Les travaux de l'Université annuelle du Parti du progrès et du socialisme (PPS), consacrée cette fois-ci à la question du secteur public et des services publics pour une réflexion critique sur leur rôle, place et modes de gouvernance, offre l'occasion idoine de rechercher des alternatives et réponses aux interrogations que soulèvent les changements intervenus dans ce domaine, dans le but ultime d'enrichir les programmes et visions du PPS à neuf mois seulement des élections législatives du 7 Octobre 2016, a affirmé samedi à Rabat, le secrétaire général du parti, Mohamed Nabil Benabdellah. Benabdellah : L'Université annuelle du PPS contribue à l'enrichissement des programmes du Parti Dans une allocution d'ouverture de cette rencontre, le SG du PPS a expliqué que le 7 Octobre prochain est la date qui convienne le mieux aux législatives de 2016 émettant l'espoir que ce choix ne soulève pas d'opposition. Pour réussir le pari, il est indispensable d'engager des consultations et concertations avec les partis politiques pour les associer au processus de préparation, a-t-il recommandé, rendant hommage à cette occasion au gouvernement pour le rôle positif joué lors des dernières élections communales et régionales, malgré la persistance de certaines pratiques malsaines, commises par des candidats connus de tous. Ce faisant, le Maroc a franchi d'importantes étapes en matière de parachèvement et de consolidation de son édifice démocratique, a-t-il dit, estimant que les préparatifs de cette importance échéance ne doit pas faire oublier au gouvernement la responsabilité de continuer les chantiers de réforme qu'il s'est engagé d'achever avant la fin de son mandat. Le temps restant est suffisant pour que le gouvernement élabore et adopte un certain nombre de lois organiques, sachant que sur les 24 lois organiques prévues par la Constitution, 19 ont été déjà adoptées ou en cours de l'être, a-t-il rappelé, appelant l'équipe gouvernementale à ne pas baisser les bras avant de faire passer le projet de loi organique concernant la mise en œuvre de l'officialisation de la langue amazighe en tant que langue nationale à coté de la langue arabe, le projet de loi organique sur la grève et le projet de réforme des régimes de retraite, selon une vision globale fondée sur la solidarité. Personne ne peut nier que le gouvernement a fait preuve de courage en ouvrant le dossier des retraites, somme toute très sensible, a estimé le SG du PPS, selon lequel cette réforme doit être placée dans un cadre global visant aussi l'élargissement de la prévoyance sociale à travers la généralisation de la couverture médicale et de la retraite, a-t-il dit, rappelant que les deux projets concernant les deux sujets ont été d'ailleurs adoptés lors du même conseil de gouvernement. Le gouvernement a déployé de grands efforts dans ce sens à travers la mise en œuvre du RAMED et de la couverture médicale pour les étudiants en attendant la mise en place de la couverture médicale pour les professions libérales outre l'augmentation du budget du ministère de la santé, appelé malgré tout à combler le déficit dont il souffre en matière de ressources humaines et en particulier dans le monde rural. Selon le PPS, a-t-il dit, cette réforme doit être menée dans le cadre d'une vision stratégique fondée sur une feuille de route visant à l'élargissement et la généralisation de la couverture, l'amélioration de la gouvernance du secteur à travers l'unification des régimes de retraite autour de deux pôles (public et privé), l'amélioration des prestations de la Caisse nationale de sécurité sociale, la lutte contre toutes les formes de dérapage social chez certains employeurs tout en oeuvrant pour la revalorisation des faibles pensions. Il a renouvelé à cette occasion son appel au gouvernement pour l'annulation de la contribution de l'Etat dans le financement de la retraite des parlementaires, qui ont le droit de se donner un régime de retraite. Il n'a pas manqué aussi d'appeler à la reprise du dialogue social entre le gouvernement et les partenaires sociaux dans le but de préserver la paix sociale et les équilibres fondamentaux, de promouvoir davantage la dynamique de développement et de réaliser les grandes réformes attendues et qui sont à même de consolider davantage le modèle marocain de croissance. Il a également rendu hommage à l'enseignant chercheur Abdelakader Berrada, pour son engagement et ses contributions pertinentes à la pensée économique marocaine, à l'image de feu Aziz Belal et d'autres intellectuels du PPS, qui ont toujours fait honneur non seulement à leur parti, mais également au pays tout entier. Ils constituaient ensemble la commission économique du parti dont les recherches et travaux constituent un patrimoine fort appréciable du parti. Benkirane : Le chef du gouvernement et secrétaire général du Parti de la justice et du développement, Abdelilah Benkirane, a également rendu hommage au chercheur Abdelkader Berrada, l'invitant à faire profiter les générations montantes et le pays tout entier de son œuvre et de ses recherches. Revenant sur l'alliance entre le PJD et le PPS, il a affirmé qu'elle s'est imposée aux deux formations politiques dans le but de protéger le pays des dangers qui le guettent et de faire face aux tentatives d'asservissement des partis politiques, pour leur faire perdre la souveraineté et l'indépendance de décision et les transformer en marionnettes et mercenaires à la solde de forces occultes et d'intérêts étrangers. Les partis politiques sont les piliers de l'Etat car sans partis politiques indépendants, souverains et crédibles, l'Etat serait en danger étant donné les menaces sérieuses de ces forces occultes qui cherchaient à mettre la main sur tous les rouages de l'Etat et remettre en cause même certaines attributions du Roi. De telles forces obscures ont un pied dans le pays et un autre ailleurs et dès qu'une crise éclaterait, elles fuient à bord d'avions laissant les fils du pays sur place pour faire face seuls aux dangers et crises qui guettent la nation, a dit le SG du PJD, selon lequel un parti politique doit respecter les valeurs auxquelles il croit et défendre à tout prix son indépendance et sa liberté. Après « la marocanisation » du printemps arabe et la riposte de SM le Roi aux revendications de son peuple, le Maroc en est sorti la tête haute, a ajouté le SG du PJD. C'est ainsi que le Maroc est le seul pays arabe qui essaie à présent de concilier entre impératifs de la sécurité nationale et respect des droits de l'homme, a ajouté le SG du PJD, appelant les jeunes à faire preuve de patience et pourquoi pas de sacrifices en cas de besoin pour soutenir leur pays. Mohamed Mobdie : Intervenant au nom de son parti, le Mouvement populaire, le ministre délégué auprès du chef du gouvernement chargé de la Fonction publique et de la modernisation de l'Administration, Mohamed Moubdi a fait savoir que l'alliance de son parti avec les composantes de la majorité gouvernementale a pour objectif la réalisation d'un programme commun visant la modernisation du pays et son développement sur tous les plans. Il a rappelé aussi que la modernisation de l'Administration publique s'impose comme un impératif incontournable pour en faire un des leviers de cette œuvre de développement que poursuit le pays sur tous les plans, en particulier à l'heure de la régionalisation avancée en cours, précisant que son département a engagé un ambitieux programme de réforme du statut de la fonction publique et mis en œuvre une nouvelle stratégie en matière de lutte contre la prévarication et la corruption, maux qui rongent l'administration marocaine et handicape son développement. Pour ce faire, le Maroc s'est doté d'une stratégie nationale de lutte contre la corruption, ce fléau qui impacte négativement l'économie et la société. Il a précisé en outre que le partenariat public-privé est susceptible de servir le développement du pays, à condition toutefois d'encadrer l'utilisation de cette formule pour le bien du pays comme il a appelé à la préservation de la diversité culturelle et ethnique du Maroc dans le respect évidemment de la stabilité et de l'unité nationale. Le Maroc se doit aussi de poursuivre son action inlassable contre toutes les tendances extrémistes pour lutter contre le terrorisme et l'exclusion et ce à travers la dialogue et la compréhension, a-t-il relevé. Abdelouahed Souhail : Pour sa part, Abdelouahed Souhail, membre du BP du PPS a présenté un rapport introductif sur le thème de l'Université annuelle du PPS, précisant que la question est plus que jamais d'actualité, au moment où la crise de la SAMIR bat son plein sans connaitre d'issue à l'heure de la mondialisation en cours et de la relance de la vague néolibérale. Historiquement, le secteur public a été introduit au Maroc par le protectorat français pour servir ses propres intérêts à travers la création de l'ONCF, la construction des barrages, la mise sur pied de banques et d'un certain nombre d'offices etc...Cette tendance a prévalu après l'indépendance du pays, qui a tenté d'orienter le service public vers des activités rentables et productives à l'exemple du BRPM, Maroc-Chimie, la SAMIR, les sucreries, etc.... Par la suite, le pays a procédé à la marocanisation et à la nationalisation d'une série d'activités (RAM, COMANAV etc....) tout en s'efforçant de mettre sur pied de nouveaux secteurs et établissements comme l'office du thé et du sucre, la SOMACA, l'Energie électrique, et bien d'autres Plus tard, le pays a procédé à la privatisation d'une série d'activités et de secteurs fort rentables d'ailleurs comme Ittissalat Al Maghrib et d'autres. Sans dogmatisme et rejet total de tout rôle du secteur privé, le PPS appelle plutôt à un secteur public fort à même de doter l'Etat de la force dont il a besoin pour s'acquitter de sa mission et de la capacité à définir une vision du développement et à mettre en œuvre des politiques publiques garantissant la cohésion et la solidarité sociales et spatiales. Au-delà donc du renforcement du secteur public, il s'agit en fin du compte pour le PPS de donner à l'Etat les moyens de sa politique à mettre en œuvre sans que cela ne lui cause des pertes comme c'est le cas actuellement dans nombre de secteurs. Il est illogique de faire endosser à l'Etat la responsabilité de la mauvaise gestion de certaines secteurs comme cela a eu lieu lors de la reprise de la chaîne 2M par l'Etat ou comme certains le proposent actuellement pour sortir de la crise des dettes de la SAMIR, dont la privatisation ambigüe soulève toujours des interrogations, restées sans réponse. En d'autres mots, le pays a besoin plus que jamais d'un secteur public fort dont le mode de gestion doit revenir au chef du gouvernement, lequel doit être aidé dans cette tâche par un appareil de pilotage capable de soumettre le fonctionnement du secteur public au contrôle (audit, enquête parlementaire, etc...) Quant aux services publics, a ajouté Souhail, ils étaient presque inexistants avant le protectorat, lequel a développé des services publics modernes dans le pays en matière de santé, d'enseignement, d'administration, de conservation foncière, de gestion d'eau et d'électricité, etc.... A présent, la Constitution de 2011 a consacré le droit d'accès des citoyens à un service public de qualité adéquat respectant leurs droits et dignité, a-t-il dit, rappelant que pour le PPS il est impératif de développer davantage l'aspect solidaire du service public pour consolider davantage la cohésion et l'entente sociales car il y va de la justice sociale, ce qui contraste avec la vision libérale et néolibérale qui considère que tout service est une marchandise à commercialiser selon la loi du marché. Mais cela ne signifie pas pour autant qu'il ne faut pas chercher à répondre à la question de savoir pourquoi le service assuré par une clinique privé est meilleure que celui d'un hôpital public ou par une école privée par rapport à une école publique. Quoi qu'il en soit, c'est le chef du gouvernement qui doit mettre en oeuvre la politique de gestion des services publics pour le bien du secteur et pour une plus grande convergence des efforts des différents acteurs et départements ministériels, a ajouté Souhail, estimant que ce ne sont pas les ressources humaines qui manquent mais bien les conditions de motivation. Il est aussi opportun d'approfondir la réflexion autour des possibilités qu'offre la formule du partenariat public-privé (délégation, sous-traitance, etc...) pour décongestionner certains services publics, a-t-il relevé. Seddiki : Sans prétendre avoir trouvé des réponses définitives à toutes les questions, la troisième édition de l'Université annuelle du PPS a eu le mérité d'avoir soulevé les véritables interrogations qui préoccupent au plus haut point l'opinion publique secouée par les rebondissements de la crise de la SAMIR, les manifestations de Tanger pour protester contre la cherté des factures d'eau et d'électricité, les marches des enseignants stagiaires, des infirmiers, des jeunes médecins et autres pans de la société, a affirmé Abdeslam Seddiki, membre du Bureau politique du parti. Dans un rapport général, présenté samedi soir à Rabat à la fin des travaux de l'Université annuelle du PPS, organisée autour du thème « le secteur public et les services publics au Maroc face aux défis de la souveraineté économique et de la justice sociale », Seddiki a indiqué que la rencontre a offert aussi l'occasion de rappeler aux militants du parti la nécessité de redoubler d'efforts pour se préparer comme il se doit aux législatives du 7 octobre prochain. Outre le discours d'ouverture du SG du PPS, la rencontre a été marquée par la participation pour la première fois du chef du gouvernement Abdelilah Benkirane, également secrétaire général du PJD, qui a remis à la conférence une contribution écrite, dont nombre de conclusions concernant la participation des citoyens dans la gestion des services publics et la corrélation entre responsabilité et reddition des comptes rejoignent des propositions du parti en la matière. L'organisation de cette université a permis aussi de débattre des moyens de mettre en œuvre les dispositions de la nouvelle Constitution de 2011, qui a consacré de nouveaux droits économiques et sociaux que l'Etat est appelé à respecter sans possibilité d'en confier l'exécution à des opérateurs privés. Certaines missions de l'Etat son en effet non délégables. Il est aussi fondamental de sauvegarder les principes du service public de toute une série de prestations à la charge de l'Etat, sans aller jusqu'à réclamer plus d'Etat ou moins d'Etat, mais plutôt mieux d'Etat pour le bien de la démocratie et le respect des droits et de la citoyenneté des gens, a-t-il ajouté. Il s'est également arrêté sur les résultats des programmes d'ajustement structurel, qui ont impacté négativement nombre de secteurs stratégiques comme l'enseignement et la santé, lesquels secteurs ne doivent en aucun cas faire l'objet de marchandisation, a souligné Seddiki, selon lequel toutes les solutions proposées doivent tenir compte de l'évolution de la situation nationale et internationale. Il est aussi impératif d'approfondir la réflexion au sujet des modes de gestion des secteurs susceptibles de faire l'objet d'un partenariat public-privé, a-t-il proposé, estimant que le succès de cette formule est tributaire du contrôle de la qualité et du mode de gestion. Il ne s'agit pas d'une position idéologique, mais plutôt d'une démarche pragmatique à adopter pour voir où réside l'intérêt du pays, a-t-il estimé, rappelant que le secteur public doit jouer le rôle de locomotive dans l'œuvre du développement du pays.