Entretien avec Soumaya Hajji, présidente de la commission de l'égalité et des droits de la femme au PPS Propos recueillis par Fairouz EL Mouden Soumaya Hajji, militante et membre du bureau politique du Pari du Progrès et du Socialisme livre, dans cet entretien accordé à Al BAYANE, sa vision et celle de son parti pour faire aboutir le projet sociétal moderniste et démocratique auquel aspire toutes les marocaines et les marocains. La présidente de la commission de l'Egalité et des Droits de la femme au sein du BP du PPS estime que la question du genre et de la consécration des droits de la femme fait partie des gênes du PPS. La commission a pour mission d'être avant tout une force de proposition aussi bien pour la refonte de la Moudawana que du code pénal qui ont montré leurs limites ou encore pour la lutte contre la violence contre les femmes, explique notre interlocutrice. Et d'ajouter que le changement de mentalités et de vulgarisation des principes de la masculinité positive ne sont pas des moindres. Et Soumaya de conclure que tout cela nous comptons le faire dans le cadre d'un débat serein et éthique, dans un respect de l'avis de tout un chacun, sans surenchères politiques et sans tomber dans des accusations gratuites. Les propos. AL Bayane : Vous avez été nommée dernièrement à la tête de la Commission de l'Egalité et des Droits de la Femme au sein du Bureau Politique du PPS, dont vous êtes nouvellement membre. Quelle est, globalement, la feuille de route des missions dont vous êtes impartie ? Soumaya Hajji : Comme vous l'avez bien souligné dans votre question, le Parti du Progrès et du Socialisme, vient de renouveler son Bureau Politique, à la suite de la tenue de son 11ème Congrès National. Ce bureau compte aujourd'hui plus de femmes qu'il y en avait dans le précédent Bureau, toutes engagées et décidées, à participer aux côtés de femmes et hommes siégeant au Comité Central, et militant dans toutes les sections locales et provinciales du Parti, à œuvrer pour que la femme puisse jouer pleinement son rôle dans la société marocaine et occuper la place qui lui revient, tel que cela a été stipulé dans la Constitution de 2011. La désignation d'une commission dédiée à l'égalité et aux droits de la femme n'est pas une chose arbitraire pour le Parti du Progrès et du Socialisme. En effet, la question du genre et de la consécration des droits de la femme fait partie des gênes du PPS. C'est un Parti qui a toujours placé la parité au cœur de ses priorités, la considérant être un combat quotidien mené, côte à côte, avec toutes les forces vives du pays, et qui s'inscrit dans la construction démocratique. Cette Commission aurait principalement pour mission d'être une force de propositions, que ce soit pour ce qui concerne la Moudawana et les amendements que le Parti du Progrès et du Socialisme voudrait y apporter, que ce soit pour le Code Pénal, la Loi 103-13 pour la lutte contre la violence faite à l'égard des femmes ou tout autre arsenal juridique dont l'application a montré des limites et a porté, d'une manière ou d'une autre, atteinte à la dignité, au bien-être de la femme ou à sa position dans la société marocaine. La Commission travaillera, en concertation avec les forces démocratiques et progressistes, sur le plaidoyer afin de faire aboutir ses propositions. Mais au-delà des lois à changer, la Commission aura énormément à faire en matière de changement de mentalités, de vulgarisation des principes de la masculinité positive, de sensibilisation au contenu actuel de l'arsenal juridique et toute forme d'amendements que nous voulons lui apporter. Car sans un engagement de la femme, d'abord, dans ce processus, en étant elle-même bien informée et bien impliquée, et sans l'engagement de l'homme au même titre, il serait difficile d'envisager un quelconque changement. Un changement que nous voulons, au sein du Parti du Progrès et du Socialisme, rendant justice aux femmes et aux hommes, à part égale, pour une famille équilibrée, et par conséquent une société moderne, où la femme s'épanouit tout au tant que l'homme, pour une meilleure participation au développement du pays. Nous comptons, bien entendu, poursuivre les efforts du Parti, entamés depuis plus de 8 décennies, dans le domaine de la défense des droits des femmes, à travers notamment, la promotion de la participation politique des femmes et de leur accès aux postes de décision, le renforcement du rôle et de la position de la femme dans l'édification de la société marocaine et l'approfondissement du débat sur les questions de la parité et de l'égalité. Quelle évaluation faites-vous aujourd'hui de l'évolution de la situation des droits de la femme au Maroc, notamment depuis l'adoption de la Moudawana dont le PPS a été l'initiateur ? La Moudawana ou le Code de la Famille, qui a vu le jour en 2004, a été le couronnement d'un long processus de militantisme, de revendications, de plaidoyer pour les droits de la femme, de nombreuses consultations, de débats, et de grands efforts de réconciliation entre les positions des conservateurs, traditionalistes et des réformistes et progressistes dont le Parti du Progrès et du Socialisme fait partie. Ce code a été considéré à l'époque comme une vraie révolution juridique et sociale dans le sens où il a consacré l'égalité juridique entre les hommes et les femmes, tous les deux devenus co-responsables de la famille, a donné à la femme la possibilité de demander le divorce, a fixé l'âge du mariage pour l'homme et la femme à 18 ans, a soumis la polygamie à des conditions très strictes et à l'autorisation du juge, a mis fin à la wilaya dans la conclusion du mariage pour la femme majeure, a rendu possible le divorce par consentement mutuel, a donné la possibilité aux petits-enfants du côté de la fille d'hériter de leurs grands parents au même titre que ceux du côté du fils...Bref, un Code qui se voulait être une fin à toute forme de discrimination, d'injustice et de violences faites aux femmes. Aujourd'hui, et après 20 ans d'existence, il est clair que ce Code, s'est heurté dans sa mise en application à plusieurs obstacles, entre autres un appareil juridique mal adapté malgré les projets de réforme du système, notamment un manque de juridictions de la famille dotées d'équipements modernes et disposant de magistrats spécialisés, une sensibilisation des citoyennes et citoyens et une vulgarisation du Code par les médias. Aujourd'hui, on se rend compte que beaucoup d'hommes et de femmes n'ont aucune connaissance de ce Code, ou leurs connaissances sont erronées, et une bonne majorité d'entre eux, ne s'y est intéressée qu'une fois devant un tribunal. Par ailleurs, la pratique a révélé certaines lacunes et insuffisances notamment au niveau de l'autorisation pour la polygamie, le mariage des mineurs, la reconnaissance d'enfants issus de relations illégales... et bien d'autres points sur lesquels nous reviendrons plus en détail lors de la publication du Mémorandum du Parti du Progrès et du Socialisme, qui sera entièrement consacré aux amendements que le Parti juge nécessaire d'introduire au présent Code de la Famille. Quelles démarches vous préconisez pour obtenir de nouveaux acquis en matière des droits pour la femme marocaine ? Comme je l'ai mentionné auparavant, nous optons toujours pour une étude approfondie et rationnelle de l'existant, nous relevons les failles pour sortir avec des propositions concrètes, argumentées, des textes à changer certes en ayant recours au plaidoyer, mais aussi des comportements et des mentalités sur lesquels un travail colossal devrait être effectué, entre autres, à travers des ateliers de sensibilisation et de formation. Tout cela, nous comptons le faire, comme le Parti du Progrès et du Socialisme l'a toujours fait, à travers le débat serein et éthique, dans un respect de l'avis de tout un chacun, sans surenchères politiques et sans tomber dans des accusations gratuites. Auriez-vous un message à faire passer à l'occasion du 8 mars, journée internationale des droits de la femme ? Notre société marocaine a connu plusieurs mutations qui exigent des changements à plusieurs niveaux, sur lesquels le Parti du Progrès et du Socialisme continuera d'œuvrer, comme il l'a toujours fait, afin que les lois et les mentalités régissant notre société soient au diapason des revendications de toutes les forces démocratiques, de toutes les militantes et de tous les militants des droits de l'homme, afin de faire aboutir le projet sociétal moderniste et démocratique auquel nous aspirons tous. J'espère que l'année 2023 sera l'année du changement pour la femme marocaine que je salue hautement.