Par ses homologues d'Amérique latine Nabil El Bousaadi Il va de soi que la défaite de Donald Trump aux élections américaines a eu des répercussions bien au-delà des frontières des Etats-Unis tant leur influence est grande. S'agissant de l'arrière-cour latino-américaine de Washington, il est clair que du Rio Grande, dans le nord du Mexique, jusqu'à la Terre de Feu, à l'extrême-sud du Chili et de l'Argentine, l'arrivée de Joe Biden constitue une nouvelle donne et que de nouvelles cartes vont donc être distribuées. Tout comme le président colombien Ivan Duque, Jair Bolsonaro le président du Brésil – appelé souvent «le Trump brésilien» – a perdu en Donald Trump un bien précieux allié. Aussi, ce dimanche soir était-il le dernier chef d'Etat latino-américain à ne pas avoir publié la moindre réaction à propos des élections américaines. En ayant perdu son «modèle», le président du Brésil va, désormais, se retrouver plus seul que jamais du fait notamment de son déni de la pandémie, son mépris pour les Noirs ou encore son désintérêt pour les questions d'environnement. Ce n'est point le cas des chefs d'Etat de Cuba et du Venezuela qui espèrent, fermement, voir le nouveau président américain alléger les sanctions qui frappent leurs pays notamment après que Donald Trump ait court-circuité la politique d'ouverture lancée par Barack Obama en direction de La Havane principalement dans le domaine du tourisme. Et même si, par ailleurs, nul ne sait, à l'heure qu'il est, si Joe Biden aura les moyens de mettre fin à ce reliquat de la guerre froide que constitue l'embargo économique imposé à Cuba depuis près de soixante ans, le président cubain Miguel Diaz-Canel a écrit sur son compte Twitter: «Nous reconnaissons que [...] le peuple des Etats-Unis a opté pour un nouveau cap. Nous croyons dans la possibilité d'une relation bilatérale constructive et respectueuse des différences». Washington va-t-elle répondre positivement à cette main tendue de La Havane ? Laissons du temps au temps... Le président vénézuélien Nicolas Maduro s'est empressé, de son côté, de «féliciter le président élu Joe Biden et la vice-présidente Kamala Harris, pour leur victoire» et a fait part de l'entière disposition du Venezuela «au dialogue et à la bonne entente avec le peuple et le gouvernement des Etats-Unis». Est-ce à dire que Caracas serait disposée à renouer les relations diplomatiques qu'elle avait rompues avec Washington en 2019 lorsque cette dernière avait reconnu Juan Guaido comme président par intérim ? Les voies du Seigneur étant impénétrables et les intérêts économiques occupant toujours une place de choix dans les relations internationales, rien, pour l'heure, ne permettrait d'affirmer le contraire; la seule certitude étant qu'un allègement des sanctions américaines – notamment dans le domaine pétrolier – constituerait une merveilleuse bouffée d'oxygène pour une économie vénézuélienne à genoux. Non loin de là, au Nicaragua, si le président Daniel Ortega et son épouse – qui est, en même temps, la vice-présidente – ont salué la victoire de Joe Biden, l'opposition au régime sandiniste de Managua espère, de son côté, que le nouveau président américain lui fournira l'assistance requise pour la réinstauration de la démocratie dans le pays. Au Mexique, pays hispanophone le plus proche des Etats-Unis, le président Andres Manuel Lopez Obrador, a fait montre de prudence, en ne s'empressant pas de féliciter le nouveau locataire de la Maison Blanche préférant «attendre que toutes les questions légales soient résolues». Pour rappel, bien qu'étant étiqueté «de gauche», le président mexicain avait eu des relations plutôt sereines avec Donald Trump auquel il avait même rendu visite au mois d'Août dernier, au plus fort de la campagne électorale ; une politesse diplomatique à très fort relent de soutien qu'en son temps Joe Biden n'avait certainement pas appréciée et dont il pourrait fort bien tenir compte aujourd'hui. Pour le Honduras, le Guatemala et le Salvador – ces principaux pays fournisseurs de candidats à l'immigration à travers ces caravanes qui, depuis deux ans, cherchent à gagner le territoire des Etats-Unis – que la réponse essentiellement répressive de Donald Trump n'avait pas dissuadé, l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche pourrait être salutaire si ce dernier venait à tenter une nouvelle approche moins punitive et quelque peu conciliante. Enfin, si pour l'argentin Alberto Fernandez et pour le nouveau président bolivien Luis Arce, tous deux issus de la gauche latino-américaine, la venue de Joe Biden, apparemment plus «conciliant» que son prédécesseur, serait une bonne nouvelle, il est permis d'affirmer que, dans ce qui constitue l'arrière-cour des Etats-Unis, le nouveau locataire de la Maison Blanche aurait, désormais, plus d'amis que d'ennemis mais attendons pour voir...