de « maladie d'Alzheimer » tend à remplacer celui de « démence de type Alzheimer » ou de « démence sénile type Alzheimer ». Véritable entité, la maladie d'Alzheimer est une maladie du cerveau et non de l'esprit. C'est une maladie Corticale (du cortex cérébral) par opposition aux maladies sous-corticales (zone profonde du cerveau, comme la démence de Parkinson ou la maladie de Huntington). Elle se traduit pas l'association de déficits cognitifs : mémoire, attention, jugement, apprentissage et des troubles du comportement, qui modifie ou gêne l'environnement socio-familial. Le diagnostique précoce, le meilleur des traitements ? La maladie d'Alzheimer évolue de façon silencieuse pendant dix à vingt ans, jusqu'au moment où le cerveau ne parvient plus à compenser la perte des neurones. Au Maroc, le diagnostic est posé en moyenne deux ans après l'apparition des premiers symptômes, contre dix ou quinze mois dans les pays européens. La question de la formation de médecins et personnels infirmiers marocains, sur cette maladie est donc posée. Il est essentiel de poser le diagnostic au plus tôt, pour pouvoir traiter les patients en tout début d'évolution. En effet, les médicaments sont d'autant plus efficaces s'ils ont été administrés tôt. L'un des enjeux majeurs de la recherche concerne la découverte de marqueurs prédictifs fiables qui permettraient de poser un diagnostic précoce. Celui-ci est également nécessaire pour tester l'efficacité des médicaments qui pourront ralentir, voire empêcher, le regroupement de neurone en dégénérescence (plaques séniles). Vieillesse ou maladie ? Le cerveau est constitué d'environs 100 milliards de cellules nerveuses ou neurones qui ont des possibilités infinies de connexion ou synapses. Contrairement à la plupart des cellules des autres organes (le foie, par exemple), le neurone ne se divise pas, ne se multiplie pas. Lorsqu'il meurt, il n'est pas renouvelé : c'est le cycle normal de la vie. Dans le cas de certaines maladies dites « neurodégénératives » comme la maladie d'Alzheimer ou la maladie de Parkinson, il se produit un vieillissement pathologique du cerveau dû à une perte anormale des neurones. Ces maladies chroniques, lentement évolutives, sont dues à des lésions microscopiques dans des zones très précises du cerveau. La maladie d'Alzheimer débute dans l'hippocampe, région impliquée dans la mémoire. La maladie de Parkinson touche plus particulièrement les neurones produisant de la dopamine, qui sont essentiels pour se mouvoir. * APRAXIE : Incapacité à effectuer des mouvements volontaires, alors que les fonctions motrices et sensorielles sont normales. Focus A quand le vaccin contre la maladie d'Alzheimer ? De toutes les pistes de recherches, le vaccin est la plus prometteuse. Les anticorps injectés par vaccination ciblent les plaques séniles qui bloquent le fonctionnement des neurones. Ces anticorps sont alors capables de déclencher la destruction de ces plaques. Un premier essai de vaccination a du être stoppé en 2002, du fait d'effets indésirables survenus chez certains patients. Les chercheurs envisagent une reprise prochaine des essais avec de nouvelles approches, permettant d'éviter les effets secondaires. Sur la toile Pour toute information, sur la maladie d'Alzheimer, les symptômes, l'accompagnement au Maroc, visitez les liens : www.marocalzheimer.info & www.marocalzheimer.org